La Banque du Liban (BDL) a annoncé dans un bref communiqué jeudi qu’elle allait prendre à partir du 27 mai, soit mercredi prochain, "les mesures nécessaires pour protéger la livre libanaise", dont la valeur s’est effondrée ces derniers mois par rapport au dollar dans les bureaux de change, alors que le pays continue de s’enfoncer dans la pire crise économique et financière de ces trente dernières années. En guise de seule précision, la Banque centrale a promis qu’elle allait notamment fournir des dollars pour financer les importations de "produits alimentaires de base" à travers une procédure qui sera détaillée dans une circulaire à venir "en coordination avec le ministre de l’Économie et du Commerce. Elle a enfin indiqué que les banques pouvaient elles aussi "contribuer à ces opérations" en coordination avec elle, sans plus de précisions.
La mesure annoncée par la BDL concernant les importations de produits alimentaires de base a été également confirmée dans la matinée par le ministre de l’Économie et du Commerce, Raoul Nehmé, lors d’une conférence de presse au ministère consacrée au secteur des assurances. Le haut-responsable a évoqué un dispositif mis en place la semaine prochaine pour assurer des dollars à un taux livre/dollar que la BDL fixera, mais qui devrait en principe être bien inférieur à celui pratiqué sur le marché secondaire, où il flottait encore entre 4 100 et 4 200 livres mercredi matin, un niveau similaire à celui communiqué mardi en fin de journée par plusieurs sources contactées par L’Orient-Le Jour.
Le Premier ministre Hassane Diab a également assuré, dans son discours prononcé au Grand sérail à l’occasion des 100 jours passés depuis la prise de fonctions par son gouvernement, que le gouverneur de la BDL lui avait "promis" d’intervenir sur le marché pour protéger la livre libanaise et freiner la hausse du taux de change du dollar. Des propos qui contrastent avec ceux tenus par le chef du gouvernement en avril, où il avait accusé le gouverneur de ne pas coopérer avec l’exécutif avant de prendre des décisions de politique monétaire. Hassane Diab était intervenu peu après la publication d’une série de circulaires permettant aux déposants de retirer tout ou partie de leurs fonds dans les banques libanaises à un taux proche du marché plutôt qu’à la parité officielle de 1 507,5 L.L. pour un dollar. La livre avait alors commencé à décrocher de façon plus brutale que lors des précédents mois, passant notamment le seuil symbolique des 3 000 livres pour un dollar qui n’avait pas été atteint depuis les années 1990. Enfin, hasard du calendrier, l’annonce de la BDL survient au lendemain d’une réunion inattendue entre le gouverneur de la Banque centrale et le président du Parlement, Nabih Berry, à Aïn el-Tiné, où les deux hommes ont évoqué l’avancée des discussions entre les négociateurs nommés par l’Exécutif et les responsables du Fonds monétaire international, à qui l’Etat libanais - en défaut de paiement de sa dette publique - a demandé une aide financière au début du mois.
La création d'un dispositif pour permettre aux importateurs d’acheter des dollars contre des livres libanaises à un taux moins élevé avait notamment été évoquée le 11 mai par le président du syndicat des commerçants de Baalbeck, Hussein Awada, en marge d’une visite dans le caza de la Békaa par Mazen Hamdane, le directeur des opérations monétaires de la BDL. Le commerçant avait précisé que la BDL envisageait de fixer le taux livre/dollar en vigueur pour ces opérations à un niveau proche de celui imposé aux agents de change agréés, soit 3 200 L.L. pour un dollar selon la circulaire n°553 émise le 28 avril. Pour rappel, la BDL a déjà établi plusieurs mécanismes à l’automne dernier pour permettre aux importateurs de certains produits stratégiques (blé, carburant, produits pharmaceutiques, matériel médical, matières premières pour l’industrie pharmaceutique locale) d’obtenir une partie des dollars nécessaires pour payer leurs fournisseurs à la Banque centrale - et par l’intermédiaire de leurs banques - au taux officiel et sous certaines conditions.
Les bureaux de change agréés sont eux officiellement fermés depuis l’appel à la grève lancé par leur syndicat. Ils protestent notamment contre l’arrestation de plusieurs dizaines d’entre eux qui sont accusés de ne pas avoir appliqué le taux fixé par la BDL. L’affaire a changé de dimension il y a environ deux semaines, avec l'arrestation du président du syndicat des agents de change, Mahmoud Mrad, accusé d'avoir manipulé le marché, puis de Mazen Hamdane jeudi dernier. La veille, le vice-président du syndicat des changeurs, Elias Srour, a également été arrêté.
Le dernier épisode en date remonte à hier soir avec l’arrestation de Karim Khoury, cadre dirigeant de la banque locale SGBL, chargé du département trésorerie, qui est accusé d’avoir "utilisé l’argent de rémunérations de membres de la fonction publique pour acheter des dollars sur le marché noir". Un motif que nous n’avons pas pu directement confirmer auprès du service de presse de la banque, qui ne nous a pas encore répondu. Une source proche du dossier a pour sa part précisé que le banquier avait été inculpé par le procureur financier, le juge Ali Ibrahim, pour "infraction à la loi réglementant le marché des changes" et "blanchiment d’argent". Selon la même source, Ramez Mecattaf, un important changeur local qui avait été auditionné lors de la première quinzaine de mai par le procureur financier, a également été inculpé pour les mêmes motifs, tout comme Elias Srour. Dans un communiqué publié le weekend dernier, les conseils de Ramez Mecattaf ont assuré que leur client était "convaincu de son innocence" et qu’il était prêt à "fournir toutes les informations nécessaires" pour le prouver et ainsi "obtenir au plus vite la levée des scellés apposés au siège" de sa société Ramez Mecattaf SAL. Toujours est-il que les trois dossiers (Karim Khoury, Ramez Mecattaf et Elias Srour) ont été transférés au premier juge d’instruction de Beyrouth Charbel Abou Samra. Selon plusieurs sources concordantes, Karim Khoury a cependant été libéré, ce qui n’est pas incompatible avec le fait qu’il soit inculpé à ce stade. Quant à Mazen Hamdane, il a été transféré à la chambre de mise en accusation. Sa demande de libération sous caution, déjà validée la veille par Charbel Abou Samra, a été approuvée par Ali Ibrahim, selon la même source qui anticipe une "vague de procédures" qui n’en est qu’à ses débuts avec de nouvelles arrestations à venir à la clé.
TOUS LES COMBINEURS AU TRAVAIL AVEC OBJECTIF DE DEVALISER COMPLETEMENT LES ECONOMIES D,UNE VIE DES PERSONNES AGEES DEPOSEES CHEZ LES PREDATEURS BANQUIERS ET D,AFFAMER LES CITOYENS.
09 h 40, le 22 mai 2020