La délégation du bloc aouniste chez le président de la Chambre, Nabih Berry Photo ANI
Les ministres et députés membres du Courant patriotique libre ont annoncé hier avoir officiellement levé le secret bancaire sur leurs comptes, une mesure qui ne semble pas convaincre les manifestants qui sont dans les rues depuis le 17 octobre pour réclamer le départ de la classe dirigeante.
Au cours d’une conférence de presse conduite par le député Edy Maalouf, et sous le slogan « Tous sans exception ? Nous sommes les premiers à lever le secret bancaire », le bureau politique du CPL a, en effet, annoncé l’entrée en vigueur de cette mesure. L’intitulé de la conférence fait écho au slogan « Tous sans exception » scandé par les manifestants.
Le parlementaire a précisé qu’en « application d’une décision du bureau politique du CPL, en date du 19 octobre 2019, préconisant la levée du secret bancaire sur les comptes des membres de la formation, ministres, députés et vice-présidentes du parti, et en accord avec la position du chef de l’État à ce sujet et avec la levée du secret bancaire sur les comptes du chef du CPL effectuée il y a deux ans (...), tous les ministres et députés du CPL ont signé les mémorandums » prévoyant la levée du secret bancaire sur leurs comptes.
Dans le document en question, les députés et ministres précisent qu’ils s’abstiennent « totalement de prendre prétexte du secret bancaire dans toute affaire judiciaire à leur encontre pour détournement ou dilapidation de fonds publics, qu’elle soit lancée par la commission d’enquête de la Banque du Liban ou les instances judiciaires compétentes ».
Edy Maalouf précise que cette levée du secret bancaire concerne « les comptes au Liban et à l’étranger » et « prévoit l’obtention de relevés bancaires couvrant toute la durée du mandat du député ». Il explique ensuite que les députés et ministres du CPL donnent leur feu vert aux banques concernées pour effectuer toute action qu’elles jugent nécessaire dans le cadre de la levée du secret bancaire, et ce sans autorisation préalable.
Le député aouniste affirme que « cette étape marque le début d’une série d’initiatives que le CPL a lancées il y a deux ans, et qu’il compte intensifier dans un proche avenir, jusqu’à obtenir la levée du secret bancaire de tous les responsables politiques et des fonctionnaires en charge de l’argent public (...) ».
On sait que le CPL a présenté trois propositions de loi au Parlement sur la levée du secret bancaire, ainsi qu’une quatrième portant sur la levée de l’immunité juridique de tous les ministres, députés et fonctionnaires.
« Non-sens »
Depuis l’annonce du CPL, plusieurs voix de la société civile et dans la rue se sont élevées pour mettre en exergue « le non-sens » d’une telle initiative. « La levée du secret bancaire ne peut être effective que dans le cadre d’une enquête judiciaire pour enrichissement illicite, fraude fiscale, blanchiment d’argent, trafic de drogue ou autres », a précisé un avocat désireux de garder l’anonymat à L’Orient-Le Jour.
Et d’ajouter que le registre foncier donne déjà des indications sur les propriétaires des actifs immobiliers, et le registre de commerce sur les dirigeants des sociétés et les détenteurs des participations dans ces sociétés.
Concernant les comptes bancaires à l’étranger, l’avocat cité a rappelé que le Liban est signataire de l’accord multilatéral sur l’échange automatique d’informations fiscales, qui englobe les comptes bancaires. Reste la question des proches des dirigeants politiques qui, soulignent plusieurs représentants de la société civile, n’a pas été abordée par les responsables du CPL.
Réunion chez Berry
Dans ce contexte, une délégation du bloc parlementaire aouniste, le « Liban fort », s’est rendue à Aïn el-Tiné et s’est entretenue avec le président du Parlement, Nabih Berry, de l’examen et de l’adoption des textes de loi en rapport avec la lutte contre la corruption. « Il est temps de faire un pas sérieux vers l’adoption des propositions de loi pour la lutte contre la corruption que notre groupe a formulées, et le président Berry est d’accord avec nous », a souligné le député Ibrahim Kanaan lors d’un point de presse à l’issue de la réunion.
« La décision a été prise de réactiver le travail des commissions parlementaires et du bureau de la Chambre, et nous espérons que notre réunion aujourd’hui pavera la voie à la bonne marche des institutions de l’État », a ajouté le député aouniste.
Mr Berry donnez votre démission soyez courageux vous avez assez mangé
22 h 23, le 28 novembre 2019