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Société - Crise

Le plan d’aide aux ménages mis en branle : premiers versements prévus la semaine prochaine

Critiqué sur le fond et la forme, le mécanisme de sélection des bénéficiaires et sa mise en œuvre restent, pour l’heure, aléatoires.

Le plan d’aide a été décidé en Conseil des ministres en début de semaine. Photo Dalati et Nohra

Le plan d’intervention d’urgence prévoyant le déblocage d’une aide de 400 000 livres libanaises pour les familles dans le besoin devrait en principe commencer à se concrétiser, du moins dans sa première phase, d’ici au début de la semaine prochaine. Décidée en Conseil des ministres mardi dernier, cette mesure prise dans un contexte socio-économique des plus précaires a été notamment accélérée en raison de la multiplication des manifestations de colère dans certaines régions. Des rassemblements qui ont eu lieu en dépit des risques de propagation du Covid-19. En attendant que les ministères de l’Intérieur et des Affaires sociales finalisent les formulaires destinés aux bénéficiaires potentiels qui, selon des sources officielles, devraient être prêts dans les prochaines 24 heures, les premiers versements devraient toutefois commencer à être effectués dès le début de la semaine prochaine. Les premiers à pouvoir en bénéficier sont les familles qui étaient inscrites, avant même la crise, auprès des Affaires sociales dans le cadre du projet de soutien permanent aux familles les plus pauvres et dont les données sont déjà disponibles auprès de l’administration. Selon un responsable du ministère, près de 47 000 personnes devraient en bénéficier. Pour tous les autres, principalement ceux qui ont perdu leur emploi ainsi que les catégories vulnérabilisées par la double crise économique et sanitaire, telles que les chauffeurs de taxi, les ouvriers journaliers, les familles des infirmières, celles des prisonniers, etc., ils devront progressivement recevoir, dans la foulée, cette aide financière qui sera effectuée soit directement par le biais des ministères dont ils dépendent respectivement, soit, pour certains d’entre eux, par le biais du mécanisme que le gouvernement prévoit de mettre en place. Avant même la crise, la Banque mondiale estimait qu’environ un tiers des Libanais vivait sous le seuil de pauvreté et avait averti que ce taux pourrait atteindre la moitié de la population avec la détérioration de la situation économique.


(Lire aussi : A Tripoli, les ONG luttent contre la faim... avec les moyens du bord)



Bureaucratie allégée
Selon les estimations, la finalisation du procédé du gouvernement devrait prendre au moins quelques semaines, même si la lourdeur bureaucratique a été allégée dans une large mesure.

Le système prévu consiste à livrer les formulaires aux municipalités et mokhtars qui se chargeront eux-mêmes de les remplir afin d’éviter les rassemblements massifs devant leur siège et minimiser les risques de contagion. Les autorités locales, qui détiennent déjà les registres et informations de base des habitants, n’auront ainsi qu’à consigner les données dans les formulaires sans autres documents nécessaires à l’appui, excepté dans certains cas où la carte d’identité ou, à défaut, la fiche d’état civil pourrait être requise.

« Les requérants pourront se contenter d’appeler leur municipalité pour faire part de leur souhait de figurer sur la liste », explique une source proche du ministère des Affaires sociales.

L’idée est de simplifier autant que possible le mécanisme pour parer au plus pressé et accélérer le paiement afin de calmer la colère de la rue.

Les autorités locales auront ainsi un délai de deux semaines pour remettre les formulaires remplis au ministère de l’Intérieur qui effectuera un premier filtrage. Les documents transiteront ensuite par un comité ad hoc présidé par le ministre des Affaires sociales, Ramzi Moucharrafiyé, qui vérifiera les données fournies et leur crédibilité en s’assurant de l’éligibilité des requérants.

Une fois le feu vert donné et les fonds – soit la somme de 80 milliards de LL allouée à ce projet dans une première phase – débloqués, les versements seront faits à qui de droit par l’armée avec l’aide des autorités locales.


(Lire aussi : Repas et médicaments : des associations appellent à l’aide)


Le risque du clientélisme
Bien qu’ayant décidé d’emprunter une voie raccourcie pour le concrétiser dans des délais raisonnables, le plan du gouvernement n’a cependant pas échappé à certaines critiques formulées sur le mécanisme adopté, ni à des mises en garde contre d’éventuels dérapages dans un pays rongé par le clientélisme.

Dans un tweet, l’économiste et professeur à l’AUB Jad Chaaban a suggéré hier de réduire encore plus les délais vu l’urgence des besoins en proposant l’idée d’un formulaire à remplir électroniquement par tous ceux qui ont accès à internet. Ils pourraient ensuite retirer l’argent auprès des services OMT et LibanPost, propose l’économiste, qui a pris soin de rattacher à son tweet un exemplaire de formulaire déjà fait et qu’il met à la disposition des officiels.

Dans une tribune publiée le 28 mars dernier dans nos colonnes, M. Chaaban avait d’ailleurs soulevé de nombreuses interrogations, tant en ce qui concerne le volume de l’aide (par rapport à la réalité des besoins) que ses modalités de ciblage des bénéficiaires. M. Chaaban avait en outre suggéré l’octroi d’une aide étalée sur trois mois et éventuellement renouvelable, dans le cadre d’un « programme spécifique » pour soutenir les ménages qui en ont le plus besoin, critiquant implicitement toute aide ponctuelle et conjoncturelle.

Un avis que partage Ziad Sayegh, expert en politiques publiques, qui, tout en saluant l’initiative prise par le gouvernement, met en cause un projet qui ne s’inscrit pas dans la durabilité et qui, selon lui, n’aura pas plus d’effet qu’un calmant provisoire. « L’idée, dit-t-il, est d’atténuer la tension dans la rue et de convaincre les gens de retourner chez eux et d’observer le confinement, ne serait-ce que durant un ou deux mois. Ce sera autant de gagné pour le gouvernement », dit-il.

À cela, une source proche du ministère des Affaires sociales répond en assurant que la somme de 80 milliards de LL, qui devra bénéficier à près de 187 000 familles, « n’est qu’un début. Le montant sera revu à la hausse selon l’appréciation de la situation et des demandes en présence ».

Selon une ancienne fonctionnaire du ministère des Affaires sociales, l’autre problème réside dans le fait que les requérants seront en quelque sorte à la merci de leurs autorités locales chargées de remplir les formulaires et donc de sélectionner les gens qui auront droit aux aides. « Or, nous savons pertinemment qu’il n’existe aucun président de municipalité ou moukhtar n’ayant pas un agenda politique et des allégeances. Cette méthode risque fort de tourner au clientélisme politique », commente-t-elle.

Un risque auquel les ministères concernés affirment avoir déjà paré. « Les critères et les conditions de l’octroi de ces aides seront clairement annoncés dans un mémorandum qui sera rendu public par le ministère de l’Intérieur. Tout fonctionnaire municipal qui ne respectera pas les directives sera sanctionné », précise une source informée.

Autre garde-fou pour lequel les autorités ont opté, la décision de confier la distribution des allocations à l’armée « qui bénéficie largement de la confiance de la population », souligne une source informée. Ce sont donc les militaires qui devront se rendre dans chaque coin et recoin du pays pour remettre les aides à leurs bénéficiaires et s’assurer de la transparence de l’opération.



Pour mémoire
À Tripoli comme dans la banlieue sud, la menace de la faim mobilise la rue


Le plan d’intervention d’urgence prévoyant le déblocage d’une aide de 400 000 livres libanaises pour les familles dans le besoin devrait en principe commencer à se concrétiser, du moins dans sa première phase, d’ici au début de la semaine prochaine. Décidée en Conseil des ministres mardi dernier, cette mesure prise dans un contexte socio-économique des plus précaires a...

commentaires (2)

Bon déjà une bonne chose de faite , on accuserai pas le hezb libanais de la résistance d'interférence dans les affaires de l'état libanais. À MOINS que des grincheux auraient quelque chose à dire !!!!!!!!!!!!!!!!!!! Vous savez les théoriciens des 2 milices chiites et de leur allié chrétien. . Lol.

FRIK-A-FRAK

12 h 16, le 04 avril 2020

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Commentaires (2)

  • Bon déjà une bonne chose de faite , on accuserai pas le hezb libanais de la résistance d'interférence dans les affaires de l'état libanais. À MOINS que des grincheux auraient quelque chose à dire !!!!!!!!!!!!!!!!!!! Vous savez les théoriciens des 2 milices chiites et de leur allié chrétien. . Lol.

    FRIK-A-FRAK

    12 h 16, le 04 avril 2020

  • QUI VA SELECTIONNER LES BENEFICIAIRES ET SUR QUELS CRITERES ? LE CLIENTELISME VA FAIRE RAGE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 13, le 04 avril 2020

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