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Nos Lecteurs ont la Parole

La « révolution libanaise » ne saurait tarder

La situation actuelle ne peut plus durer. Nous avons atteint le point de rupture sur tous les plans. Depuis un an et demi, l’hémorragie se poursuit et rien n’a changé. Face à cette situation, un changement se produira certainement dans un proche avenir. C’est la règle à laquelle on ne peut pas échapper. Tel est le cours de l’histoire, et les pays qui ont atteint un niveau d’effondrement plus grave que le nôtre ont vu leur système politique s’effondrer.

Il en résulte qu’il ne s’agit plus de changer un ministre ou un responsable mais plutôt de changer les trois pôles du pouvoir ainsi que les députés et d’organiser des élections... C’est ce qui se produisait à travers l’histoire lorsque les choses atteignaient un niveau d’effondrement plus grave que le nôtre.

Qui assurera la phase de transition ? L’armée ou la justice ?

Prenons l’exemple de l’Égypte après l’incendie du Caire. Un groupe de jeunes officiers s’est réuni et a décidé de placer sur le devant de la scène Mohammad Naguib, qui était général de division et avait cinquante ans… Il n’était pas commandant de l’armée. Ils l’ont chargé d’adresser un mot au peuple au cas où leur mouvement réussirait. Il devait demander au roi d’abdiquer. Ils avaient estimé que le taux de réussite de leur mouvement était de 10 % et son échec de 90 %. Et pourtant ils sont passés à l’acte.

Ainsi, les chars des jeunes officiers, dont le mouvement ne dépassait pas 10 % de l’armée, ont assiégé les palais royaux et se sont emparés de la station de radio.

Le général Mohammad Naguib a adressé au roi l’avertissement suivant :

« Du chef d’état-major Mohammad Naguib au nom des officiers et des hommes de l’armée au roi Farouk I :

Au vu de ce que le pays a souffert dans un passé récent, le vide total qui prévaut dans tous les domaines en raison de votre mauvaise gestion, de votre violation de la Constitution et de votre dédain pour les besoins du peuple, plus personne ne peut assurer ses moyens de subsistance. La réputation de l’Égypte dans le monde est trainée dans la boue par vos excès, la corruption que vous couvrez, les atteintes à la sécurité, la richesse excessive et de nombreuses extravagances aux dépens des gens affamés et pauvres. Vous l’avez manifesté pendant et après la guerre de Palestine dans les scandales des armes et votre ingérence ouverte dans les tribunaux pour essayer de falsifier les faits de l’affaire, ébranlant ainsi la foi en la justice.

Par conséquent, l’armée, représentant le pouvoir du peuple, m’a donné le pouvoir d’exiger que Votre Majesté abdique et livre le trône à Son Altesse le prince héritier Ahmad Fuad, à condition que cela soit réalisé à 12 heures aujourd’hui (samedi, 26 juillet 1952, le 4 de Zul Qa’ada, 1371), et que vous quittiez le pays avant 6 heures du soir du même jour. L’armée fait assumer à Votre Majesté la responsabilité de tout ce qui peut résulter de votre incapacité à abdiquer selon les souhaits du peuple.

Signé : Chef d’état-major Mohammad Naguib. »

Le roi Farouk a appelé immédiatement l’ambassadeur américain Jefferson Caffery et lui a demandé sa présence, invitant les États-Unis à intervenir et à faire pression sur l’armée anglaise qui était présente en Égypte pour réprimer le mouvement militaire. L’ambassadeur américain a entrepris des contacts et la décision des États-Unis était que la répression par l’armée britannique du petit mouvement consistant en quelques chars mais qui était soutenu par les gens qui sont descendus dans la rue pour le protéger conduirait à un massacre effrayant. Les États-Unis ont alors décidé de ne pas contacter la Grande-Bretagne. L’ambassadeur américain a informé le roi du refus d’intervenir. Le gouvernement était tombé quelques jours plus tôt, et Ali Maher avait formé un nouveau gouvernement qui n’a presque jamais vu le jour !

Le roi a négocié avec Ali Maher qui lui a conseillé d’accepter, et après cet échange, et alors que le temps passait, le roi Farouk a annoncé qu’il acceptait d’abdiquer et a demandé de voyager par mer sur le navire al-Mahroussa. Le juriste Abdul Razzaq al-Sanhouri a rédigé le texte selon lequel le roi accepte de s’exiler et d’abdiquer. À 18 heures précises, le roi Farouk et sa famille se trouvaient sur al-Mahroussa avec son entourage, composé entièrement de cuisiniers et autres serviteurs.

Le général Mohammad Naguib est monté à bord du navire pour dire adieu au roi et lui a présenté le salut militaire, puis il y a eu un silence effrayant... jusqu’à ce que Mohammad Naguib ose dire au roi exilé : « Je veux vous dire quelque chose... Lorsque les chars britanniques ont pris d’assaut votre palais le 4 février 1942, j’étais le seul officier à avoir présenté sa démission pour protester contre cette humiliation de l’indépendance et de la souveraineté du pays. Je l’ai fait au nom de toute l’armée et j’ai exprimé par mon action le sentiment de ces officiers qui ont aujourd’hui créé le mouvement. Et en cela il y a des preuves de la loyauté que nous, les hommes du mouvement, avions envers vous... Maintenant, les conditions ont évolué et nous, vos protecteurs, nous sommes transformés en révolutionnaires contre vous à la suite de vos actions et des actions de ceux qui vous entourent. »

L’effondrement qui s’est produit au Liban est semblable à l’effondrement qui s’était produit en Égypte lorsque Farouk a abdiqué. Ce qu’il fallait à l’époque, ce n’était pas l’abdication de Farouk, mais plutôt un abandon du pouvoir par toute la classe politique, le Premier ministre, les ministres, les chefs de l’armée, les hauts magistrats, le Parlement, etc.

Ce qu’il faut au Liban, c’est un nouveau système politique après l’effondrement et après l’explosion du port. Ce nouveau système éliminerait la corruption et l’effondrement. Au cours d’une période de transition de trois mois, un groupe de jeunes officiers et juges honorables géreraient fermement et résolument le pays pour assurer une bonne gouvernance et organiser des élections afin de produire un nouveau système.

Au Liban, nous avons besoin de cinq à dix ans pour abolir la mauvaise gouvernance et les détournements de fonds qui ont marqué la période post-Taëf, en particulier ces cinq dernières années. Ce n’est pas de la spéculation ni de l’analyse. C’est plutôt le chemin naturel que suivent les pays lorsqu’ils atteignent la décadence dans laquelle nous nous trouvons. Il n’existe plus qu’un semblant d’État, tout le reste est de la comédie.

En Égypte, l’incendie du Caire était l’étincelle, de la même manière que l’explosion du port de Beyrouth a été un détonateur.

Le système post-Taëf, dont rien n’a été mis en œuvre, est terminé et enterré… Maintenant, nous devons élaborer un nouveau Taëf et élire une nouvelle classe politique formée de jeunes, intègres et compétents.

Nous avons pris la révolution égyptienne comme modèle, et on peut dire que toutes les révolutions traversent les mêmes étapes : « Un climat de révolution » puis « l’événement révolutionnaire » et ensuite « l’acte de révolution par l’explosion ». Cela s’est produit lors de la révolution égyptienne, la Révolution française, la révolution espagnole, puis la révolution américaine, et cela se passe dans le cadre de la révolution libanaise. Le « climat de révolution » est l’état de souffrance, d’anxiété et de manque de confiance, au cours duquel le changement devient une exigence dont l’urgence augmente chaque jour. S’ajoutent à cela la colère et la provocation. Quant à l’étape de « L’événement révolutionnaire », c’est le moment où se produit « l’explosion », comme cela s’est produit le 17 octobre et comme cela va se produire dans les jours à venir. Et « l’acte de révolution », c’est quand ce qui est ancien est démoli et l’alternative est soulevée lors de l’explosion. C’est ce qui va arriver dans les jours à venir de la révolution libanaise…

Avocat

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La situation actuelle ne peut plus durer. Nous avons atteint le point de rupture sur tous les plans. Depuis un an et demi, l’hémorragie se poursuit et rien n’a changé. Face à cette situation, un changement se produira certainement dans un proche avenir. C’est la règle à laquelle on ne peut pas échapper. Tel est le cours de l’histoire, et les pays qui ont atteint un niveau...

commentaires (1)

..."""Qui assurera la phase de transition ? L’armée ou la justice..."" grace a ghada aoun aucune option ,il va de soit que ce serait a l'armee de le faire. ainsi encore une voix -` et pas des moindres-qui verse dans le sens de elie ferzli et le mien ( oui n'en soyez pas surpris... ++ qqs emojis ironiques en acompte). pas de facherie svp: egypte-liban 70 ans d'intervalle, meme scenario, differents acteurs- TRES MAUVAIS acteurs bien sur.

Gaby SIOUFI

10 h 56, le 23 avril 2021

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Commentaires (1)

  • ..."""Qui assurera la phase de transition ? L’armée ou la justice..."" grace a ghada aoun aucune option ,il va de soit que ce serait a l'armee de le faire. ainsi encore une voix -` et pas des moindres-qui verse dans le sens de elie ferzli et le mien ( oui n'en soyez pas surpris... ++ qqs emojis ironiques en acompte). pas de facherie svp: egypte-liban 70 ans d'intervalle, meme scenario, differents acteurs- TRES MAUVAIS acteurs bien sur.

    Gaby SIOUFI

    10 h 56, le 23 avril 2021

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