Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a déclaré dimanche que le processus de formation du futur gouvernement était notamment entravé par les tentatives de certaines parties "d'offrir des compensations" au leader du courant aouniste Gebran Bassil, après les sanctions lancées à son encontre par Washington. Il a encore accusé l'"axe de la résistance", à savoir le tandem Hezbollah-mouvement Amal, de ne pas s'intéresser du tout à résoudre la crise économique et financière dans le pays, mais de se focaliser uniquement sur leur "bras de fer" avec les Etats-Unis.
"La situation actuelle me fait penser à la guerre libanaise (1975-1990), sauf que cette dernière se faisait à coups de balles et de missiles tandis qu'aujourd'hui, elle se fait avec l'économie et les finances", a déclaré Samir Geagea, qui recevait à Meerab une délégation de médecins affiliés à son parti. "Les alliés de l'axe de la résistance ont un plan sérieux pour prendre le contrôle du Liban", a-t-il déploré. Il a dans ce cadre évoqué le fait que le tandem chiite, Amal et Hezbollah, réclame le ministère des Finances dans le futur gouvernement, que le Premier ministre désigné Saad Hariri s'efforce de former depuis trois semaines. Il a encore estimé que la formation du gouvernement "n'est pas importante pour l'axe de la résistance". "Tout ce qui leur importe, c'est que cet axe progresse, en protégeant ses alliés, même s'ils sont corrompus et détruisent le pays". Le chef des FL a d'ailleurs estimé que, dans cet esprit, certains partis tentent d'"offrir des compensations" au leader aouniste Gebran Bassil, suite aux sanctions à son encontre il y a deux semaines, "en lui permettant d'obtenir certains acquis dans la formation du cabinet, ce qui entrave cette formation". Il a déploré le fait que, plus de vingt jours après la désignation de Saad Hariri pour former le cabinet, aucune avancée n'a été enregistrée.
Le chef du CPL a été sanctionné par Washington sur base de la Loi Magnitsky pour corruption, abus de pouvoir, et pour ses liens avec le Hezbollah.
"Bras de fer"
Le leader maronite a souligné que Patrick Durel, l'émissaire du président français Emmanuel Macron qui a effectué en fin de semaine une tournée auprès des responsables libanais, était venu pour dire que soit les autorités libanaises "mettent sur pied un cabinet, soit tout ce qu'ils espéraient recevoir de la Cedre (conférence de soutien au Liban qui s'était tenue à Paris en 2018), en termes d'aides des pays amis et du Fonds monétaire international, se volatiliserait". "Mais si tout ce qu'il s'est passé" ces derniers mois avec la crise économique et financière "n'a eu aucun impact, comment cet avertissement pourrait-il influencer" la situation politique ?, s'est encore interrogé M. Geagea. Et d'accuser les dirigeants de vouloir former une équipe ministérielle "qui ressemble exactement aux précédentes, comme si tout allait bien". "Saad Hariri essaie seul d'améliorer la forme du prochain gouvernement, mais les autres parties n'ont qu'un centre d'intérêt, leur bras de fer avec les Etats-Unis".
La visite de l'émissaire français a eu lieu alors que le second délai accordé par le chef de l'Etat français aux responsables libanais pour la formation d'un "gouvernement de mission", prévu dans la feuille de route annoncée à Beyrouth le 1er septembre par M. Macron pour aider le pays à sortir de la crise, a expiré et que les tractations gouvernementales s'enlisent. Le pays du Cèdre est dirigé par le gouvernement chargé de l'expédition des affaires courantes de Hassane Diab depuis la démission de ce dernier en août, suite à la double explosion du port de Beyrouth.
Samir Geagea a encore souligné que sa formation a pris ses distances par rapport à la classe dirigeante parce que la plupart des formations qui la constituent "ne sont intéressées que par le projet de la résistance et les autres, qui se sont partagé le gâteau, ne s'intéressent qu'au pouvoir".
"Faire tomber le Grand-Liban"
De son côté, le patriarche maronite Béchara Raï a accusé les responsables politiques qui "entravent" la formation du gouvernement de vouloir "faire tomber le Grand-Liban et mettre la main sur ce qu'il en reste". Dans son homélie dominicale, le dignitaire a estimé que seul un gouvernement entièrement composé de personnalités indépendantes des partis traditionnels pouvait sortir le pays de la crise actuell
"Devant le mépris des responsables face aux cris du peuple affamé, devant les plaies de Beyrouth, sinistrée par l'explosion de son port sans que l'État ne réagisse, devant l'urgence de la formation d'un nouveau gouvernement, nous sommes obligés de poser les questions cruciales", a déclaré le patriarche au cours de son homélie dominicale à Bkerké. "Les entraves persistantes à la formation du cabinet et le mépris pour les intérêts du peuple et de la nation font-ils partie d'un projet visant à faire tomber le Grand-Liban et à mettre la main sur ce qu'il en reste ?", s'est dès lors interrogé le dignitaire religieux. "Nous ne parvenons pas à voir un autre objectif à ces entraves politiques et à l'effondrement programmé des finances et du secteur bancaire ainsi que l'appauvrissement du peuple", a-t-il ajouté. S'adressant aux "saboteurs persistants provenant de différentes formations politiques" qu'il n'a pas nommées, le patriarche maronite les a pris à partie : "Ne voulez-vous pas un État civil séparé de la religion, un État pluraliste avec plusieurs religions et cultures, comme l'avait souhaité le patriarche Élias Hoyek ?", "Ne voulez-vous pas un État neutre et souverain, qui se défend avec ses propres forces face aux attaques extérieures ?".
commentaires (8)
en tous cas, PERSONNE ne peut nier que s Geagea avait decrit/predit en peu de mots ce qui adviendrait de la formation du cabinet hariri & du gouv lui-meme par la suite : ps. j'evite trouver un qualificatif descriptif . M. Geagea avait assez bien decrit la chose
Gaby SIOUFI
10 h 37, le 16 novembre 2020