"Nous sommes en enfer"; "Je n'ai plus rien à perdre"; "Descends dans la rue et défends tes droits" : des manifestants ont exprimé leur colère lundi dans la rue, dès 6h du matin, à travers le territoire libanais, afin de protester contre la détérioration de leurs conditions de vie alors que le pays n'en finit plus de s'enliser dans une crise socio-économique et financière meurtrière.
A Beyrouth, la circulation a été bloquée à Verdun, Corniche Mazraa, au niveau de la Cité sportive et de la place des Martyrs dans le centre-ville. Des dizaines de personnes présentes sur cette place centrale affirment être venues de tout le Liban pour exprimer leur "colère", rapporte notre journaliste Lyana Alameddine. "Nos salaires ne nous suffisent plus", déplore Ali Beydoun, un quadragénaire de Bent Jbeil, dans le Sud, alors que des chansons révolutionnaires résonnent en fond sonore.
Dans le Kesrouan, l'autoroute de Zouk-Jounieh a également été temporairement bloquée au niveau de Zouk Mosbeh à l'aide de voitures.
"Défends tes droits"
Au Liban-Nord, des protestataires ont coupé la route principale reliant Tripoli, Minié, Denniyé et le Akkar à l'aide de barricades et de camions, celle de Beddaoui avec des camions, et également l'entrée nord de Tripoli en face de l'hôtel de Palma. Les accès menant à la place al-Nour à Tripoli où se sont rassemblés des dizaines de manifestants ont également été bloqués, rapporte notre correspondant dans la région Michel Hallak. "Peuple libanais, descends dans la rue et défends tes droits", scandait un groupe de militants. "Nous appelons tous les habitants de Tripoli et le peuple libanais à descendre dans la rue", lançait notamment un homme, alors d'autres réclamaient "une révolution contre le président libanais, Michel Aoun", qui effectue lundi une visite officielle au Qatar pour l'ouverture de la Coupe arabe de football.
Un groupe de contestataires est entré de force, en début d'après-midi, dans le Sérail de Halba et écrit des slogans de la Thaoura sur les murs et les portes du bureau du mohafez de la région et du bâtiment. Les manifestants ont pénétré, par la suite, dans des bureaux de l'administration chargés de traiter les questions de soins de santé, afin de réclamer que des médicaments et du lait pour enfants leur soient assurés. Une brigade de la force anti-émeute est intervenue et a demandé aux contestataires de quitter le bâtiment.
Une trentaine de manifestants se sont également rassemblés, en début d'après-midi, près du domicile du Premier ministre, Nagib Mikati, à Tripoli.
"Nous sommes en enfer"
Dans le sud du Liban, des manifestants ont également coupé les routes au niveau de Saïda ainsi que les accès menant à diverses localités de la région, notamment à l'aide de bennes à ordures enflammées. Des protestataires se sont rassemblés également devant les bureaux des agents de change dans la rue des banques à Saïda et ont réclamé leur fermeture. L'armée était déployée en plusieurs points. "Nous sommes descendus pour protester contre la classe politique corrompue qui a volé les biens du peuple libanais, qui nous a fait sombrer dans la faim. Comme l'avait prédit le président de la République, nous sommes en enfer", a déploré un homme parmi les manifestants bloquant une route au niveau de Saïda. En septembre 2020, le chef de l'Etat libanais avait averti que le pays se dirigerait "vers l'enfer'' si un cabinet n'était pas formé. Bien qu'un gouvernement ait été mis en place par le Premier ministre, Nagib Mikati, le pays poursuit son effondrement pluridimensionnel.
"Personne ne compatit avec nous, alors que nous peinons à nous approvisionner en eau, en électricité, en carburant et en aliments. Ce qui représente nos droits les plus basiques", a encore regretté le manifestant, interrogé par notre correspondant Mountasser Abdallah. "Nous continuerons à nous révolter jusqu'à ce que nous obtenions nos droits", a-t-il ajouté. "Quelle honte, ils ont vendu la livre libanaise contre le dollar", lançaient d'autres manifestants, alors que la monnaie nationale a atteint, jeudi, un nouveau triste record, le billet vert s'échangeant contre plus de 25.000 LL.
"La classe politique dirigeante est corrompue. Vous avez vu ce qui s'est passé lors des élections syndicales de l'Ordre des avocats. Les partis politiques ont triché et remporté les élections", a lancé un autre manifestant, selon notre correspondant. "Je n'ai plus rien à perdre", déplorait pour sa part un père de famille, qui a confié à notre correspondant qu'il ne parvenait plus qu'à peine à subvenir aux besoins alimentaires de ses enfants.
Les appels à la mobilisation avaient été massivement partagés sur les réseaux sociaux depuis dimanche soir, sans que l'on ne sache vraiment l'identité des groupes qui les ont lancés. Suite à ces appels, le ministre de l'Education, Abbas Halabi, a laissé aux écoles la responsabilité de décider si elles voulaient ouvrir ou non leurs portes lundi matin. Selon nos correspondants, de nombreuses écoles de la Békaa et de Saïda sont restées fermées en ce début de semaine.
Qui est derrière les pneus brûlés ? On n’ entend pas le sud ( chiites ) faire une révolution, che strano , comme on dit en italien ……
16 h 53, le 29 novembre 2021