C’est un nouveau signal fort que le gouvernement chercherait à adresser aux communautés locale, arabe et internationale, en approuvant un projet de loi relatif à la levée du secret bancaire sur une large catégorie de fonctionnaires, d’agents associés au pouvoir exécutif et de personnalités civiles, politiques, bancaires et médiatiques. Ces mesures touchent, selon le projet qui doit encore être approuvé par la Chambre, « tous ceux qui assument une responsabilité exécutive ou de supervision dans les banques, les diverses caisses et conseils de l’État, les associations politiques et non politiques, les médias écrits, audiovisuels et numériques, comme aussi tous ceux qui passent des contrats d’exécution de travaux pour le compte de l’État ».
Le projet de loi du gouvernement est « légèrement différent » des propositions de loi du CPL et des Kataëb portant sur le même sujet, a précisé la ministre de l’Information Manal Abdel Samad en fin de réunion. La ministre a jugé le projet gouvernemental « plus complet », tout en espérant que les trois projets pourraient se fondre en un seul « qui répondrait à toutes les demandes ».
« Le projet approuvé est une bonne entrée en matière en vue de parvenir à la transparence financière et de combattre la corruption, a encore dit la ministre. Il sera suivi la semaine prochaine d’un projet relatif à l’évasion fiscale. »
Par ailleurs, le gouvernement a approuvé hier le mécanisme de présence et de participation aux réunions et congrès à l’étranger.
En début de réunion, le président Michel Aoun a confirmé que le gouvernement se réunira demain pour examiner la situation financière et prendre la décision qui s’impose au sujet des eurobonds, avant de saluer les efforts du ministre de la Santé pour prévenir une épidémie de coronavirus à l’échelle nationale. Précisons que la séance gouvernementale à Baabda sera précédée d’une réunion financière élargie, et que la décision gouvernementale finale relative aux eurobonds sera annoncée par les trois présidents réunis.
De son côté, le président du Conseil Hassane Diab a redit que « le pays passe par une phase très difficile » et que « tout est fait pour adoucir l’amertume des temps que nous vivons ».
« Nous faisons l’impossible pour traiter une accumulation de problèmes qui a conduit au temps présent; hélas, il est en échange des personnes qui font tout pour étouffer le pays et empêcher le gouvernement de le sauver », a affirmé M. Diab.
« Ce qui se passe est honteux, et les Libanais, ne sont pas dupes, a ajouté le chef du gouvernement. Le plus étonnant, c’est qu’on demande des comptes à un gouvernement qui a trois semaines pour une accumulation de problèmes remontant à une trentaine d’années (…) Mais le gouvernement ne se laissera pas intimider et n’hésitera pas à demander des comptes à toute personne responsable de l’effondrement financier et économique », a-t-il ajouté.
Interrogée sur la partie que le chef du gouvernement accuse de vouloir « étouffer le pays » ou « intimider le gouvernement », la ministre de l’Information, qui rendait compte de la réunion du Conseil des ministres, a affirmé en substance que « les médias sont plus au fait que les responsables de leur action et de leur identité ».
Selon un ancien ministre, M. Diab vise par ses propos ceux qui contribuent activement à renforcer l’isolement arabe et international du gouvernement, et la manne financière qui en proviendrait. Et ce même ministre d’exprimer sa méfiance à l’égard du projet de loi levant le secret bancaire préparé par le gouvernement, dont ce dernier pourrait user pour réprimer les libertés.
(Lire aussi : Eurobonds : le gouvernement annoncera une décision samedi, mais laquelle ?)
Les déchets solides toujours dans l’urgence
Par ailleurs, après avoir écouté les analyses d’experts financiers et juridiques sous contrat avec l’État au sujet des eurobonds, le Conseil des ministres a examiné son ordre du jour et pris connaissance, en particulier de la bouche du ministre de l’Environnement Damien Kattar, de la feuille de route 2019-2020 de gestion des déchets solides et des échéances urgentes dans ce domaine.
Cet examen se poursuivra la semaine prochaine, a-t-on convenu. Entre-temps, le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) a été chargé de préparer une étude portant sur l’élargissement des décharges de Jdeidé, ainsi que sur les capacités de la décharge de Naamé.
(Pour mémoire ! Des écologistes mettent en garde le gouvernement contre « de nouvelles politiques d’urgence »)
« Le gouvernement, commente un expert, doit savoir qu’il s’agit là de deux décisions impopulaires déjà évoquées par le précédent gouvernement, et qu’elles pourraient se heurter à des oppositions populaires et politiques dans les deux cas. Certes, il y a une cellule d’enfouissement encore vide qui viendrait à point à Naamé, mais la réouverture de cette décharge pourrait se heurter à l’opposition de la population et aurait, en tout cas, besoin d’un feu vert de Walid Joumblatt ».
« Par ailleurs, poursuit-il, les deux partis Kataëb et Tachnag pourraient s’opposer à l’élargissement de la décharge de Jdeidé, distincte administrativement de la décharge de Bourj Hammoud, mais située dans son prolongement immédiat, qui asphyxie de sa puanteur le littoral du Metn. »
« Ici comme là, constate l’expert, le gouvernement se retrouvera dans une situation d’urgence, que les gouvernements précédents ont toujours trouvé pratique d’invoquer pour obtenir satisfaction, alors qu’une solution rationnelle se fait toujours attendre. »
En effet, en l’absence d’usines de tri ou de traitement des déchets, ces deux décharges devront accueillir la moitié des 3 000 tonnes/jour de déchets produits par Beyrouth et le Mont-Liban, et qui sont pour le moment intégralement déversés à Bourj Hammoud-Jdeidé, la décharge de Costa Brava en cours d’élargissement accueillant le reste. Il va de soi qu’une solution rationnelle à long terme de ce dossier devrait comprendre le tri des déchets et le recyclage de ce qui peut l’être, de sorte que les décharges se remplissent plus lentement. « D’ici là, on restera dans l’urgence et la mauvaise gestion », conclut l’expert interrogé.
Enfin, au sujet de la décision de fermeture sanitaire préventive des écoles, la ministre a précisé qu’un éventuel renouvellement de cette décision serait décidé dimanche.
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commentaires (4)
URGENCES , SITUATION INTERNE DELICATE, SITUATION REGIONALE DANGEREUSE.... QUE DE PRETEXTES POUR NE RIEN FAIRE, SURTOUT PAS FAIRE FACE AUX PROBLEMES...
Gaby SIOUFI
15 h 59, le 06 mars 2020