Le thème des manifestations de ce dimanche à Beyrouth avait de quoi intriguer : pourquoi les centaines de manifestants, munis de drapeaux libanais mais aussi de branches d’olivier, symboles de paix, ont-ils marché au nom de la « clarté » en ce 46e jour de révolte populaire ?
« Cela fait un moment que l’on nous menace d’un effondrement économique, de guerre civile ou encore de pénurie de denrées essentielles sur le marché, explique à L’Orient-Le Jour Wassef Haraké, avocat militant et pilier de l’Observatoire de lutte contre la corruption, qui participait à la marche vers le centre-ville de Beyrouth. Ils ont assez brouillé les pistes, il était temps de remettre les pendules à l’heure. Il faut faire assumer aux autorités en place la responsabilité de la crise. Et il faut rediriger notre lutte contre eux et leur demander des comptes, dans un effort pour former une classe dirigeante différente de celle qui gouverne actuellement. Voilà la définition du mot “clarté” tel qu’on l’a utilisé aujourd’hui. »
Les manifestants scandaient effectivement des slogans réclamant des consultations « immédiates » pour désigner un Premier ministre « qui ne fasse pas partie de la classe politique ». Étant donné que cette tâche revient au président de la République Michel Aoun, celui-ci n’a pas échappé aux slogans des manifestants, qui lui demandaient de « partir ». Dans cette foule où plusieurs groupes de la société civile se côtoyaient, beaucoup d’appels « à la création d’un État civil et laïc, où le confessionnalisme serait aboli ». Les « voleurs de l’État » n’étaient pas épargnés non plus. « Jamais plus la guerre », entendait-on également de toutes parts : ce n’est pas un hasard si les groupes civils ont défilé le long de l’ancienne ligne de démarcation, avant de se retrouver tous à la place des Martyrs vers 16 heures. Du secteur du Musée où certains avaient entamé leur marche, à Sodeco puis au centre-ville, sans compter les manifestants venus de la place Sassine, à Achrafieh, ou de Hamra.
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Mona, une jeune avocate née après la guerre, a rejoint la manifestation dans un groupe qui se fait appeler « Nous voulons une nation ». Interrogée sur le message inscrit sur sa banderole, « Les mères du Liban sont plus fortes que la discorde des gouvernants », elle s’explique : « Ma mère a vécu la guerre et je sais qu’elle veut y échapper à n’importe quel prix. Je suis là pour leur crier que nous ne voulons plus de leurs conflits ! »
Nayla et Hassana ont en main des branches d’olivier. « Nous faisons partie du comité des personnes disparues, disent-elles. La guerre, nous la connaissons très bien, nous en mesurons les conséquences sur nos propres familles et nous ne voulons plus la revivre. Nous sommes là également pour rappeler que la loi sur les personnes victimes de disparition forcée fête son premier anniversaire sans que n’ait été formé le comité qui se charge de faire la lumière sur ces cas. »
Josette, elle, vient du quartier Sassine. « La clarté pour moi, c’est qu’il faut remettre le cap sur ce qui compte, la chute de tout ce système actuel », affirme-t-elle. Ne craint-elle pas les retombées d’un changement aussi brutal ? « Personnellement, je n’ai peur de rien, répond-elle. Nous n’avons plus aucune raison de protéger ce système fondé sur les intérêts privés de quelques-uns au détriment de l’intérêt général. »
L’État civil et laïc, c’est aussi celui qui protège les femmes, selon Fatmé, de l’ONG Kafa. « Nous sommes là pour revendiquer une loi de statut personnel civil qui soit contraignante et non facultative, affirme-t-elle. Les lois communautaires de statut personnel sont discriminatoires envers les femmes. »
(Lire aussi : Le mouvement de protestation et les pièges de la politisation, le décryptage de Scarlett HADDAD)
La femme et l’environnement unis dans une sculpture
C’est donc dans une ambiance festive devenue coutumière de ces rassemblements que les manifestants sont arrivés en musique à la place des Martyrs, elle-même grouillante de vie. Les arts et la femme y étaient, comme d’habitude, à l’honneur, cette fois concentrés dans un même projet : dans le grand parking faisant face à la mosquée al-Amine, une statue de femme révolutionnaire était près d’être terminée, après trois jours de travail. Des centaines de canettes, bouteilles en plastique, bouchons de galons d’eau… provenant du tri effectué sur la place composent cette sculpture singulière, portant le drapeau libanais, cheveux au vent.
Son concepteur, Pierre Abboud, architecte d’intérieur et artiste peintre établi à Dubaï, explique avoir voulu rendre hommage à la femme « qui a été l’un des grands succès de cette révolution ». L’utilisation de matières recyclables était sa façon de mettre en évidence son intérêt pour le dossier de l’environnement au Liban, dont la dégradation lui tient à cœur. Il espère que cette place deviendra celle « de l’art ».
Comme l’environnement et l’art, les difficultés économiques sont omniprésentes sur la place et dans les esprits. Dans le parking désormais célèbre du bâtiment des lazaristes, un nouveau venu : un souk populaire où les produits libanais sont à l’honneur, pour s’entraider à dépasser une période difficile.
Dans les provinces également, les manifestations se sont poursuivies avec le même enthousiasme pour la 46e journée consécutive. La place al-Nour grouillait de vie à Tripoli, où on revendique comme ailleurs la formation rapide d’un gouvernement. À Saïda, les femmes ont organisé une marche pour rejeter la guerre civile et demander le changement politique. À Taalabaya, Nabatiyé, Baalbeck, dans le Akkar et ailleurs, les places continuaient à accueillir des milliers de protestataires.
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LA REALITE QUE PENDANT 4 JOURS CERTAINS PARTIS ONT ESSAYE DE CASSER LA REVOLUTUION EN LUI FAISANT PEUR AVEC LEURS ACTIONS VIOLENTES LA REPONSE DES REVOLUTIONNAIRES A AIN REMANEH/CHIAH ET AU RING//KHANDAK GHAMIK ET A BARJA ONT ETE D'UNE TEL CLARTE QUE HEUREUSEMNT CETTE POLITIQUE A ETE ANNULEE LA REVOLUTION DOIT TROUVER TOUS LES JOURS DES IDEES POUR CONTINUER A VIVRE DONC CERTAINS DERAPAGES SONT EVIDENTS MAIS LE FAIT QUE M BASSIL ( et le president ) CONTINUE A VOULOIR FAIRE UN MINISTERE AVANT MEME UNE NOMINATION ET VEUT FAIRE PARTIE DE CE GOUVERNEMENT MALGRE TOUS SES ECHECS REND IMPOSSIBLE CETTE SOLUTION QUI CONSISTE A: GOUVERNEMENT TRES REDUIT DE SPECIALISTES AVEC PLEIN POUVOIR POUR LEGIFERER DANS LE DOMAINE ECONOMIQUE UNIQUEMENT POUR 6 A 8 MOIS ,TOUT LE RESTE DEVANT AVOIR L'ACCORD DU PARLEMENT. QUE CRAINT DONC LE TANDEM AMAL HB ET CPL??? TRES DIFFICILE A COMPRENDRE
14 h 34, le 02 décembre 2019