La ministre espagnole de l’Égalité, Irene Maria Montero Gil vient de lancer une campagne estivale qui invite les femmes à accepter leur corps, le dévoiler sans honte à la plage et revendiquer leurs droits. « L’été est aussi à nous », lance un slogan accompagnant une affiche avec la photo de cinq femmes de diverses tailles et corpulences, joyeusement installées au bord de la mer. L’une d’entre elles, bien en chair, se détache au premier plan, arborant sans complexe un maillot échancré, fuchsia à petits pois noir, un bras tatoué et l’autre faisant un signe de la main ; à ses côtés une femme noire, bien en chair aussi, est assise bavardant avec une autre à la peau blanche ; à l’autre bout est étendue une jeune personne relevant, si l’on peut dire, de la norme et, last but not least, se tient debout une femme d’un certain âge, topless, et exposant sans problème les traces d’une mastectomie. « Tous les corps sont des corps de plage », a renchéri lone Belarra, la ministre des Services sociaux. Il n’est donc plus exigé d’être une ondine avec la plastique parfaite de Kate Moss ou des sœurs Hadid pour jouir des plaisirs aquatiques de plein air et se jeter à l’eau sans craindre d’étaler en public des formes aux antipodes des Top models, stars des réseaux sociaux qui dictent aujourd’hui les critères de beauté. La directrice de l’Institut des femmes, Antonia Morillas, abonde dans ce sens, déclarant à son tour que l’obsession d’une silhouette idéale et parfaite affecte non seulement l’estime en soi des femmes, mais refuse à certaines beaucoup de droits en les marginalisant.
Trinquer à un été sans violence esthétique
La campagne n’a pas fait l’unanimité, comme en témoignent certaines réactions désapprouvant la révélation au grand jour de l’ablation d’un sein. Les concepteurs de cette campagne ont expliqué qu’ils ont voulu montrer que tous les corps avaient leur propre valeur. Et que toutes les femmes avaient le même droit de profiter de l’été, selon l’annonce de cette campagne qui précise aussi : « Aujourd’hui, nous trinquons à un été pour tous, sans stéréotypes ni violence esthétique contre nos corps. » Ils se sont aussi demandé s’il ne fallait pas élargir l’initiative pour inclure des hommes n’ayant pas un corps d’Apollon, alors que la leader de gauche Cayo Lara a, quant à elle, déclaré que tout ce mouvement était totalement absurde, et qu’il tentait de « créer un problème là où il n’y en a pas ».
La jeune ministre de l’Égalité a posté à son tour un message sur Twitter dédié aux hommes qui pensaient que les femmes n’avaient pas besoin de l’autorisation du ministère pour aller à la plage : « Bien sûr, nous y allons, mais nous supposons que nous attirerons la haine en montrant un corps qui n’est pas galbé en maillot de bain. » Selon le site en ligne socioculturel Thred qui s’adresse à la génération Z, la plupart des gens ont quand même du mal à adopter la devise « Tous les corps sont des corps de plage ». Les sondages de l’association caritative Do Something suggèrent que 91 % des femmes ne sont pas satisfaites de leur corps et veulent par tous les moyens paraître, rien de moins qu’incroyable, en maillot de bain.
Le bon temps de « Itsy Bitsy tout petit petit bikini »
Les pressions pour afficher un corps sculptural sont profondément ancrées dans le tissu de la société moderne, affectant les personnes de tous sexes. Elles se sont intensifiées par la sursaturation d’images parfaites et soi-disant sans retouches, qui défilent en continu sur les réseaux sociaux et dans les médias grand public. « Les chiffres sont aussi éloquents », relève Thred. Il suffit d’une simple recherche sur le thème corps d’été sur Google pour réaliser à quel point ces préoccupations sont omniprésentes, avec 3,19 milliards de visites offrant des suggestions sur la façon d’atteindre des idéaux réalisables naturellement. La campagne espagnole espère éradiquer les mentalités toxiques sur la façon dont les corps devraient être. D’autre part, pour celles qui malgré tout ont des appréhensions à se jeter à l’eau telles qu’en elles-mêmes, le site wellandgood donne cinq conseils : d’abord prendre le temps de s’observer puis porter le maillot dans lequel on est le plus confortable, observer les autres corps à la plage, ne pas se blâmer, mais se féliciter, une fois le pas franchi, d’avoir enfin osé se libérer des stéréotypes pétris d’intolérance. Heureux temps de Itsy Bitsy tout petit petit bikini chanté par Dalida et où les femmes ne craignaient pas de dévoiler leurs formes, et qui racontait en toute légèreté l’histoire d’une « belle fille, sur une plage, qui avait peur d’aller prendre son bain. Elle craignait de quitter sa cabine. Elle tremblait de montrer au voisin, son petit itsi bitsi tini ouini, tout petit, petit, bikini qu’elle mettait pour la première fois… ».
commentaires (2)
Je crois que l’auteur de cet article devrait mieux s’informer sur cette campagne d’égalité en Espagne. 1. La ministre d’égalité espagnole est Irene Maria Montero Gil et non Angela Rodriguez Martinez (qui est secrétaire d’état. 2. Si il faut reporter quelque chose de cette campagne c’est le tollé que l’image de la fille en premier plan à gauche a fait: l’auteur de cette campagne n’aurait non seulement pas demandé / validé le droit d’image et reproduction au modèle britannique mais aussi substitué la prothèse du modele pour y mettre à sa place une vrai jambe en chair et en os. Je trouve cet article outrant..
Sophie Nassar
12 h 56, le 09 août 2022