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Nos Lecteurs ont la Parole

Un rêve tchèque et slovaque ?

La couleur de notre peau et notre lieu de naissance sont bien les deux seules choses que nous ne pourrons jamais changer.

Tout le Proche-Orient est constitué de peuples antiques dans des frontières en plastic. Le Liban est né grâce à l’opiniâtreté de maronites qui ont su fédérer autour d’eux les autres confessions du pays. Tous les peuples anciennement ottomans avaient chacun son projet national : les Arméniens, les syriaques, les grecs-orthodoxes, les Kurdes, les Juifs, les Arabes. Seuls les Libanais et les Juifs ont vu leur rêve se concrétiser.

L’allégeance au Liban comme patrie a été ambivalente, particulièrement pour les musulmans qui sont passés de « sujets » de l’immense Empire ottoman à « citoyens » du si petit Liban. D’où leur adhésion, avec certains chrétiens, à tous les projets extranationaux promus par des démiurges régionaux : Nasser, Arafat, Assad, Khomeyni, les Saoud. À chaque fois, cette sujétion à une volonté extérieure a porté malheur à ceux qui la promouvaient tout comme aux autres Libanais. Que reste-t-il du nassérisme, de l’OLP, de la Syrie des Assad, des Saoud et enfin des mollahs de Téhéran ? Que nous ont-ils apporté ?

Depuis la Première Guerre mondiale à nos jours, la cohabitation entre musulmans et non-musulmans dans le monde a été problématique et s’est toujours terminée par une séparation ou une partition sanglante, sauf au Liban. Les Ottomans ont exterminé trois peuples chrétiens, les musulmans en Inde ont refusé le projet de Gandhi d’un pays unique et ont créé le Pakistan. Les Juifs et les Palestiniens n’ont pas réussi à s’entendre en Palestine. Les Grecs et les Turcs se sont séparés à Chypre, tout comme les Arméniens et les Azéris au Haut-Karabakh et les chrétiens et les musulmans au Soudan. Les Yougoslaves enfin se sont divisés en sept entités. Si les Libanais ont choisi de coexister dans le même État malgré les multiples guerres qui ont ravagé leur pays, c’est bien parce qu’ils sont arrivés à une forme unique au monde « d’intelligence des différences ».

Certes, le confessionnalisme raisonné de Béchara el-Khoury et Riad el-Solh a été perverti. Il faut donc le réinventer. Pourquoi ne pas s’appuyer sur le respect qu’ils avaient des réalités et des sensibilités pour créer un nouveau système séculaire garant des besoins de chaque partie, et qui permette enfin à tous les Libanais d’accepter ce pays comme « patrie définitive » ? Pour cela, il faudra procéder au désarmement du Hezbollah et proclamer la neutralité totale du Liban, neutralité garantie par l’ONU et acceptée par les principaux acteurs régionaux incluant la Syrie et Israël. Mais cette neutralité ne pourra devenir efficiente que si elle est l’expression de la volonté unanime de tous les Libanais. Il leur faudra abandonner toutes les utopies, si belles soient-elles à leurs yeux, telles que l’arabité, l’islamité, la chiité, pour se consacrer à la reconstruction d’un État digne de ce nom. Faute de quoi, nous serons éternellement divisés, en proie aux ambitions des puissances régionales et mondiales.

Si une partie des Libanais refusait cette perspective de la neutralité, pourquoi alors ne pas envisager la séparation « à l’amiable » comme les Tchèques et les Slovaques ? Que préférerions-nous, vivre séparés, chacun dans son État mais en paix, ou vivre dans le même État tout en étant éternellement en guerre ? Car toutes nos guerres ne sont finalement que le résultat de nos propres manquements, bassesses et turpitudes. Nul ne nous oblige à nous dresser les uns contre les autres, sinon nous-mêmes. Cessons de rejeter la faute sur les « ennemis » et regardons la poutre qui est dans notre œil.

Notre destin est entre nos mains : soit l’exil massif des chrétiens et l’hégémonie du Hezbollah sur tout le Liban, soit la création de deux Liban, l’un chrétien et l’autre musulman, soit enfin la négociation d’un nouveau pacte basé sur la neutralité, la justice et la parité entre chrétiens et musulmans.

Ainsi, peut-être, pourrions-nous obtenir le pardon de nos morts et la reconnaissance des générations futures.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

La couleur de notre peau et notre lieu de naissance sont bien les deux seules choses que nous ne pourrons jamais changer. Tout le Proche-Orient est constitué de peuples antiques dans des frontières en plastic. Le Liban est né grâce à l’opiniâtreté de maronites qui ont su fédérer autour d’eux les autres confessions du pays. Tous les peuples anciennement ottomans avaient chacun son...

commentaires (1)

encore un essai afin de parvenir a une solution a l'amiable ! TRES BEAU, TROP BEAU DIRAIENT ON ! sauf qu'il y a la un facteur ESSENTIEL omis dans cet essai : le peuple slovaque ? un peuple civilise !

Gaby SIOUFI

14 h 06, le 18 août 2020

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Commentaires (1)

  • encore un essai afin de parvenir a une solution a l'amiable ! TRES BEAU, TROP BEAU DIRAIENT ON ! sauf qu'il y a la un facteur ESSENTIEL omis dans cet essai : le peuple slovaque ? un peuple civilise !

    Gaby SIOUFI

    14 h 06, le 18 août 2020

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