Le Premier ministre désigné libanais, Saad Hariri, le 14 février 2021. Photo d'archives AFP / HO / DALATI AND NOHRA
Le Premier ministre désigné, Saad Hariri, a affirmé qu'il ne comptait pas pour le moment se récuser de sa mission, soulignant qu'il accordait la priorité à la formation du gouvernement. Le chef du Courant du Futur a toutefois précisé que l'option de son retrait est "toujours sur la table".
Ces derniers jours, M. Hariri, empêtré dans un profond conflit politico-personnel avec le président de la République, Michel Aoun, et le gendre de ce dernier, Gebran Bassil, avait sérieusement envisagé de se récuser. Mais son allié chiite, le président du Parlement Nabih Berry, qui tente de sauver le processus à travers une proposition à 24 ministres sans tiers de blocage, semble l'avoir convaincu de rester en poste. Entre temps, le Liban, qui poursuit sa descente aux enfers sur le plan socio-éoconomique et politique, reste sans cabinet depuis août 2020.
"La récusation reste sur la table"
"La priorité est à la formation du gouvernement, avant la récusation", a déclaré M. Hariri au quotidien An-Nahar dans son édition de vendredi. Le PM désigné a toutefois précisé que l'option de la récusation "reste sur la table". "Il ne s'agit pas d'une fuite devant les responsabilités, mais d'une action nationale, surtout si cela (la récusation, NDLR) peut faciliter la formation d'un gouvernement qui œuvrerait à sauver le pays", a encore dit le Premier ministre désigné, estimant que "si la récusation a véritablement lieu, elle ne saurait être considérée comme une victoire d'un camp politique, à l'heure où le pays s'effondre".
Le président Aoun et son camp sont accusés par leurs détracteurs de vouloir se débarrasser de M. Hariri, avec qui ils s’écharpent autour de la nomination des ministres chrétiens et de la minorité de blocage. Face à Michel Aoun qui évoque ce qu'il appelle "son droit" à choisir ces ministres en l'absence (théorique) des formations chrétiennes majoritaires (les Forces libanaises et le CPL), M. Hariri, désigné en octobre dernier, est intraitable: selon lui, la Constitution confie au chef du gouvernement désigné de former son équipe en concertation avec le chef de l'Etat. Une position partagée par le président Berry qui a dernièrement eu un échange d'accusations acerbes avec le chef de l'Etat, par communiqués interposés.
Joumblatt pour un compromis
Le leader druze Walid Joumblatt, qui semble s'être rapproché ces derniers jours de MM. Berry et Hariri, a de son côté appelé à faire bouger le dossier et faire un compromis. "On ne peut pas continuer de la sorte avec cet attentisme adopté par certains dirigeants, alors que la situation du pays régresse chaque jour, en l'absence de gouvernement", a écrit le chef du Parti socialiste progressiste sur Twitter. "Il est temps que le compromis prime sur toute autre chose, loin des calculs personnels étroits", a estimé M. Joumblatt. "(...) Rappelez-vous que la rancune tue d'abord son maître", a conclu le chef du PSP.
Dans un entretien accordé jeudi soir à Russia Today, le directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, en visite à Moscou, a pour sa part déclaré concernant la formation du cabinet que "malheureusement", sur ce dossier, il n'y avait plus "aucune raison, sagesse ni conscience". Il a déploré que le dialogue entre les parties ne se fassent que "pour échanger des récriminations via les médias". "Il faut un gouvernement au Liban, quelle que soit sa forme, qu'il s'agisse d'un gouvernement de pôles politiques, de technocrates ou de mission", a-t-il exhorté. "Former le cabinet servira de fondations à partir desquelles nous pourrons résoudre tous les problèmes" du pays. Il a estimé que cette procédure doit toutefois passer par "un consensus entre toutes les parties politiques". Le responsable sécuritaire a encore souligné que "l'avenir du Liban est en jeu" et que cela nécessitait donc que "tout le monde multiplie ses efforts" pour parvenir à une solution. Répondant à une question concernant l'origine du blocage dans les tractations, Abbas Ibrahim a indiqué que cela était du au "manque de communication" des protagonistes entre eux. "Je suis convaincu que si tous les responsables libanais se réunissaient autour d'une même table, ils pourraient trouver des solutions", a-t-il déclaré.
Borrell à Beyrouth samedi
La communauté internationale observe, elle, de près les développements sur la scène locale. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, est attendu demain à Beyrouth pour une visite de 48 heures. Selon un communiqué de l’UE, "M. Borrell transmettra des messages-clés aux dirigeants libanais et exprimera la solidarité de l’UE avec le peuple libanais en ces temps extrêmement difficiles". Le 10 mai dernier, Josep Borrell avait annoncé lors d’une conférence de presse que l’UE préparait "des sanctions individuelles" contre les dirigeants politiques jugés responsables du blocage. Et le chef de la diplomatie française, Jean -Yves Le Drian, en visite à Beyrouth le 6 mai, avait au préalable informé ses interlocuteurs politiques que les débats se poursuivaient à Bruxelles autour d’un mécanisme européen de sanctions contre ceux qui bloquent le processus politique au Liban, alors que des mesures françaises avaient été prises contre ces mêmes personnes.
Dans ce contexte, le député français Gwendal Rouillard, dans une interview accordée à la chaîne américaine arabophone al-Hurra et qui sera publiée lundi, a affirmé jeudi soir que Paris a "commencé à sanctionner des personnalités libanaises à cause du blocage politique et de la corruption". Mais les autorités française se sont jusque-là abstenues de rendre publics les noms des responsables libanais sanctionnés.
Le Premier ministre désigné, Saad Hariri, a affirmé qu'il ne comptait pas pour le moment se récuser de sa mission, soulignant qu'il accordait la priorité à la formation du gouvernement. Le chef du Courant du Futur a toutefois précisé que l'option de son retrait est "toujours sur la table". Ces derniers jours, M. Hariri, empêtré dans un profond conflit politico-personnel avec le...
commentaires (9)
Il y a de la joie dans l'air c'est du mana pour les israéliens que le Liban s'enfonce ???
Eleni Caridopoulou
18 h 53, le 18 juin 2021