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Nos Lecteurs ont la Parole

Feuille de route pour sauver le Liban

Une constellation de singletons (en mathématiques, un singleton est un ensemble contenant un seul élément), de groupuscules, de groupes, de groupements (rassemblement de groupes), de toutes sortes et de tout acabit, a fini par brouiller la vision d’un changement absolument nécessaire pour opérer le sauvetage d’un Liban à la dérive.

Autant de programmes qui s’entrechoquent, se coupent et se recoupent. Un méli-mélo d’idées, d’approches, de polémiques. Des idées sensées, d’autres insensées. D’aucuns toujours stupéfaits des agissements d’une classe politique pourrie dont on cherche à prouver l’inanité, comme si l’on croyait toujours en elle ou au non-État qu’elle est supposée gérer.

Et puis, il y a les gens sincères. Les gens de bonne foi, de bonne pâte et de bonne volonté.

Mais il y a aussi les filous, les opportunistes, les intellos frustrés, les fortunés, les personnes à ego surgonflé, les « ôte-toi de là que je m’y mette ». Tous à la quête du pouvoir.

D’aucuns sont des nostalgiques du passé (les chantres droitiers d’un fédéralisme souvent suspect, ou les promoteurs d’une gauche désuète du changement de régime). D’autres sont des incultes qui croient tout savoir.

Nonobstant, il faut dire que j’ai totalement confiance dans le peuple libanais en révolte, même s’il n’investit plus en masse les rues et les places publiques. Je comprends son désarroi et sa déception de n’avoir pas pu avoir raison de cette classe politique voyou, incompétente et criminelle, à la tête de laquelle trône le Hezbollah. Cela ne pouvait pas être autrement : les conditions subjectives de la révolution sont depuis le 17 octobre 2019 écrasées par le poids de conditions objectives totalement défavorables.

De cet ersatz, il faut quand même tirer quelque chose de positif. Et c’est possible !

1) L’État libanais n’est pas seulement un État failli ou un État voyou : le Liban vit tout simplement une situation de non-État. Le pays est sous occupation iranienne via le Hezbollah qui est l’unique et réel détenteur du pouvoir avec à sa solde cette classe politique hideuse qui se contente des miettes d’un pouvoir pseudo étatique déliquescent. (voir mon article publié en date du 17 février 2021 avec pour titre « Les marionnettes et le marionnettiste »).

Conclusions : ridicules sont les gesticulations de certains pour être président d’une République qui n’existe plus, ou l’appétit d’autres pour être nommés chef d’un gouvernement dont la formation et les décisions sont aux seules mains du parti de Dieu, ou les rêves chimériques de certains de pouvoir opérer le changement démocratique via des élections législatives tenues sous la domination des armes illégales.

Pour ceux qui nagent dans les eaux visqueuses de la traîtrise ou de la soumission, cette quête pour le pouvoir me semble tout à fait dans l’ordre des choses.

Quant aux authentiques souverainistes qui prônent de bonne foi les élections, je les supplie de bien vouloir reconsidérer leur position pour moult raisons qu’il serait trop long d’expliciter dans cet article.

2) Le temps est à une action nationale en vue de sauver notre entité libanaise en perdition, de ressusciter notre État (tel qu’il est, dans un premier temps, avec sa Constitution, l’accord de Taëf, ses institutions), de recouvrer notre souveraineté à travers l’application des résolutions onusiennes. Toute action politique de la part des forces révolutionnaires pour gloutonner du pouvoir est à bannir car elle crée et exacerbe les contradictions au sein de leurs rangs et dévie le cours des évènements au profit des ennemis des Libanais.

3) Il faut prendre toute la mesure de la démesure du parti islamique. Il est la composante locomotive de l’armée de conquête de la République islamique d’Iran, la force al-Qods des pasdaran. De surcroît, son leader est le chef non déclaré de cette brigade après l’assassinat de Kassem Soleimani.

Contrairement aux souhaits béats de certains, Téhéran ne fera aucune concession concernant les armes du Hezbollah dans les négociations en vue du retour à l’application de l’accord nucléaire. Pourquoi ? Car il y va de la survie du régime iranien, étant donné que l’exportation de la révolution islamique constitue sa raison d’être.

4) Le peuple libanais affronte une hydre bicéphale : l’occupation iranienne et la classe politique. On ne peut affronter l’un en pactisant avec l’autre ou avec l’une des composantes de la classe politique. Il serait cependant de bonne politique de jouer tactiquement sur leurs contradictions ou de neutraliser telle ou telle composante ponctuellement. Le pire serait de ménager l’occupation sous n’importe quel prétexte.

5) Les entités authentiquement révolutionnaires devraient s’épurer des éléments des partis de la classe politique qui pratiquent l’entrisme en vue de les phagocyter et/ou de les discréditer aux yeux du peuple.

6) Ne jamais oublier que les trois composantes du monde de la corruption sont interliées : la classe politique en tête, l’État profond et la junte financière (gouvernorat de la BDL + les hauts responsables des banques).

Il faut se méfier de ceux qui s’attaquent exclusivement à la junte financière ou ceux qui la défendent sous prétexte de défendre le secteur bancaire.

Ne jamais oublier que la « somalisation » du Liban en cours conduira inéluctablement au renforcement du Hezbollah et par la suite augmentera son potentiel déstabilisateur dans la région, menaçant du fait même les intérêts des États de la région et du monde. Cette même « somalisation » réveillerait les cellules jihadistes dormantes dans les camps syriens et palestiniens et certains milieux libanais, et favoriserait leur immigration illégale vers l’Europe en particulier.

Le problème libanais n’est donc pas intrinsèquement libanais.

Le Liban est devenu une bombe à retardement pour la sécurité, la stabilité et la paix dans la région et dans le monde.

Une feuille de route pour le sauvetage du Liban serait du coup bénéfique pour la sécurité, la stabilité et la paix régionale et internationale.

Celle-ci pourrait se concrétiser par :

1) l’application d’une résolution du Conseil de sécurité plaçant les résolutions 1559, 1680 et 1701 sous le chapitre VII et élargissant les tâches de la Finul ;

2) une résolution plaçant le Liban sous tutelle internationale conformément aux chapitres 12 et 13 de la Charte des Nations unies ou via l’invocation des droits de l’homme pour faire face à un pouvoir criminel.

Ce n’est qu’après le nettoyage de toutes les institutions étatiques du clientélisme politique et de la corruption et l’assainissement de la situation au Liban dans le cadre de la tutelle internationale susmentionnée que les élections législatives pourraient se tenir conformément à une nouvelle loi électorale. Elles seraient suivies de l’élection présidentielle et de la formation d’un gouvernement qui ouvrirait la voie à la levée de la tutelle internationale et au redressement du Liban à tous les niveaux.

Résultat : regain de confiance du peuple libanais dans l’État libanais, ainsi que regain de confiance de la communauté internationale et arabe, et de la diaspora libanaise dans l’État libanais, ouvrant la voie à une reprise rapide du Liban économiquement, financièrement, socialement et culturellement…


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Une constellation de singletons (en mathématiques, un singleton est un ensemble contenant un seul élément), de groupuscules, de groupes, de groupements (rassemblement de groupes), de toutes sortes et de tout acabit, a fini par brouiller la vision d’un changement absolument nécessaire pour opérer le sauvetage d’un Liban à la dérive.Autant de programmes qui s’entrechoquent, se coupent...

commentaires (1)

..."la « somalisation » du Liban en cours conduira inéluctablement au renforcement du Hezbollah..."" sur que ca fait son affaire au hezb MAIS, MAIS MAIS mille fois MAIS, comment comprendre que aoun s'allie au hezb vu de ce danger qui nous guette qu'est devenu ineluctable? mais ( la somalisation du liban) ..."augmentera son potentiel déstabilisateur dans la région, menaçant du fait même les intérêts des États de la région et du monde..." est ce suffisant pour voir l'onu intervenir? lui serait il meme possible vu les interets contradictoires des GRANDS v. leur veto ?

Gaby SIOUFI

10 h 30, le 28 avril 2021

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Commentaires (1)

  • ..."la « somalisation » du Liban en cours conduira inéluctablement au renforcement du Hezbollah..."" sur que ca fait son affaire au hezb MAIS, MAIS MAIS mille fois MAIS, comment comprendre que aoun s'allie au hezb vu de ce danger qui nous guette qu'est devenu ineluctable? mais ( la somalisation du liban) ..."augmentera son potentiel déstabilisateur dans la région, menaçant du fait même les intérêts des États de la région et du monde..." est ce suffisant pour voir l'onu intervenir? lui serait il meme possible vu les interets contradictoires des GRANDS v. leur veto ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 30, le 28 avril 2021

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