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Société - Droits de l’homme

Prison de Khiam : des archives inédites révèlent le degré d’implication du Shin Beth

Pendant 15 ans, la geôle du Sud a été gérée par les services de renseignements israéliens, l’armée israélienne et l’Armée du Liban-Sud, détenant des prisonniers sur des périodes illimitées, sans procès, et parfois sans nourriture ni soins médicaux.

Prison de Khiam : des archives inédites révèlent le degré d’implication du Shin Beth

La cour intérieure de Khiam, le 24 mai 2000, un jour après la libération des prisonniers. Photo AFP

Un homme soupçonné d’être « connecté au Hezbollah » électrocuté aux doigts, une pénurie alimentaire qui laisse des dizaines de détenus sans manger, des prisonniers incarcérés en dehors de tout cadre procédural, sans jugement, sans limite de temps et sans ordre de détention... Des archives inédites déclassifiées cette semaine par le Shin Beth, les services de renseignements intérieurs israéliens, détaillent les méthodes de gestion et les conditions de vie de plusieurs centaines de prisonniers libanais et palestiniens détenus dans le centre de détention de Khiam. Supervisé par les Israéliens dans le sud du Liban de 1985 jusqu’en 2000, le lieu était réputé pour être une zone de non-droit évoluant en dehors de toute régulation internationale. Lors de la guerre de l’été 2006, des raids israéliens détruisent les bâtiments pénitentiaires et, avec eux, une partie de la mémoire collective du lieu et des preuves disponibles.

Pour mémoire

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Les révélations de cette semaine interviennent à la suite d’une pétition soumise par des militants israéliens auprès de la Haute Cour de justice afin de contraindre le Shin Beth à déclassifier ces informations. « La torture qui a eu lieu à Khiam s’apparente à un crime contre l’humanité », commente auprès de Haaretz l’avocat israélien en charge du dossier, Itay Mack. Les documents sont « choquants, mais ne représentent qu’un bref aperçu de l’enfer qui avait lieu là-bas », poursuit ce dernier qui affirme vouloir continuer la bataille en obtenant la publication de toutes les archives et la poursuite en justice des responsables.

Si la plupart des renseignements portant sur les conditions de détention étaient déjà connus, les rapports précisent le degré d’implication du Shin Beth et la nature hiérarchique de sa relation avec les alliés locaux de l’Armée du Liban-Sud (ALS). Selon un document datant de 1997 cité par le quotidien Haaretz, « la décision finale doit toujours revenir à nos forces », dans la mesure où les Libanais « ont leurs propres intérêts, qui ne sont pas toujours alignés avec les nôtres ». Le contenu confirme aussi que le Shin Beth était entièrement informé des dérives en cours à l’intérieur de Khiam, notamment des pratiques de torture parfois conduites par ses soins.

Surtout, les échanges indiquent l’existence d’un débat interne à l’intérieur des institutions israéliennes quant à la légalité de l’implication de l’armée israélienne, alors même que le pays s’était officiellement désengagé du Liban pour se replier dans le Sud autour d’une « zone de sécurité » dès 1985, année de construction de la prison.

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Selon une archive datant de 1996, les autorités reconnaissent ainsi l’existence d’un « problème diplomatique et légal » lié à la gestion d’un centre pénitencier sur le territoire libanais, à un moment où « le gouvernement israélien avait formellement déclaré son retrait de la région ». Une autre source indique que « l’activité au Liban n’est pas établie par la loi, et encore moins par le droit international ». Malgré des réticences au sommet, le procureur général Elyakim Rubinstein approuve en 1997 la demande conjointe de l’armée et du Shin Beth en vue de mener des interrogatoires, « sous certaines conditions », indique un document cité par le Haaretz.

Mais les révélations ne sont que la première étape d’un processus en cours. Alors que des poursuites judiciaires doivent s’ouvrir début avril, le Shin Beth a autorisé les médias israéliens à publier dès maintenant une partie du matériel, dont la majorité du contenu est toujours tenu secret.

Un homme soupçonné d’être « connecté au Hezbollah » électrocuté aux doigts, une pénurie alimentaire qui laisse des dizaines de détenus sans manger, des prisonniers incarcérés en dehors de tout cadre procédural, sans jugement, sans limite de temps et sans ordre de détention... Des archives inédites déclassifiées cette semaine par le Shin Beth, les services de...

commentaires (1)

On peut aimer l'état d'Israël ou non, force est de constater que la justice finit pas passer malgré et surtout contre toutes réticences des autorités. C'est précisément ce qui nous manque dans nos chers pays arabes "démocratiques". Il reste à espérer que cette justice passera pour dévoiler les violations des droits humains subis par la population palestinienne.

Joseph ADJADJ

00 h 40, le 24 mars 2022

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Commentaires (1)

  • On peut aimer l'état d'Israël ou non, force est de constater que la justice finit pas passer malgré et surtout contre toutes réticences des autorités. C'est précisément ce qui nous manque dans nos chers pays arabes "démocratiques". Il reste à espérer que cette justice passera pour dévoiler les violations des droits humains subis par la population palestinienne.

    Joseph ADJADJ

    00 h 40, le 24 mars 2022

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