Le Liban a annoncé hier le premier cas confirmé du nouveau coronavirus Covid-19, apparu en Chine à la fin du mois de décembre. T. S., une Libanaise de 45 ans, arrivée jeudi soir de la ville sainte chiite de Qom, en Iran, a été placée en quarantaine à l’hôpital gouvernemental Rafic Hariri, à Beyrouth. « Son état est stable et ne présente aucune conséquence grave », a rassuré le ministre de la Santé publique, Hamad Hassan. « Deux autres cas suspects ont également été mis en quarantaine dans cet hôpital », a-t-il ajouté au cours d’une conférence de presse tenue hier au siège du ministère, à Bir Hassan. Il a en outre démenti toutes les rumeurs ayant circulé hier concernant « le transport dans l’avion en provenance d’Iran du corps de deux personnes » qui seraient décédées des suites du virus. « Il a été demandé aux passagers qui étaient à bord de l’avion de jeudi soir de s’isoler chez eux, a signalé M. Hassan. Ils sont suivis de près, matin et soir, par une équipe de travail du ministère de la Santé. »
Jusqu’à jeudi soir, et conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, seuls les passagers à bord des vols en provenance des pays d’Extrême-Orient, notamment la Chine, étaient surveillés. « Lorsque l’Iran a toutefois officiellement annoncé ses deux premiers décès liés au virus, mercredi, et qu’il a appelé jeudi à la suspension de tous les rassemblements religieux à Qom, le ministère de la Santé publique a immédiatement réagi », explique à L’Orient-Le Jour une source proche de cette administration. Celle-ci a alors dépêché jeudi une équipe de spécialistes à l’aéroport qui est montée à bord du vol en provenance d’Iran, examinant chacun des 145 passagers. « La patiente présentait des symptômes légers, poursuivent les mêmes milieux. Elle toussait légèrement et se sentait affaiblie. Elle a été immédiatement transportée à l’hôpital Hariri. Les autres passagers ne présentaient aucun symptôme. Leur état de santé est toutefois surveillé de près. »
Selon cette même source, « le problème réside dans le fait que l’Iran a tardé à annoncer les cas de coronavirus détectés sur son territoire, alors que cela fait plusieurs jours que des patients y ont été diagnostiqués ». Au niveau du Liban donc, le ministère a obtenu les contacts de tous les passagers rentrés d’Iran au cours des deux dernières semaines, la période d’incubation du virus allant d’un à quatorze jours. Il a commencé à entrer en contact avec eux pour s’assurer de leur état de santé et suivre leur évolution. M. Hassan a, dans ce cadre, appelé tous les passagers rentrés de pays où le virus a été détecté au cours des deux dernières semaines à « s’isoler chez eux pendant quatorze jours et à appeler le 76/592699 au cas où ils ressentiraient des symptômes du virus ». La contamination par le Covid-19 se présente sous forme d’un syndrome grippal avec une fièvre, des courbatures, une toux sèche, un mal de tête et un écoulement nasal. Souvent la maladie guérit spontanément. Dans certains cas toutefois, elle peut évoluer en une infection pulmonaire qui peut s’aggraver et entraîner la mort.
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Un virus non virulent
« Il n’y a pas lieu de paniquer », a encore insisté M. Hassan lors de sa conférence de presse, avançant que « jusqu’à présent, le besoin de déclarer l’état d’urgence ne s’impose pas ». C’est ce qu’ont confirmé de leur côté des sources proches du ministère. Elles expliquent dans ce cadre qu’au Liban, « la transmission du virus n’est pas encore locale », c’est-à-dire que le cas détecté n’a pas contracté le virus sur le territoire libanais. « Il est vrai que ce virus se propage rapidement, mais il n’est pas virulent, assurent-elles. Le taux de mortalité est de 2,3 %, alors que le MERS (coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient apparu en Arabie saoudite en 2014) était beaucoup plus virulent avec un taux de mortalité frôlant les 30 %. » Selon le bilan officiel, l’épidémie a, jusqu’à hier, fait plus de 2 200 morts et a contaminé plus de 75 000 personnes en Chine et plus de 1 100 ailleurs dans le monde.
« Les mesures prises par le ministère, en coordination avec les autorités concernées au sein de la commission nationale chargée de lutter contre l’épidémie de coronavirus, et celles prises à l’aéroport de Beyrouth ont prouvé être précises et sérieuses », s’est félicité M. Hassan, soulignant que les mesures de contrôle seront renforcées à l’aéroport de Beyrouth où l’équipe sanitaire sera élargie. De plus, la surveillance ne se limitera plus aux vols en provenance d’Extrême-Orient, mais à tous les vols « puisque le virus s’est propagé dans plusieurs pays ».
À la question de savoir si les vols vers et en provenance de l’Iran ou d’autres pays contaminés par le virus seront interdits, il a précisé que « toute décision dans ce sens doit être prise par le Premier ministre, Hassane Diab, et la commission ministérielle chargée de lutter contre le virus ». L’OMS n’a pas à ce jour conseillé de fermer les frontières, laissant les décisions dans ce cadre à la discrétion de chaque pays.
Sur le plan logistique, M. Hassan a précisé que quatre chambres d’isolement ont été aménagées à l’hôpital gouvernemental Rafic Hariri et que le ministère en concertation avec la direction de cet établissement prévoyait d’aménager tout un étage au cas où d’autres cas seraient détectés. Il a également noté qu’une cellule de crise a été créée pour lutter contre cette épidémie et que d’autres unités d’isolement pourraient être aménagées dans d’autres hôpitaux gouvernementaux si le besoin est ressenti.
En soirée, M. Hassan a annoncé à la chaîne LBCI que 140 lits ont été aménagés à l’hôpital Hariri où il devrait effectuer aujourd’hui une tournée avant de tenir une conférence de presse pour établir un état des lieux.
(Pour mémoire : Un étudiant libanais rentré de Chine placé en quarantaine par mesure de précaution)
Mesures de prévention
Se prémunir du virus consiste à respecter quelques règles d’hygiène. Jacques Mokhbat, spécialiste en maladies infectieuses, précise à L’OLJ que celles-ci sont les mêmes que celles adoptées pour se protéger de la grippe, d’autant que ce virus se transmet par des gouttelettes respiratoires, le contact avec des mains contaminées ou encore un objet contaminé. Il est ainsi recommandé « de garder une distance d’au moins deux mètres avec une personne présentant un syndrome respiratoire aigu, c’est-à-dire qui tousse ou éternue, de se laver les mains fréquemment, de se couvrir le nez et la bouche avec un mouchoir jetable lorsqu’on tousse, et d’éviter de se toucher les yeux ou les muqueuses si on ne s’est pas lavé les mains ». « Dans les milieux hospitaliers, il est conseillé de porter un masque, ajoute-t-il. Si un enfant présente un syndrome grippal, il faudrait de préférence, le garder à la maison. » Et le Dr Mokhbat d’insister : « Jusqu’à présent, n’est contagieux que celui qui est malade. »
Ce premier cas de coronavirus au Liban a été accompagné de fausses informations selon lesquelles le ministre de l’Éducation, Tarek Majzoub, a décidé la fermeture des écoles dans le pays. Ce qu’il a démenti. Il a assuré que les équipes de son ministère étaient prêtes à toute éventualité, ajoutant que des directives nécessaires à la sensibilisation et à la prévention aux directeurs de l’ensemble des établissements ont été données et qu’un numéro d’urgence (01/772186) était mis à la disposition des écoles.
Par ailleurs, l’hôpital Hammoud, situé à Saïda, au Liban-Sud, a démenti les informations circulant sur les réseaux sociaux selon lesquelles il abriterait un patient atteint du coronavirus. L’hôpital Nini à Tripoli a lui aussi nié avoir un patient atteint du coronavirus.
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Virus Qomrona..hahahaha...
17 h 45, le 22 février 2020