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Société - Éducation

Le retour sur les bancs de l’école salué par certains, décrié par d’autres

Le retour sur les bancs de l’école salué par certains, décrié par d’autres

La reprise des cours en présentiel, une décision controversée. Ici, au collège du Sacré-Cœur – Gemmayzé. Photo d’archives Marc Fayad

« Je panique à l’idée d’envoyer mon fils à l’école. Il pourrait rapporter le virus, nous contaminer et contaminer ses grands-parents. » Au lendemain de la décision du ministre sortant de l’Éducation, Tarek Majzoub, de reprendre l’enseignement hybride (en présentiel et à distance) et de rouvrir les écoles sur trois étapes dès le 21 avril, Vico, comme tant d’autres mères, pousse les hauts cris. « C’est une mauvaise décision. Les enfants se regroupent malgré toutes les tentatives de leur faire appliquer les gestes barrières », s’inquiète-t-elle. En même temps, elle ne peut que se plier à la décision officielle. « Mon fils est en troisième et doit présenter son brevet. Si je refuse de l’envoyer en classe, il risque de perdre son année », craint-elle. Car les épreuves officielles sont maintenues, comme l’a promis le ministre. Celles du brevet se dérouleront pour les élèves dans leur établissement scolaire. Celles du bac auront lieu le 26 juillet dans les établissements publics agréés par le ministère. La décision du ministre Majzoub sera effective dès le 21 avril pour les classes terminales. Suivront dans une deuxième étape les élèves de troisième, le 5 mai, et enfin, à partir du 17 mai, les classes de seconde et première, de cinquième et quatrième, les petites et grandes sections de maternelle. Le Liban figure parmi les rares pays à n’avoir pas ouvert ses écoles, ou juste quelques semaines, en temps de pandémie de Covid-19. Mais en l’absence d’une stratégie éducative claire face à la crise sanitaire, cette décision reçoit aujourd’hui un accueil mitigé. D’autant qu’à l’issue du confinement, le nombre quotidien de contaminations (2 000 environ) et de décès (45 environ) n’a pas drastiquement chuté. La mesure est donc applaudie par certains, convaincus de la nécessité de sauver l’enseignement au Liban. Mais rejetée par d’autres, car l’école publique et un nombre important d’écoles privées de petite importance n’ont pas réussi à faire respecter les gestes barrières lors des deux ou trois semaines d’enseignement en présentiel, à la rentrée d’octobre. Sans oublier celles qui pèsent le pour et le contre.

La majorité des enseignants toujours pas vaccinés

Caline, élève de terminale dans une école privée, ne cache pas sa peur. « C’est inquiétant, nous pourrions attraper le virus », confie-t-elle. La jeune fille se dit toutefois « contente de profiter de quelques mois d’école » avant la fin de sa scolarité. Au sein de son établissement d’excellence, « la vigilance est de rigueur » et « les mesures barrières parfaitement bien respectées », selon elle. « Décision complètement irresponsable, renchérit Zeina, enseignante dans deux établissements huppés de la capitale. Les trois quarts des enseignants ne sont toujours pas vaccinés. » Et ils craignent de contracter le coronavirus et de le passer à des proches. « Autour de nous, tant de gens sont morts », regrette-t-elle. L’un des arguments majeurs des personnes réfractaires à l’ouverture des écoles est que l’année scolaire tire à sa fin. « Ça ne vaut plus la peine », dit Zeina.

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« La majorité des parents d’élèves sont contre le retour en classe », observe Lama Tawil, présidente de l’Union des parents d’élèves et des comités de parents des écoles privées du Liban. « Nous ne constatons aucune évolution positive de la crise sanitaire et ne comprenons pas cette décision arbitraire, alors que seulement un millier d’enseignants sont vaccinés », ajoute-t-elle. Et puis les écoles privées ont quasiment bouclé leur programme. « Va-t-on punir les élèves des établissements qui ont relevé le défi de l’enseignement en ligne et prolonger l’année scolaire uniquement parce que d’autres écoles en ont été incapables ? » demande de son côté Maya Geara, présidente du comité de parents d’élèves au collège Saint-Grégoire, qui appelle par la même occasion à « l’annulation exceptionnelle du brevet ». À travers ces arguments, se dessine la crainte de voir l’année scolaire inutilement rallongée, alors qu’élèves et enseignants présentent des signes d’épuisement. « Mes enfants ne supporteraient pas de devoir travailler jusqu’en juillet. Ils se sont donnés à fond durant toute l’année. Leur santé mentale est en jeu », avoue ainsi une mère inquiète.

Dans le privé, des programmes bouclés

C’est dans ce cadre que le secrétaire général des écoles catholiques, le père Boutros Azar, également coordonnateur de la Fédération des associations éducatives privées, se « donne le temps de comprendre » les directives du ministre sortant de l’Éducation et d’y répondre par un communiqué. S’il salue « le choix laissé aux parents, aux enseignants et aux directions », il estime que certains points ne sont pas clairs, surtout ceux concernant l’épreuve du brevet et la stratégie officielle du ministère. « Il est évident que l’éducation doit être prioritaire. Il faut aussi faire preuve d’équité envers le secteur privé », souligne-t-il. Si l’école publique, qui n’a pas été capable d’assurer l’enseignement à distance, réclame aujourd’hui une prolongation de l’année scolaire, l’école privée estime avoir « accompli sa mission » et entend « clôturer son année en juin au plus tard ».

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Sauf que la décision du ministre peut prêter à interprétation. « Un retour à l’enseignement hybride est une très bonne chose pour nous permettre d’évaluer la qualité de l’apprentissage en ligne », précise le directeur du collège Notre-Dame de Jamhour, le père Charbel Batour. « En revanche, rien ne nous oblige à prolonger l’année scolaire au-delà du mois de juin, car nous avons respecté nos échéances et bouclé nos programmes. Et puis, le ministre de l’Éducation s’est contenté de définir des dates d’examens », assure-t-il. Des examens qui ne pourront se dérouler qu’en présentiel, car pour l’instant, l’évaluation à distance n’a toujours pas fait ses preuves.

« Je panique à l’idée d’envoyer mon fils à l’école. Il pourrait rapporter le virus, nous contaminer et contaminer ses grands-parents. » Au lendemain de la décision du ministre sortant de l’Éducation, Tarek Majzoub, de reprendre l’enseignement hybride (en présentiel et à distance) et de rouvrir les écoles sur trois étapes dès le 21 avril, Vico, comme tant...

commentaires (4)

Dans presque tout les pays les écoles étaient ouvertes alors que tout le reste était fermé Au Liban ils ferment les écoles en premier et ouvrent les bars, restos et fumoir ça donne une idée du niveau de compétence. L'éducation était avec le secteur financier un des fleurons de notre pays, les 2 ont été pour des raisons diverses ravagés ces 2 dernières années..comme si le but était vraiment de couler le pays et remplacer les têtes pensantes par des têtes soumises

Liban Libre

20 h 13, le 17 avril 2021

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Commentaires (4)

  • Dans presque tout les pays les écoles étaient ouvertes alors que tout le reste était fermé Au Liban ils ferment les écoles en premier et ouvrent les bars, restos et fumoir ça donne une idée du niveau de compétence. L'éducation était avec le secteur financier un des fleurons de notre pays, les 2 ont été pour des raisons diverses ravagés ces 2 dernières années..comme si le but était vraiment de couler le pays et remplacer les têtes pensantes par des têtes soumises

    Liban Libre

    20 h 13, le 17 avril 2021

  • Les élèves qui ont pu suivre un enseignement en ligne étaient plus favorisés que les autres : il faudrait avoir un ordinateur personnel, pas un ordinateur partagé avec les parents et la fratrie. Et on sait que quelque performant que soit l'enseignement en ligne, il ne sera jamais équivalent à l'enseignement en "présentiel". Bien sûr il faudrait de la cohérence : la situation s'est-elle vraiment améliorée? Et les enseignants, s'ils retournent à l'école, vont-ils devoir continuer l'enseignement en ligne pour les absents? Dans ce cas, ne doit-on pas leur payer des heures supplémentaires? Et quid de la vaccination des enseignants et des élèves? Dans d'autres pays également touchés, l'école ne s'est jamais arrêtée, mais il faut savoir que des professeurs et des élèves sont tombés malades et que dans toutes les classes, il y avait des élèves ou des professeurs en quarantaine. Aucune solution n'est satisfaisante.

    Politiquement incorrect(e)

    19 h 13, le 17 avril 2021

  • Cette décision a été prise par les mêmes lumières qui ont autorisé les gens à festoyer ensemble à Noël - Nouvel An? Et que diront-ils lors de la prochaine vague de contaminations? Oups?... Voilà une décision que notre bloqueur en chef pourrait bloquer. Mais non, gendrillon n’en bénificiera pas, alors on peut oublier...

    Gros Gnon

    18 h 51, le 17 avril 2021

  • Qu'est-ce qu'il a découvert le ministre de l'éducation nationale, pour hâter la reprise ? Il faut être très méfiant devant l'apparition de mutants du virus qui résistent aux vaccins, et attaquent déjà les jeunes, qui commencent à peupler les hôpitaux des pays et les lits de soins intensifs.

    Esber

    17 h 54, le 17 avril 2021

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