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Économie - Crise

Financement des importations : les industriels obtiennent une première avancée

L’industrie estime avoir besoin d’importer pour 3 milliards de dollars de matières premières chaque année.

Le ministre de l’Industrie, Imad Hobballah, et le président de l’Association des industriels libanais, Fadi Gemayel. Photo DR

Le ministre de l’Industrie, Imad Hobballah, a annoncé hier, lors d’une conférence de presse conjointe à Beyrouth avec le président de l’Association des industriels libanais, Fadi Gemayel, la mise en place prochaine d’un mécanisme permettant aux acteurs de la filière de débloquer 100 millions de dollars de liquidités pour financer les importations de matières premières.

Fadi Gemayel a indiqué que le Premier ministre Hassane Diab avait « tenu sa promesse » aux industriels mobilisés depuis plusieurs mois pour demander un assouplissement des restrictions bancaires, notamment sur les transferts vers l’étranger, qui ont compliqué les transactions avec leurs fournisseurs. La filière s’était fortement mobilisée le 21 janvier pour dénoncer cette situation, quelques heures avant que le Premier ministre ne forme son gouvernement après plusieurs semaines de tractations avec les différents blocs politiques.Imad Hobballah a pour sa part souligné que la mise en place de ce mécanisme, élaboré avec la Banque du Liban (BDL) et qui doit être finalisé puis activé dans les prochains jours, constituait la « première étape » d’un processus ayant vocation à « protéger l’industrie » nationale en lui permettant de continuer d’alimenter le marché local, mais aussi d’exporter.


Pas de détails

Les deux hommes n’ont en revanche pas fourni de détails concernant les contours du dispositif. « Les modalités doivent être fixées dans les prochains jours. Mais il faut souligner qu’il ne s’agit ni de facilités bancaires ni de subventions. La BDL va en fait débloquer des dollars pour permettre aux industriels d’utiliser une partie de leur propre argent déposé dans les banques libanaises pour payer leurs importations de matières premières », résume une source industrielle.

Le Liban traverse depuis plusieurs mois une grave crise économique et financière, dont les effets ont été accentués par la mise en place unilatérale depuis fin août de mesures informelles de contrôle de capitaux par les banques, et qui ont particulièrement impacté les transferts à l’étranger et les retraits de dollars.

En plus d’alimenter une crise de confiance croissante envers le secteur bancaire du pays, cette combinaison de restrictions a eu pour autre effet secondaire de doper le taux livre libanaise/dollar chez les changeurs (environ 2 500 livres alors que le taux de change officiel fixe de 1 507,5 livres est toujours appliqué pour les transactions bancaires). Les mesures de contrôle de capitaux, pour l’instant toujours illégales, ont enfin été officialisées par l’Association des banques du Liban le 17 novembre. Depuis cette date, seuls les comptes en devises alimentés avec de l’argent frais (qui ne vient pas du secteur bancaire) ne sont soumis à presque aucune restriction. La BDL a, de son côté, mis en place des mécanismes pour assurer une partie des besoins en dollars de plusieurs secteurs stratégiques (blé, médicaments, carburant, matériel médical), mais à des conditions très strictes.


(Lire aussi : Forte mobilisation des industriels contre les restrictions bancaires et l’inertie de l’État)



Injection de morphine ?

Les restrictions bancaires ont impacté tous les secteurs d’activités, dont l’industrie et ses 5 500 entreprises (selon les estimations de l’AIL) qui ont besoin d’importer pour « 3 milliards de dollars chaque année » de matières premières afin de faire tourner leurs lignes de production, a rappelé Fadi Gemayel dans son discours. Ce dernier a en outre souligné que les matières premières transformées par le secteur généraient l’équivalent de « 10 milliards de dollars » de produits sur le marché local et « 3 milliards de dollars de marchandises destinées à l’exportation », des chiffres déjà martelés lors de la manifestation du 21 janvier. Le président de l’AIL a enfin noté que les 100 millions de dollars de liquidités que la BDL et le ministère de l’Industrie avaient promis permettraient au secteur de souffler pendant une quinzaine de jours. « Si les efforts du gouvernement s’arrêtent là, on peut dire que la mesure n’aura pas eu plus d’effet qu’une injection de morphine », prévient un industriel sous couvert d’anonymat.En l’absence de statistiques détaillées sur le sujet, il est pour l’instant difficile de mesurer l’impact sur l’industrie des derniers mois de crise pendant lesquels de nombreux Libanais ont manifesté – et continuent de le faire –

contre une classe politique accusée de corruption. Selon les chiffres les plus récents de l’Administration centrale de la statistique (ACS), le PIB libanais s’est déjà contracté de 4 % au premier semestre 2019, soit la meilleure moitié de l’exercice. L’industrie, dont dépendent près de 200 000 travailleurs (selon l’AIL), avait alors contribué à hauteur de 11 % des 26,6 milliards de dollars de PIB générés au cours des six premiers mois de 2019.

Les industriels ne sont pas les seuls secteurs à avoir appelé le gouvernement à intervenir pour assouplir les restrictions bancaires. Les commerçants se sont eux aussi réunis le 20 février dernier pour tenter d’appuyer leurs revendications tandis que le syndicat des voyagistes a discuté hier avec le ministres des Finances, Ghazi Wazni, des difficultés de la filière.


Pour mémoire

Le secteur industriel remonté contre les restrictions bancaires

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