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Culture - Entretien

« J’ai beaucoup de tendresse pour mon personnage »

Yuriy Zavalnyouk, qui joue le personnage d’Amé, partage avec « L’OLJ » ses impressions après la première représentation de « Littoral », de Wajdi Mouawad, qui a été mise en scène juste après le confinement dans des conditions inhabituelles.

« J’ai beaucoup de tendresse pour mon personnage »

Yuriy Zavalnyouk. Photo DR

Depuis combien de temps connaissez-vous Wajdi Mouawad ?

Je l’ai rencontré en 2015 lorsque j’étais en 3e année au Conservatoire national supérieur d’art dramatique, dans le cadre d’un atelier de recherche, « Défenestrations », dont découlera Notre innocence au printemps 2018. On devait reprendre ce spectacle avant le confinement, mais tout a été annulé.

Le 18 mai, Wajdi nous a proposé de revenir au théâtre, puisque nous sommes des comédiens sous contrat, et nous avons échangé autour de notre expérience du confinement. On a commencé par reprendre le chœur de Notre Innocence, où, pendant quarante minutes, on parle tous ensemble : 18 comédiens face au public, et les mêmes paroles, les mêmes respirations, les mêmes silences. On a pensé qu’on pourrait le représenter partout, même dans la rue, mais en travaillant le texte, on s’est rendu compte qu’il ne nous allait plus. Alors on a décidé de monter Littoral. Nous sommes seize et avons organisé deux distributions : nous jouons sur deux horaires, 15h et 20h30.

Comment avez-vous préparé la mise en scène de « Littoral » dans un délai aussi court ?

Nous avons commencé les répétitions le 29 mai, et c’était très intense. En une journée, on faisait le travail d’une semaine. Wajdi a repris la même mise en scène qu’en 1997 et on a foncé avec lui ! Je suis très attaché à lui en tant que metteur en scène. Ce qui compte pour lui, c’est que le théâtre raconte une histoire. Il veut que les comédiens soient bouleversés et il s’arrange pour nous mettre dans des situations qui nous touchent personnellement.

Il est très humble, mais aussi très énergique. Pendant les répétitions, il était comme un enfant qui jouait avec nous : nous écoutions et nous faisions ce qu’il disait.

Bien sûr, nous avons respecté le protocole sanitaire. Les premières semaines, nous avons répété avec des masques en respectant le mètre de distance, c’était compliqué de jouer tous ensemble. Il faut être très vigilant, au cas où l’un de nous tomberait malade.

Cela a été très étrange au départ, il a fallu réapprendre à travailler, mais là, on est reparti, surtout depuis le 7 juillet, où nous avons retrouvé notre public !

Qu’est-ce qui vous plaît dans l’histoire de cette pièce ?

J’aime le fait que c’est l’histoire d’un groupe. Il y a très peu d’objets sur scène, trois chaises, deux balais, un seau… L’histoire se construit essentiellement avec les comédiens et on s’amuse beaucoup entre nous. On se connaît très bien, on explore notre rapport à la mort ensemble et on se pose la question de savoir comment l’appréhender en tant que groupe. Au moment où nous devons laver le corps du père, qui représente le parent disparu pour chacun d’entre nous, l’atmosphère est électrique, et même si je sais qu’il ne s’agit pas de mon père, quelque chose de très profond surgit en moi et j’ai l’impression que je vis vraiment ce moment, c’est très émouvant.

J’ai aussi beaucoup de tendresse pour mon personnage, c’est un révolté, une petite brute. Je viens d’une famille de militaires et je suis familier du rapport qu’on peut avoir avec l’armée. Je le trouve naïf et en même temps, cela me plaît d’explorer sa violence sanguinaire.

Comment la pièce résonne-t-elle avec la situation actuelle selon vous ?

Le fait que la jeunesse ait dû s’arrêter de vivre pour préserver la vieillesse m’a marqué. On n’a pas le recul pour analyser l’effet que cela a produit sur toute une génération. La situation est très similaire dans Littoral : tant que Wilfrid n’a pas enterré son père, sa vie est bouleversée et il se demande comment inhumer son père pour ne plus vivre avec un mort.

Dès la première représentation de la pièce, on a senti un public très joyeux, il y avait une forme de fébrilité dans la salle. Les spectateurs étaient très réactifs et ils ont beaucoup réagi, surtout aux passages humoristiques ; on sent qu’ils sont heureux de retrouver le théâtre !


Depuis combien de temps connaissez-vous Wajdi Mouawad ? Je l’ai rencontré en 2015 lorsque j’étais en 3e année au Conservatoire national supérieur d’art dramatique, dans le cadre d’un atelier de recherche, « Défenestrations », dont découlera Notre innocence au printemps 2018. On devait reprendre ce spectacle avant le confinement, mais tout a été annulé.Le 18 mai,...

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