« Il nous a paru important de maintenir ce rendez-vous annuel, qui est un moyen de réaffirmer le rôle crucial de la culture, alors même que le Liban traverse une crise économique sans précédent qui frappe de plein fouet les Libanais », a déclaré d’emblée l’ambassadeur de France Bruno Foucher lors de la conférence de presse du lancement du Mois de la francophonie. C’est donc dans la salle de conférences de la Bibliothèque nationale à Sanayeh, entouré du ministre de la Culture Abbas Mortada et de neuf ambassadeurs et représentants de pays francophones (un record de présence solidaire) ainsi que de la directrice régionale adjointe de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), que M. Foucher a tenu à affirmer avec force que « la culture n’est pas un divertissement ou un luxe. Elle crée de la richesse et des emplois. Je pense que ce potentiel est largement sous-estimé au Liban… » Pour l’ambassadeur de France à Beyrouth, il faut, plus que jamais, « être au rendez-vous pour donner à la culture les moyens de jouer son rôle d’arme de “résistance massive” et de progrès social ». Les trois ambitions de ce Mois de la francophonie, comme les a présentées M. Foucher, sont : maintenir, envers et contre tout, une offre culturelle qui soit accessible au plus grand nombre, donc essentiellement gratuite et diffusée dans tout le Liban, et pas seulement à Beyrouth ; soutenir les jeunes talents et les acteurs culturels libanais ; s’adresser en priorité à la jeunesse, qu’elle soit francophone, qu’elle le soit moins, en proposant autant que possible des événements plurilingues.
L’ambassadeur de France s’est ensuite particulièrement attardé sur un événement emblématique de la programmation : le festival itinérant du livre jeunesse. « Ayant été contraints d’annuler le Salon du livre francophone de Beyrouth en novembre dernier, nous n’avons pas voulu attendre novembre 2020 pour organiser un événement francophone à destination de la jeunesse. » Dix auteurs et illustrateurs jeunesse sillonneront le Liban, pendant 15 jours, à la rencontre des élèves francophones des écoles publiques et privées et du grand public. La plupart de ces rencontres se dérouleront dans les bibliothèques publiques ainsi que dans les neuf Instituts français à Beyrouth et en province. Au total, ce seront près de 60 écoles et plus de 2 000 élèves qui seront concernés par cet événement.
Cette année, la jeunesse est donc à l’honneur de cette manifestation pilotée par le ministère de la Culture, et dont sont partenaires l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) et les ambassades francophones.
Qui dit jeunesse et francophonie dit esprits critiques. Ces derniers seront récompensés dans le cadre de ce mois, notamment à l’occasion de la cérémonie de remise du prix « Jeunes critiques libanais » pour deux ouvrages sélectionnés par deux jurys d’élèves (choix des enfants et choix des ados) en présence des auteurs, Sophie Noël et Bernard Villiot.
50 ans de francophonie institutionnalisée
Le Mois de la francophonie 2020 s’ouvrira le 6 mars par un grand concert en l’église Saint-Joseph (USJ), du pianiste Guilhem Fabre, lauréat du prix Pro Musicis en 2017, accompagné de l’Orchestre philharmonique du Liban, sous la direction de Walid Moussallem.
Des activités musicales, théâtrales et littéraires sont prévues (voir par ailleurs) pour affirmer le rayonnement de la langue française au Liban et les valeurs portées par une francophonie institutionnelle qui fête cette année ses 50 ans.
L’ambassadeur de Roumanie, Victor Mercia, ainsi que ses homologues de Tunisie, Karim Boudali ; du Maroc, Mohammad Grine ; de Suisse, Monika Schmutz Kirgöz ; du Canada, Emmanuelle Lamoureux; de Belgique, Hubert Cooreman ; et d’Arménie, Vahagn Atabekian, et des représentants des ambassades du Mexique et de Chypre ont tenu à exprimer de concert leur attachement à la résistance culturelle et à la pluralité de la francophonie. Mais aussi et surtout à témoigner de leur admiration collective et individuelle pour Charles Aznavour. Un concert hommage au chanteur français d’origine arménienne décédé en octobre 2018 est en effet l’un des événements phares de ce mois de la francophonie. Interprété par Yvonne el-Hachem, il aura lieu le samedi 28 mars à 20h au centre AGBU à Dbayé.
Dans une allocution de circonstance, le ministre de la Culture a rappelé : « Ce bâtiment qui accueille aujourd’hui cette conférence faisait office d’école d’arts et métiers avant de servir d’école de droit et de sciences politiques de l’Université libanaise. Il abrite actuellement une institution importante, celle de la Bibliothèque nationale, pour conserver la mémoire du Liban. »
« Ce Mois de la francophonie, organisé par le ministère de la Culture en collaboration avec les ambassades des pays francophones, vise à réduire les distances et renforcer les relations économiques, sociales et culturelles entre les pays », a conclu Abbas Mortada.
« Promouvoir la francophonie est au cœur de notre mission », a affirmé pour sa part Michel Helou, directeur exécutif de L’Orient-Le Jour, pour qui « se battre pour un Liban francophone, c’est invoquer un Liban multilingue, un Liban ouvert, civilisé et tolérant ». Il a ensuite évoqué quelques mots sur la presse, « vecteur essentiel de diffusion de la langue ».
« Le secteur est dans une situation très difficile, avec la cessation de parution de plusieurs titres », a indiqué M. Helou. Mais il a tenu en parallèle à affirmer une certitude, celle de poursuivre « notre mission, malgré les obstacles : informer, et informer avant tout en français. Tout le monde nous donnait pour morts il y a quelques années. Paradoxalement, c’est le français qui nous a sauvés, grâce à l’attachement des Libanais à cette langue, et à l’intérêt des francophones à travers le monde pour le Liban. Nos chiffres de trafic et d’abonnements numériques, en croissance forte, témoignent de la demande pour l’information en français », a révélé Michel Helou en espérant, en conclusion, que « les ateliers littéraires pour jeunes, notamment, nous aideront à dénicher les Amin Maalouf de demain ».
À signaler parmi les événements organisés par la Direction régionale Moyen-Orient de l’Agence universitaire de la francophonie : un atelier d’écriture sur le thème « Les murs », du 7 au 13 mars ; une célébration du 10e anniversaire du Campus numérique de Tripoli, le 20 mars ; un championnat international de débat d’éloquence, du 23 au 26 mars ; le concours le Mot d’or de la francophonie en partenariat avec l’association Actions pour promouvoir le français des affaires (APFA), l’Institut français du Liban et l’Institut des finances Basil Fuleihan, le 27 mars.
Les rendez-vous incontournables
Ateliers jeunesse
Jeudi 19 mars, 17h : une table ronde dans le cadre des ateliers jeunesse, sur le thème de « La littérature jeunesse aujourd’hui », avec Timothée de Fombelle et Jean-Luc Marcastel.
Vendredi 20 et mercredi 25 mars : rencontres avec Claire Clément et Mathilde Paris.
Projections
Durant tout le mois de mars, cycle des « mercredis animés » à 18h au cinéma Montaigne, un programme de films d’animation à voir en famille. À l’affiche : L’extraordinaire voyage de Marona, La fameuse invasion des ours en Sicile et Le Voyage du prince.
Spectacles vivants
Jeudi 19 et vendredi 20 mars : Seenaryo présente la pièce Je vois venir mon fantôme de loin, au théâtre Montaigne.
Du jeudi 26 au dimanche 29 : Chrystèle Khodr présente sa pièce Augures au théâtre Le Tournesol.
Du vendredi 27 au dimanche 29 : Éric-Emmanuel Schmitt dans Madame Plynska et le secret de Chopin au théâtre al-Bustan.
Poésie et débat d’idées
Vendredi 20 mars, à 18h : Printemps des poètes sous les arcades de l’Institut français du Liban.
Mardi 31 mars, à 19h : rencontre avec Philippe Descola à la Résidence des Pins.
Arts plastiques
Du 27 février au 31 mars : exposition intitulée Les femmes qui pleurent sont en colère à la galerie de l’Institut français du Liban de l’artiste française de renommée internationale Orlan, présentée en exclusivité au Liban.
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Un fonds de l’État français pour les écoles chrétiennes francophones au Moyen-Orient
Il faut créer un Ministre d'Etat pour la francophonie , et que celà devienne une coutume obligatoire à chaque fois qu'un gouvernement est formé . (On peut cumuler avec le ministère de la culture)
16 h 43, le 27 février 2020