Le chef du Courant patriotique libre, le député Gebran Bassil, a annoncé jeudi que les parlementaires de sa formation avaient signé une proposition de loi prévoyant la publication des transactions bancaires et les sources des propriétés" des fonctionnaires, au moment où le pays connaît une révolte populaire inédite depuis le 17 octobre contre la classe dirigeante et surtout contre M. Bassil.
"Nous allons présenter au Parlement une proposition de loi qui prévoit la publication des transactions bancaires et les sources des propriétés, sachant que cette loi ne sera pas en contradiction avec le mécanisme en vigueur et sera conforme aux standards internationaux", a annoncé M. Bassil, lors d'une conférence de presse à l'issue de la réunion hebdomadaire du bloc du Liban Fort, affilié au CPL au siège central de ce parti fondé par le président de la République, Michel Aoun. "Cette proposition de loi est importante car elle permettra de placer tout le monde sous les projecteurs. Elle reflète l'engagement des forces politiques", s'est félicité Gebran Bassil.
Le texte, intitulé "proposition de loi visant à modifier les prérogatives de la commission spéciale d'enquête créée en vertu de la loi 44/2015 (lutte contre le blanchiment d'argent et le terrorisme)", vise à "accorder à la commission spéciale la capacité de s'autosaisir pour enquêter sur les comptes de tout fonctionnaire, juge, ou personne effectuant un service public si elle constate que des doutes entourent l'origine des montants dans les comptes de ces personnes ou si les transactions bancaires suscitent le doute".
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Le 28 octobre, le CPL avait officialisé la levée du secret bancaire sur les comptes de ses dirigeants, une mesure qui ne convainc ni les manifestants anti-pouvoir ni les spécialistes.
Les ministres et députés du CPL avait déjà annoncé une première fois qu'ils comptaient lever le secret bancaire sur tous les comptes portant leur nom, comme l’avait préconisé le chef de l’État. Le parti avait indiqué que les députés de cette formation politique avaient présenté trois propositions de loi au Parlement à ce sujet, ainsi qu’une proposition de loi concernant la levée de l’immunité juridique de tous les ministres, députés et fonctionnaires.
Depuis l’annonce du CPL, plusieurs voix de la société civile et dans la rue se sont élevées pour mettre en exergue "le non-sens" d’une telle initiative. "La levée du secret bancaire ne peut être effective que dans le cadre d’une enquête judiciaire pour enrichissement illicite, fraude fiscale, blanchiment d’argent, trafic de drogue ou autres", avait précisé un avocat à L’Orient-Le Jour. Il avait ajouté que le registre foncier donne déjà des indications sur les propriétaires des actifs immobiliers et le registre de commerce, sur les dirigeants des sociétés et les détenteurs des participations dans ces sociétés. Concernant les comptes bancaires à l’étranger, il a rappelé que le Liban est signataire de l’accord multilatéral sur l’échange automatique d’informations fiscales, qui englobe les comptes bancaires. Reste la question des proches des dirigeants politiques, qui comme l’ont souligné plusieurs représentants de la société civile, n’a pas été abordé par les responsables du CPL.
Dans ce contexte, le vice-président de la Chambre, Élie Ferzli, avait annoncé mercredi que les textes de loi liés à la lutte contre la corruption seront examinés de manière plus approfondie, pendant un mois, par une sous-commission parlementaire présidée par le député Ibrahim Kanaan, membre du CPL.
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Formation du gouvernement
Par ailleurs, le chef du Courant patriotique libre a éludé lors de sa conférence de presse jeudi la question du gouvernement, affirmant que sa formation se prononcera à ce sujet la semaine prochaine, en attendant de nouveaux développements. "La semaine prochaine, nous tiendrons des propos au sujet du gouvernement, et le bloc du Liban Fort exprimera sa position", s'est contenté de dire M. Bassil à la fin de sa conférence de presse, après avoir refusé de répondre aux questions des journalistes.
La révolte populaire inédite déclenchée le 17 octobre a poussé le Premier ministre Saad Hariri à démissionner. Depuis, le chef de l’État Michel Aoun n'a toujours pas fixé la date des consultations parlementaires contraignantes pour désigner un nouveau Premier ministre, affirmant vouloir effectuer les contacts politiques nécessaires pour faciliter la tâche du nouveau chef du gouvernement. Plusieurs noms ont déjà circulé de manière informelle sans pour autant faire consensus.
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commentaires (12)
Je prie l’orient-le jour d’éviter de mettre la photo de ce personnage… NB : j’ai même pas lu l’article
Jack Gardner
11 h 12, le 29 novembre 2019