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À La Une - Liban

Crise gouvernementale : mises en garde contre une "dégradation" de la situation socio-économique

Le prochain cabinet sera chargé de mettre en œuvre la feuille de route économique annoncée par le gouvernement sortant, affirme Aoun.

Le président libanais, Michel Aoun (d.), recevant le chef de la délégation de l'Union européenne au Liban, Ralph Tarraf, à Baabda, le 8 novembre 2019. Photo Dalati et NOhra

Alors que la situation politique est au point-mort au Liban, les tractations pour la formation d'un nouveau gouvernement n'ayant enregistré aucune percée, au 23e jour d'un soulèvement populaire inédit contre la classe dirigeante, plusieurs responsables locaux et internationaux ont mis en garde vendredi contre une "dégradation" de la situation socio-économique dans le pays.

Depuis le 17 octobre, le Liban connaît une contestation populaire de sa classe dirigeante jugée corrompue et incompétente, sur fond de grave crise économique. Le mouvement, qui a mobilisé des centaines de milliers de Libanais toutes communautés confondues, a entraîné la démission le 29 octobre de Saad Hariri, mais la formation d'un nouveau gouvernement se fait attendre. En effet, la présidence n'a toujours pas lancé les consultations parlementaires contraignantes pour la nomination d'un nouveau président du Conseil, arguant des "conditions exceptionnelles" que traversent le pays et de la nécessité de préparer au préalable une "formule" pour la mise sur pied du futur cabinet.

Dans ce contexte, le président a affirmé vendredi que le prochain cabinet sera chargé de mettre en œuvre la feuille de route économique annoncée par le gouvernement sortant de Saad Hariri, avant la démission de ce dernier. "Le Parlement va examiner les projets de loi de réformes, et le prochain gouvernement va travailler à mettre en œuvre la feuille de route économique du gouvernement démissionnaire", a déclaré le chef de l'Etat, selon le compte Twitter de la présidence.



(Lire aussi : Pourquoi la classe dirigeante libanaise craint un cabinet d’indépendants)



"D'ici une semaine"
En attendant, la Banque mondiale, qui avait estimé mercredi que "la formation rapide d'un gouvernement correspondant aux attentes de tous les libanais" devenait plus qu'urgente, a réitéré ses mises en garde, exhortant les dirigeants libanais à mettre ce cabinet sur pied "d'ici une semaine". Selon le directeur régional pour le Moyen-Orient de la Banque mondiale, Saroj Kumar Jha, cette étape est essentielle pour éviter que la situation économique et la confiance en la stabilité du pays "ne se dégrade davantage". Plus tôt cette semaine, à l'issue d'une réunion à Baabda, il avait averti qu'en cas d'impasse persistante, la moitié de la population libanaise pourrait sombrer dans la pauvreté et le chômage "augmenter fortement", a averti l'institution. Environ un tiers des libanais vit déjà sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale.

Même son de cloche du côté du chef des Forces libanaises, Samir Geagea, qui a affirmé craindre "des troubles sociaux" en cas de pénurie des biens de première nécessité dans le pays, accusant les responsables politiques d'être "sur une autre planète". "Toutes les heures, on nous annonce qu'une crise arrive, qu'il s'agisse des pénuries de pétrole, de farine ou de médicaments, a lancé le leader maronite. Tout s'effondre et les responsables sont sur une autre planète et prennent leur temps" pour former un futur gouvernement. "La seule façon de sortir de la crise est de former un nouveau gouvernement indépendant des formations politiques, comme cela est réclamé par les manifestants", a-t-il estimé, critiquant le fait que les dernières tractations "n'ont donné aucun résultat". Il a dans ce cadre accusé le Hezbollah de vouloir former un gouvernement "qui ressemble au cabinet sortant". Soulignant que la situation économique du pays est "très délicate", Samir Geagea a dit craindre que les crédits nécessaires, en dollars, pour l'achat du carburant ou de tout autre produit importé ne soient pas alloués à temps, "ce qui risque de provoquer de graves troubles sociaux".


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Entretien Salamé-Hariri
Plus tôt dans la journée, le président du syndicat des hôpitaux libanais privés, Sleiman Haroun, avait prévenu qu'une "crise sanitaire majeure" se profilait en raison de l'impossibilité de payer les fournisseurs de médicaments et d'équipements médicaux, affirmant que les stocks disponibles seront épuisés dans un mois. Cette mise en garde intervient alors que depuis quelques mois, le secteur bancaire a restreint la circulation du dollar sur le marché libanais afin d'éviter une pénurie.

Dans ce contexte de crise économique rampante, le Premier ministre sortant s'est entretenu vendredi avec le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, selon des informations de la chaîne locale LBCI. Aucune information supplémentaire sur cet entretien n'était toutefois disponible pour le moment.

L’économie libanaise est dollarisée et le taux de change entre la livre et le dollar est fixé par la Banque du Liban (BDL) depuis 1997 (1 507,5 livres pour un dollar). Mais les récentes pressions sur la stabilité financière du pays contraignent la banque centrale à limiter la circulation de devises sur le marché pour notamment maintenir le niveau de ses réserves et la croissance des dépôts bancaires, et ainsi être capable de continuer à gérer l’endettement public, la dollarisation de l’économie et le taux de change fixe. Plusieurs banques ont, dans ce contexte, limité les plafonds et conditions de retraits de billets verts, que ce soit via les distributeurs automatiques de billets ou les guichets, s’il s’agit de comptes en livres ou de comptes bloqués en dollars. Cette situation est donc problématique pour les importateurs de carburants, de médicaments et de farine, qui doivent payer leurs biens en dollars mais dont les recettes sont majoritairement en livres libanaises. 



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