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Société - Francophonie

Un fonds de l’État français pour les écoles chrétiennes francophones au Moyen-Orient

« L’un des actifs extraordinaires du Liban, c’est le niveau d’éducation de sa population », déclare Charles Personnaz, directeur de l’Institut national du patrimoine et bénévole à l’Œuvre d’Orient.

Charles Personnaz en compagnie du corps administratif du Carmel Saint-Joseph à Mechref. Photo DR

Il aurait pu l’annoncer à partir du Liban, si les circonstances s’y étaient prêtées. Il l’a fait il y a quelques jours depuis la Terre sainte. À l’occasion de sa récente visite à Jérusalem, le président français Emmanuel Macron a annoncé la création d’un fonds de soutien pour les écoles chrétiennes au Moyen-Orient. L’initiative répond à un rapport qu’il avait commandé sur le renforcement de l’action de la France dans la protection du patrimoine du Moyen-Orient et le soutien au réseau éducatif des communautés chrétiennes de la région. Remis au chef de l’État français en janvier 2019, ce rapport est le fruit d’un travail de terrain de Charles Personnaz, directeur de l’Institut national du patrimoine et bénévole à l’Œuvre d’Orient, une association française active depuis plus de 160 ans au service des chrétiens d’Orient.

L’annonce du président français s’est faite au cours d’une conversation informelle avec des journalistes qui l’accompagnaient pendant sa visite au Saint-Sépulcre, dans la Vieille Ville de Jérusalem.

« Il y a 400 000 enfants qui sont formés dans ces écoles et celles-ci sont un vecteur extrêmement important de l’enseignement en français ou de l’apprentissage du français », a indiqué le président Macron pour expliquer sa décision. Et d’ajouter : « Quand la France aide ces écoles, elle aide aussi à la réconciliation de toutes ces communautés qui parfois pourraient se diviser. Ils apprennent une langue en commun, le français, ils ont des expériences communes et ils en découvrent de nouvelles qu’ils pensaient radicalement autres. »

« La France sait combien ces écoles s’adressent à tous et combien elles participent à la construction de la paix », souligne M. Personnaz, joint au téléphone à son retour dans la capitale française. Et d’ajouter : « La culture française apparaît comme un vecteur de réconciliation mais également d’esprit critique. Elle est en effet porteuse des valeurs de la devise française, comme également d’une certaine idée de la laïcité. »La création de ce fonds était « la recommandation principale du rapport dans le domaine de l’éducation », se réjouit Charles Personnaz. Elle permet selon lui « d’enclencher des actions de formation et d’envoyer des volontaires français dans ces écoles qui sont le flambeau de la francophonie dans la région ». Par ce fonds, poursuit-il, « la République française renouvelle son soutien à ce réseau qui porte la francophonie et qui est le socle de nos bonnes relations avec les communautés ».

Quelle part de ce fonds pourrait revenir au Liban ? « Il est trop tôt pour le dire », explique Charles Personnaz, alors que le fonds n’est pas encore doté. « Ce fonds ne pourra soutenir le fonctionnement des écoles. Il servira à la formation de professeurs et à l’envoi de volontaires français pour animer des activités parascolaires francophones. Pour le moment, il n’a donc pas encore d’objectifs chiffrés. Il doit être alimenté par les associations qui agissent déjà dans la région, par l’État français et par les collectivités territoriales. Les entreprises et les fondations sont encouragées à participer à ce financement », précise M. Personnaz. « Avec un million et demi à deux millions d’euros, on peut déjà former et envoyer des volontaires » , assure-t-il.



Le Liban au cœur de la présence francophone
Dans son rapport (disponible en ligne), M. Personnaz fait l’éloge du réseau scolaire privé libanais, tout en faisant état des menaces qui pèsent sur son fonctionnement, et même son existence (voir encadré). « Le Liban, y écrit-il, constitue à la fois le cœur de la présence francophone au Moyen-Orient et le cœur du réseau des écoles chrétiennes dans la région, ce qui n’est pas sans lien. Les écoles catholiques y accueillent environ 190 000 élèves, soit un peu moins d’un cinquième des élèves libanais. À ces écoles s’ajoutent 35 écoles protestantes, une vingtaine d’écoles grecques-orthodoxes (12 000 élèves) qui, pour certaines, se tournent vers la francophonie et 5 écoles arméniennes. »

Comme l’ensemble du secteur privé au Liban, qui représente 70 % du système éducatif, les écoles chrétiennes ne reçoivent aucune aide de l’État, sauf dans certaines régions ou certains quartiers défavorisés où l’État verse une subvention. Mais il n’est pas rare que les écoles doivent attendre quatre ans pour recevoir leurs subventions, ce qui les place parfois dans une situation financière telle qu’elles doivent emprunter pour attendre que l’État rembourse ses dettes.


Le niveau d’éducation, richesse du pays
Le rapport parle également de l’impact de la loi 46 (la grille des salaires dans le secteur public) sur les écoles privées. Pour Charles Personnaz, l’une des réformes structurelles que le Liban doit entreprendre devrait porter sur les dispositions de cette loi, qui menace l’une des principales richesses du Liban. « L’actif extraordinaire du Liban, nous confie-t-il, c’est le niveau d’éducation de sa population. Le fonds qui va être mis en place marque l’engagement de la France à l’égard d’un réseau éducatif qui est un véritable service public, d’autant plus que ce service assure aussi une éducation à la citoyenneté dont on a tant besoin dans la région. »

« Si de nombreuses écoles chrétiennes ferment dans tout le Liban, écoles auxquelles font confiance les classes moyennes chrétiennes et musulmanes, l’espoir de donner une éducation de qualité à leurs enfants va disparaître chez leurs parents, souligne le rapport. Or, dans bien des cas, la faculté de permettre aux enfants de disposer d’un bon enseignement constitue le dernier rempart face à la tentation du départ qui mine toutes les communautés libanaises, à commencer par les chrétiens. Si les écoles ferment, les personnes partiront et c’en sera fini une bonne fois pour toutes de la possibilité d’un Liban multiconfessionnel, îlot fragile de pluralisme et de démocratie dans un Moyen-Orient secoué de toutes parts. Les discours de paix et de tolérance prônés par ces écoles seront remplacés par d’autres. La loi 46 n’est donc pas une simple loi scolaire. Elle touche à l’équilibre du Liban. »


Il aurait pu l’annoncer à partir du Liban, si les circonstances s’y étaient prêtées. Il l’a fait il y a quelques jours depuis la Terre sainte. À l’occasion de sa récente visite à Jérusalem, le président français Emmanuel Macron a annoncé la création d’un fonds de soutien pour les écoles chrétiennes au Moyen-Orient. L’initiative répond à un rapport qu’il avait...

commentaires (3)

Rectifications des erreurs dues à l'âge du capitaine - Les Jésuites ont construit un couvent à Antoura en 1656 cédé en 1793 aux Pères Lazaristes. - Les Jésuites ont ouvert à Ghazir un séminaire en 1843, transféré à Beyrouth en 1870 qui devient en 1875 l'Université Saint-Joseph. - Le coillèdes des Frères Maristes fondé à Jounieh en 1903. L'USEK (L'Université Saint-Esprit de Ka

Un Libanais

19 h 09, le 27 janvier 2020

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Commentaires (3)

  • Rectifications des erreurs dues à l'âge du capitaine - Les Jésuites ont construit un couvent à Antoura en 1656 cédé en 1793 aux Pères Lazaristes. - Les Jésuites ont ouvert à Ghazir un séminaire en 1843, transféré à Beyrouth en 1870 qui devient en 1875 l'Université Saint-Joseph. - Le coillèdes des Frères Maristes fondé à Jounieh en 1903. L'USEK (L'Université Saint-Esprit de Ka

    Un Libanais

    19 h 09, le 27 janvier 2020

  • On peut se demander pourtant si un pays qui se dit champion "laique" peut justifier un tel fonds. Le site web du senat francais dit que le pays est une « république indivisible, laïque, démocratique et sociale » et la république ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte ». La situation est un peu contradictoire, car nos chers amis francophones ont meme une loi de 1886 (la loi Goblet) qui interdit en France aux relgieux d'enseigner. La laïcité, proclamée dès 1881 avec la suppression de l'éducation religieuse dans l'enseignement public, est renforcée par la loi Goblet (1886), qui a meme interdit aux religieux d'enseigner dans le public. Mais la France c'est le pays des contradictions ... À partir de 1940, les religieux ont eu à nouveau le droit d'enseigner.

    Stes David

    17 h 53, le 27 janvier 2020

  • Le niveau d'éducation des Kesrouanais revient aux écoles arabo-francophones. La langue française était enseignée déjà à l'école de Aïn-Warqa fondée en 1789 entre Ghosta et Meerab, surnommée "La Sorbonne de l'Orient". Au séminaire des Jésuites à Ghazir fondé en 1843. Au collège des Lazaristes à Antoura en 1783. Les Frères Maristes à Jounieh en 1913, l'école des Soeurs de la Sainte-Famille française, le collège des Apôtres, le collège des Moines libanais, les écoles des Soeurs maronites de la Sainte-Famille (Ebrine), les Soeurs du Saint-Coeur, les écoles de l'enseignement public... etc. Les coeurs des Kesrouanais ne cesseront jamais de battre aux mêmes rythmes que le coeur de la France.

    Un Libanais

    17 h 23, le 27 janvier 2020

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