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Nos Lecteurs ont la Parole

Le chemin vers Beyrouth


C’est le 17 août 2020. Sur la véranda de la maison à Jezzine, je regarde le ciel, les étoiles, la Lune et les immenses chênes de Bkassine. Je suis stressé à l’idée de partir et de commencer une nouvelle vie loin de mes parents, de mon chien et de ma voisine. Mon ordinateur sous mes mains, je m’apprête à écrire.

« Dans moins de vingt jours, je pars.

Je pars me trouver au-delà des rêves anéantis et brisés,

Au-delà des odeurs de kérosène brulé,

Au-delà des cœurs déçus et blessés,

Au-delà des nuits d’insomnie et de ces vides de pensée,

Au-delà des larmes, du désespoir et des fleurs fanées,

Au-delà des cendres, des ruines et des espoirs martyrisés.

J’irai vers l’autre bout du monde, du côté des Pyrénées,

J’irai crier, chanter, danser et globe-trotter,

J’irai écrire des histoires que je raconterai à travers les années,

J’irai faire le rossignol loin des constructions, loin des cités,

J’irai chercher les échos des montagnes et les fleuves sacrés,

J’irai planter mon haricot et vivre les histoires de fées.

Dans moins de vingt jours, je pars.

Mais si j’écris ce soir, c’est juste pour vous dire au revoir. »

Me voilà à la gare Paris-Montparnasse, j’attends mon train sur le quai et je repense à ce soir du 17 août. Ce soir où j’étais en train de rêver, sans aucune limite, de ce nouvel avenir qui m’attend à des milliers de kilomètres de chez moi. Ce soir où je m’imaginais un nouveau quotidien et des aventures à n’en plus finir. J’étais tellement fragile, mais je rêvais quand même de demain.

C’est mon quarante-cinquième et dernier jour du tour d’Europe centrale. J’ai vu les Alpes italiennes s’engloutir par les nuages du ciel, j’ai ouvert grande la bouche pour avaler le vent frappant de la côte adriatique en Slovénie, j’ai pissé dans des toilettes à la frontière hongroise, j’ai rincé ma gorge par des pintes de bière slovaque, j’ai chanté Layalil ounsi fi Vienna en plein centre-ville de Vienne, j’ai vu Prague de hauteur, j’ai appris à dire « Kocham cie » (Je t’aime, en polonais), j’ai mangé le meilleur taouk à Berlin, je me suis vanté d’être libanais dans les « coffee shops » à Amsterdam, j’ai discuté avec des locaux dans les brocantes de Bruxelles et là, je suis à Paris à penser à toute ma vie.

Je l’ai fait malgré ma peur, je suis parti chercher ailleurs. Pourquoi ? Parce que nous avons le droit de rêver sans même rien dans nos poches. Aujourd’hui, j’existe, j’avance dans mes objectifs, je m’ouvre à de nouvelles cultures, je deviens ce que j’avais toujours envie de devenir, mais je suis quand même loin de ma ville, il manque un sens à ma vie, et ce sens n’est autre que « le chemin vers Beyrouth ».

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

C’est le 17 août 2020. Sur la véranda de la maison à Jezzine, je regarde le ciel, les étoiles, la Lune et les immenses chênes de Bkassine. Je suis stressé à l’idée de partir et de commencer une nouvelle vie loin de mes parents, de mon chien et de ma voisine. Mon ordinateur sous mes mains, je m’apprête à écrire. « Dans moins de vingt jours, je pars.Je pars me trouver...

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C’est vrai le chemin de Beyrouth

Eleni Caridopoulou

20 h 49, le 17 juin 2022

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Commentaires (1)

  • C’est vrai le chemin de Beyrouth

    Eleni Caridopoulou

    20 h 49, le 17 juin 2022

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