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À La Une - Liban

La séance législative reportée sine die faute de quorum, la rue célèbre une "victoire"

Plusieurs formations politiques avaient déjà annoncé qu'elles boycottaient cette séance, d'autres députés n'ont pas pu arriver place de l'Etoile.

Des Libanais célébrant le report d'une séance parlementaire controversée, le 19 novembre 2019, à Beyrouth. Photo Michel Sayegh

Sous la pression d'une rue décidée à ne rien lâcher, la séance législative prévue aujourd'hui à 11h place de l’Étoile a été reportée sine die, faute de quorum. Les députés étaient censés élire les membres des commissions parlementaires puis examiner plusieurs lois censées lutter contre la corruption ainsi qu'une loi d'amnistie générale controversée.

"La séance a été reportée à une date qui sera déterminée ultérieurement", a annoncé le secrétaire général de la Chambre, Adnane Daher, lisant un communiqué devant les caméras des télévisions. Il a évoqué l'absence de quorum et "les conditions exceptionnelles actuelles, en particulier sécuritaires". Et de préciser : "Le bureau du Parlement, et au vu du règlement interne (de la Chambre) et des circonstances actuelles exceptionnelles, a décidé de considérer les commissions parlementaires ainsi que tous leurs membres comme valides" et donc en droit de poursuivre leur travail.

Plusieurs formations politiques avaient déjà annoncé qu'elles boycottaient cette séance, d'autres députés n'ont pas pu arriver place de l’Étoile, des centaines de manifestants s'étant rassemblés très tôt le matin aux alentours du Parlement pour empêcher la tenue de la séance. 

Selon des propos rapportés par des visiteurs, le président du Parlement, Nabih Berry, aurait déclaré que "les blocs parlementaires et les députés ont été sincères, mais d'autres acteurs n'ont pas respecté leur promesse. A quelque chose malheur est bon", sans préciser à quels acteurs ils faisaient allusion.


"On doit continuer"
Ce deuxième report a été célébré comme une victoire par les manifestants sur place. Car à l'origine, la séance plénière était prévue mardi12 novembre, mais sous la pression de la rue, le président du Parlement avait décidé de la reporter à aujourd'hui.  Après l'annonce du report, les manifestants ont continué de tambouriner sur les panneaux entourant le Grand Teatro. Depuis plusieurs jours, c'est en tapant sur des casseroles ou des objets en métal que les manifestants, mobilisés depuis le 17 octobre, expriment leur colère contre la classe politique qu'ils estiment incapable et corrompue. Ils ont par la suite repris leurs slogans habituels contre toute la classe politique, criant "Révolution!", et certains campaient toujours sur place. 



"On doit continuer à manifester, même si nous avons enregistré une victoire. Si jamais on arrête, ils risquent de revenir", lance à notre journaliste sur place Anne-Marie el-Hage, Moussa, un jeune graphic designer venu de Tripoli. C’est la première fois qu’il vient manifester dans le centre-ville comme beaucoup de Tripolitains venus aujourd'hui à Beyrouth en renfort.


Pour le mouvement de contestation, les lois que la Chambre veut voter ne reflètent ni ses aspirations ni les priorités de l’heure qui doivent être l’assainissement de l’appareil judiciaire. Les protestataires ainsi que des juristes accusent ces textes d’être entourés de "flou" et truffés de "pièges".

Dans ce contexte, après le report de la séance et la décision de considérer comme valide le mandat actuel des commissions parlementaires afin qu'elles puissent poursuivre leur travail, des informations ont circulé sur les réseaux sociaux faisant état de la possibilité que la séance législative pour adopter les lois rejetées par la rue se tienne quand même à 14h cet après-midi. "Pas de séance prévue cet après-midi, a tranché l'attachée de presse du Parlement, contactée par L'OLJ. Tous les députés sont partis, même le chef du Législatif Nabih Berry est revenu à Aïn el-Tiné".

Si les manifestants anti-pouvoir ont célébré le report de la séance dans la journée, dans la banlieue sud, fief du Hezbollah, des protestataires ont bloqué en soirée l'autoroute Hadi Nasrallah pour réclamer une amnistie générale. La loi d’amnistie devrait notamment servir à annuler les mandats d’arrêt dont font l’objet plus de 42 000 repris de justice, des chiites en grande majorité, amnistier des détenus sunnites qui avaient combattu l'armée libanaise au Liban-Nord, ainsi que d'autres prisonniers liés à des affaires de drogue. Les crimes concernés pour ce dernier cas incluent "la consommation de drogue, la facilitation de sa consommation, son obtention, ou encore sa distribution". Toujours dans ce domaine, la loi prévoit d'amnistier "la culture de plantes illicites", en référence notamment à celle du cannabis, largement répandue dans la vallée de la Békaa.



(Lire aussi : Les zones grises et inquiétantes de la proposition de loi d’amnistie)


"Aucune intention de tenir les séances législatives ailleurs"
Outre le président du Parlement, seuls quelques députés avaient pu arriver dans la matinée à la place de l’Étoile, notamment le ministre sortant des Finances et député Ali Hassan Khalil (Amal), Ali Ammar, membre du Hezbollah, ainsi que le député Ibrahim Kanaan, membre du Courant patriotique libre. Ce dernier a toutefois démenti ces informations de l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), affirmant ne pas s'être rendu au siège du Parlement.

Ali Hassan Khalil, également conseiller de M. Berry, a commenté le report de la séance et les décisions du bureau du Parlement. "Ce qui s'est passé aujourd'hui est basée sur une jurisprudence d'Edmond Rabbath et qui consiste à ce que le travail des institutions se poursuive dans les circonstances de forces majeures qui empêchent le renouvellement du mandat de ses membres. Ceci ne constitue pas un précédent et a déjà eu lieu en 1976 et 1989. Le critère constitutionnel pris en compte est fondé sur les circonstances exceptionnelles", a-t-il affirmé. "Ce qui compte c'est que ces commissions reprennent leur travail en ayant pour priorité l'étude du projet de budget de 2020", a-t-il ajouté. Et de conclure : "Il n'y a aucune intention de tenir les séances législatives ailleurs, et nous comprenons le mouvement contestataire".

Le Parlement doit encore adopter le budget approuvé le mois dernier par le gouvernement sortant de Saad Hariri, au moment où les bailleurs de fonds internationaux du Liban pressent Beyrouth de voter ce texte sans plus tarder pour mettre en place les réformes nécessaires pour redresser la situation économique et financière du pays en crise.

Le député Anouar el-Khalil, membre du groupe parlementaire Amal, dirigé par M. Berry, a de son côté affirmé que ce dernier était "conscient des doléances de la rue". "Le président Berry est conscient des doléances du peuple, et la tenue de la séance législative avait pour but d'y répondre", a affirmé le député de Hasbaya à notre journaliste sur place Yara Abi-Akl. "La loi sur l'amnistie générale est incomplète et requiert davantage d'étude, a fait savoir le président Berry, et si la séance avait eu lieu, le texte aurait pu être envoyé en commission pour un examen approfondi", a ajouté le député.


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commentaires (9)

Victoire ou vide législatif! il faudra vite oeuvrer pour sortir de ce cercle vicieux .

Antoine Sabbagha

19 h 33, le 19 novembre 2019

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Commentaires (9)

  • Victoire ou vide législatif! il faudra vite oeuvrer pour sortir de ce cercle vicieux .

    Antoine Sabbagha

    19 h 33, le 19 novembre 2019

  • Outre le président du Parlement, Nabih Berry, seuls quelques députés avaient pu arriver à la place de l’Étoile, notamment le ministre sortant des Finances et député Ali Hassan Khalil (Amal), Ali Ammar, membre du Hezbollah, ainsi que le député Ibrahim Kanaan, membre du Courant patriotique libre. VOILA CE QUI RESTE A CONVAINCRE QUE LE PEUPLE A RAISON AMAL HEZBALLAH CPL LEAS AUTRES ONT COMPRIS LE PEUPLE UN EFFORT MESSIEURS COMPRENER LE PEUPLE ET SAUVER LE LIBAN AVEC UN MINISTERE FORNE DE SPECIALISTES SANS AUCUNE AFFILIATION A UN PARTI ET NON NOMMES PAR UN PARTI AVEC A SA TETE M HARRIRI QUI A LA CONFIANCE DE TOUS LES PAYS QUI VEULENT VENIR EN AIDE FINANCIEREMENT AU LIBAN ARRETTER DE PERDRE DU TEMPS MR LE PRESIENT AOUN ET FAITES VOTRE DEVOIR SANS ECOUTER VOTRE GENDRE: ANNONCER IMMEDIATEMENT DES CONSULTATIONS PARLEMENTAIRES POUR DESIGNER UN PREMEIR MINISTRE. TOUT RETARD INCOMBERA A VOUS UNIQUEMENT ET A PERSONNE D'AUTRE AGISSEZ BON DIEU CA SUFFIT COMME CELA

    LA VERITE

    16 h 06, le 19 novembre 2019

  • UNE AUTRE VICTOIRE DE LA CONTESTATION. IL NE FAUT PAS LACHER PRISE JUSQU,A L,ACCOMPLISSEMENT DES REVENDICATIONS DU PEUPLE,

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 31, le 19 novembre 2019

  • Bravo a tous ceux qui ont contribué a l'échec du viol de notre pays. Rien ne se fera de force. On a dit non c'est non. Leurs parents n'ont pas du leur inculquer le respect du refus.

    Sissi zayyat

    13 h 52, le 19 novembre 2019

  • Une belle relance du soulèvement et un nouveau souffle, bravo !

    Shou fi

    13 h 14, le 19 novembre 2019

  • Il faut l’annuler !, la retirer !, et pas de « sine dine »...on a gagné un petite Bataille, c’est tout! On est loins de la victoire Lachons pas, lachons rien!

    Jack Gardner

    12 h 14, le 19 novembre 2019

  • Excellent ! Encore une victoire de la révolution. Le pouvoir devrait commencer à comprendre qu'il doit céder et former un gouvernement formé de ministres compétents, honnêtes et indépendants.

    Yves Prevost

    11 h 23, le 19 novembre 2019

  • Bravo bravo bravo !!!

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 22, le 19 novembre 2019

  • La volonté du peuple, libre, est plus forte que les arrangements des hommes politiques qui vivent leurs derniers moments. Honte à ces députés, intéressés et adhérents à des clans qui favorisent leur élection, le peuple n'oubliera pas.

    Citoyen

    11 h 17, le 19 novembre 2019

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