Le président du Parlement libanais, Nabih Berry, a critiqué jeudi les critères adoptés jusque-là pour la formation du gouvernement que le Premier ministre désigné Hassane Diab tente de mettre sur pied, confirmant jeudi qu'il souhaitait la formation d'un cabinet dit "techno-politique". Le pays est sans gouvernement depuis la démission, le 29 octobre, du Premier ministre sortant Saad Hariri, sous la pression de la rue qui manifeste depuis le 17 octobre 2019.
La veille, M. Berry avait plaidé en faveur d'un gouvernement "rassembleur" de toutes les forces politiques, faisant dire à certains observateurs que le processus de formation du gouvernement, qui se déroulait sur la base d'une équipe composée de technocrates, est retourné à la case départ.
"La formation du gouvernement, sur laquelle nous travaillons depuis trois mois alors que nous n'avions besoin que de 15 jours pour le finaliser, connaît des complications", a déclaré le président de la Chambre des députés lors d'une discussion à bâtons rompus avec des journalistes. "La situation dans la région n'est pas bonne, et celle du Liban empire. La solution passe avant tout par la formation d'un gouvernement", a-t-il ajouté.
Selon M. Berry, qui avait reçu plus tôt dans la journée l'ambassadeur de Grande-Bretagne au Liban, Chris Rampling, "des règles ont été posées (par les protagonistes), bien qu'elles ne soient pas inscrites dans la Constitution ou fassent partie des usages". "Ils ont d'abord dit qu'ils ne voulaient pas d'anciens ministres, mais l'on voit que d'anciens ministres ont été proposés. Ils ont dit qu'ils ne voulaient pas que le cabinet comporte de députés alors que dans tous les pays du monde, les gouvernements sont le reflet des Parlements", a-t-il ajouté.
"Ce que je propose, c'est la même chose que ce que j'avais proposé au moment des candidatures de Saad Hariri, Mohammad Safadi, Bahige Tabbara et Samir Khatib, à savoir la formation d'un cabinet techno-politique, comme le gouvernement sortant", ajoute M. Berry, assurant n'avoir aucun problème avec Hassane Diab et plaidant pour l'incorporation de représentants du mouvement de contestation.
Par ailleurs, le président de la Chambre a démenti que l'économiste Ghazi Wazni, fortement pressenti jusque-là pour le portefeuille du ministère des Finances, soit l'un de ses conseillers.
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Le CPL pour un gouvernement d'experts
De son côté, le député Ibrahim Kanaan a affirmé que sa formation du Courant patriotique libre n'a pas changé d'avis et était toujours en faveur de la formation d'un gouvernement d'experts, alors que des informations de presse faisaient état d'un changement de pied de la part du CPL. "Notre position n'a pas changé et ne changera pas. Nous sommes pour un gouvernement d'experts, et nous soutenons le Premier ministre désigné dans sa tâche", a déclaré M. Kanaan à l'issue de la réunion hebdomadaire du groupe parlementaire du "Liban fort", dont le CPL est la principale composante. "Nous facilitions les choses et nous sommes prêts à le faire jusqu'au bout à condition que les mêmes critères soient appliqués pour tout le monde", a ajouté M. Kanaan. "Nous voulons un gouvernement de salut aujourd'hui avant demain, tenant compte de la volonté des gens. Il ne s'agit pas d'une question de pouvoir, mais de stopper l'effondrement et de mettre en œuvre des solutions radicales pour enrayer la chute", a-t-il conclu sur le sujet.
Dans la journée, le groupe parlementaire du Hezbollah avait indiqué que "les derniers développements imposent la formation d'un gouvernement devant centrer son attention sur le redressement de la situation financière et monétaire, sur le retour du bon fonctionnement des institutions et la résolution des crises qui s'accumulent". Dans la matinée, le chef du bureau politique du parti chiite, Ibrahim Amine Sayyed, avait affirmé depuis le siège patriarcal maronite à Bkerké que le Hezbollah faisait tout pour faciliter la formation du cabinet.
De son côté, l'ancien Premier ministre Nagib Mikati a appelé à hâter la formation du cabinet que doit présider Hassane Diab, mettant en garde contre le retard qui "provoque des dégâts".
Depuis plus de deux mois, les manifestants libanais appellent à la chute de tous les responsables, accusés de corruption et d'incompétence, alors que le pays traverse une grave crise économique et de liquidités. Sous la pression de la rue, le gouvernement de Saad Hariri avait démissionné le 29 octobre. Le 19 décembre, à l'issue de consultations parlementaires, le président Aoun a désigné l'ex-ministre de l’Éducation Hassane Diab, appuyé par les partis du 8 Mars, au poste de Premier ministre. Les manifestants rejettent toutefois la nomination de M. Diab qu'ils estiment issu de la même classe politique corrompue dont ils réclament le départ.
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commentaires (9)
Nous ne voulons ni de Safadi, ni de Bahia Tabara ni d'aucun qui soit recommandé par le CPL, HB ou Berry. C'est un gouvernement loin de leurs combines qui doit voir le jour si non ce sera la nuit pour tout le monde. Lorsqu'il se compare à des pays civilisé sans avoir froid aux yeux, il oublie que dans les autres pays les voleurs et les dictateurs n'ont pas leur place dans un gouvernement c'est derrière les barreaux plutôt qu'ils croupissent pas dans un parlement et encore moins dans un ministère. Donc ils peuvent choisir des ministres qui sont le reflet des parlements propres pas comme nos pourritures. Il s'alarme de l'accumulation des dettes? Quelle blague.
Sissi zayyat
16 h 27, le 10 janvier 2020