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À La Une - Liban

Manifestations : Hariri donne 72 heures à ses partenaires au gouvernement

Les manifestations ont été émaillées d'incidents, notamment dans les rues de Beyrouth et Tripoli

Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, s'exprimant du Grand Sérail, à Beyrouth, le 18 octobre 2019, alors que les Libanais sont dans la rue pour la deuxième journée consécutive. Photo REUTERS/Mohamed Azakir

Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, a annoncé vendredi dans une allocution aux Libanais qu'il se donnait et donnait à ses partenaires au sein du gouvernement un délai de trois jours avant de prendre une décision au sujet d'une éventuelle démission.

"Je me donne un très court délai : soit nos partenaires au sein du gouvernement donnent des réponses claires et définitives qui nous convainquent et convainquent ceux qui manifestent dans la rue ainsi que la communauté internationale, qu’il y a une décision de s’engager dans la réforme et d’arrêter le gaspillage et la corruption, soit j'agirai de manière différente (...) Ce délai est de 72h", a déclaré M. Hariri à l'issue d'une réunion avec le chef de l'Etat, Michel Aoun.

Il a par ailleurs insinué qu'il n'avait aucun problème à céder sa place à la tête du gouvernement à quiconque proposerait une autre solution.

M. Hariri a en outre affiché son soutien aux Libanais "dont les souffrances sont réelles", soulignant être en faveur de "tout mouvement pacifique". "Certains disent peut-être qu'il y a des influences extérieures qui attisent les tensions et la crise. Mais cela n'empêche pas que depuis hier, ce sont les véritables souffrances du peuple qu'on entend dans la rue", a-t-il souligné. "Les Libanais attendaient du travail sérieux de la part des responsables, mais ces derniers ne leur ont fourni que des oppositions et querelles politiques", a regretté le Premier ministre. "Au lieu de nous concentrer sur la réduction du déficit et sur les réformes, nous avons préféré régler nos comptes, sur les scènes intérieure et extérieure". "Depuis le lancement du mouvement de protestation, je commence à voir les choses avec un regard neuf. Les gens nous ont envoyé un message alors que nous aurions dû, nous, leur en envoyer un", a déclaré Saad Hariri.

Il a dans ce cadre accusé des membres de sa coalition gouvernementale, qu'il n'a pas nommés, d'entraver ses efforts pour aller de l'avant avec les réformes. "Cela fait des mois que nous attendons que nos partenaires au gouvernement avancent dans le sens de la solution sur laquelle nous nous sommes tous mis d'accord mais ils ont tout fait pour tergiverser", a-t-il accusé.



(Reportage : Chrétiens, musulmans, laïcs... à Beyrouth, un seul cri : Il faut qu’ils partent)



"Changer toutes les lois"
Insistant sur l'importance de mettre sur pied ces réformes, il a souligné que cela ne signifiait pas spécialement l'imposition de taxes. "Des réformes, cela signifie qu'il faut changer toutes les lois sur base desquelles fonctionne le pays depuis des dizaines d'années", a-t-il précisé. 

A la fin de son discours, Saad Hariri a lancé sur son compte Twitter le mot-clé #72heures

Le gouvernement, qui planche sur le budget depuis mi-septembre, avait entamé lundi l’examen des recommandations du comité interministériel chargé d’étudier les propositions de réformes suggérées par les différents partis politiques. Alors que le gouvernement souhaitait respecter les délais constitutionnels en adoptant le projet de budget avant le début de la session ordinaire du Parlement, l’absence de consensus sur l’ensemble des mesures-clés laisse penser que cet objectif ne sera pas tenu. Parmi les mesures problématiques se trouvent la hausse de la TVA à 15 %, le gel des augmentations de salaires des fonctionnaires durant trois ans, la hausse des cotisations de retraite, l’unification des caisses d’allocations sociales, la suppression d’un certain nombre d’établissements publics, la privatisation d’une dizaine d’entreprises publiques. La question de la hausse des tarifs d’Électricité du Liban n’a pas non plus été tranchée par l’exécutif. Le budget 2020 et les réformes qu'il est supposé contenir sont très attendus par les agences de notation internationale et les pays donateurs de la CEDRE, qui s'était tenue à Paris, en avril dernier.


Les Libanais sont dans la rue pour la deuxième journée consécutive, sur l'ensemble du territoire libanais, pour exprimer leur colère contre la crise économique et la classe politique. Les manifestations de vendredi ont été émaillés de violences et d'échauffourées qui ont fait plusieurs blessés, notamment à Beyrouth et à Tripoli, au Liban-Nord.

L'ONU, a appelé dans ce contexte "toutes les parties à s'abstenir d'activités pouvant conduire à augmenter les tensions ou les violences" au Liban, secoué depuis deux jours par des manifestations contre la corruption et des conditions de vie difficiles, a indiqué son porte-parole. "Les Nations unies continuent de travailler avec le gouvernement du Liban et les partenaires internationaux afin d'aider à affronter les défis auxquels fait face le Liban, y compris sa situation économique", a ajouté Stéphane Dujarric lors de son point-presse quotidien.



(Lire aussi : Qu'ils partent, d’accord... Mais après ?L'analyse d'Elie Fayad)



"Pas une minute de plus"
"Hariri veut 72 heures, alors nous allons rester ici 72 heures", déclarait un manifestant. "Hariri veut 72 heures, mais que compte-t-il faire en 72 heures. On lui a donné 15 ans, depuis 2005, mais qu'a-t-il fait?", déclarait Fares, étudiant à l'AUB, en réaction au discours du président du Conseil.
Hicham, quant à lui, assurait qu'il ne comptait pas donner une minute de plus au Premier ministre et à son gouvernement.

Les responsables ont également commenté le discours de Saad Hariri.
Des sources au palais de Baabda, citées par les médias locaux, ont affirmé que le président Michel Aoun a écouté le discours de M. Hariri et poursuivra ses contacts conformément à la feuille de route économique discutée à la réunion de Baabda. Des sources proches du Courant patriotique libre ont de leur côté rapporté qu'à la fin de son discours, M. Hariri a reçu un message de Gebran Bassil lui disant : "il n'est pas nécessaire d'attendre 72 heures, commençons tout de suite".
Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, s'est pour sa part dit "totalement d'accord avec la façon dont Saad Hariri a décrit la situation politique actuelle". "Depuis le début, le problème réside dans le fait que les pratiques politiques sont erronées et ne respectent pas la logique de l'Etat et les intérêts du peuple libanais", a affirmé M. Geagea, dans un communiqué. Il a dans ce cadre appelé à "profiter de la dynamique populaire actuelle pour lancer une transition efficace, qui se matérialise dans la mise sur pied d'un nouveau gouvernement, éloigné de la classe politique actuelle, afin de lancer la renaissance économique".


En tout début d'après-midi, le Conseil des ministres, qui était prévu à 14 heures au palais présidentiel de Baabda, avait été officiellement annulé. La décision d'annuler la tenue du Conseil des ministres a été prise par M. Hariri, en concertation avec le chef de l’État, Michel Aoun.

Dans la journée, les alliés traditionnels de M. Hariri, à savoir le Parti socialiste progressiste du leader druze Walid Joumblatt et les Forces libanaises de Samir Geagea, avaient appelé à la démission du cabinet. Selon un responsable du PSP joint par L'Orient-Le Jour, M. Joumblatt penche pour une démission du gouvernement, ajoutant que cette décision revient au chef du gouvernement, au lendemain de l'appel en ce sens lancé par le leader druze. De leur côté, les anciens Premiers ministres ont appelé à ne pas faire porter au seul Saad Hariri la responsabilité de la crise.

Pour sa part, le chef de la diplomatie, Gebran Bassil, a fait un premier commentaire sur les manifestations, prévenant que "l'alternative au gouvernement actuel pourrait être le chaos dans la rue, et même la discorde". Il a en outre réitéré ses accusations contre "certaines formations politiques qui veulent provoquer une guerre économique et la chute du pouvoir en place".



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Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, a annoncé vendredi dans une allocution aux Libanais qu'il se donnait et donnait à ses partenaires au sein du gouvernement un délai de trois jours avant de prendre une décision au sujet d'une éventuelle démission."Je me donne un très court délai : soit nos partenaires au sein du gouvernement donnent des réponses claires et définitives qui nous...

commentaires (6)

Se donner quelques jours pour se fixer sur une éventuelle démission du gouvernement alors que le peuple est dans la rue et réclame le départ de celui-ci ... Est-ce raisonnable ? Quoi qu'il en soit, je suis si triste pour mon pays. Trop d'erreurs ont été commises... Trop de confiance ont été accordé à quelques personnes qui ne faisaient qu'à semer la discorde.... Dans le pays. On est arrivé à une situation critique... Que Dieu bénisse notre pays et la raison triomphe

Sarkis Serge Tateossian

21 h 17, le 18 octobre 2019

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Commentaires (6)

  • Se donner quelques jours pour se fixer sur une éventuelle démission du gouvernement alors que le peuple est dans la rue et réclame le départ de celui-ci ... Est-ce raisonnable ? Quoi qu'il en soit, je suis si triste pour mon pays. Trop d'erreurs ont été commises... Trop de confiance ont été accordé à quelques personnes qui ne faisaient qu'à semer la discorde.... Dans le pays. On est arrivé à une situation critique... Que Dieu bénisse notre pays et la raison triomphe

    Sarkis Serge Tateossian

    21 h 17, le 18 octobre 2019

  • Je suis pour la démission immédiate du gouvernement actuel et la formation d'un nouveau gouvernement de salut public par Saad Hariri qui serait composé de nouveaux ministres, tous de nouveaux ministres sans aucune exception.

    Un Libanais

    20 h 46, le 18 octobre 2019

  • La classe politique actuelle n'arrivera pas à se régénérer seule. Il faut un acteur qui lui soit exterieur, qui servira de catalyseur à l'avènement d'une nouvelle génération politique, à l'instar d'Emmanuel Macron et de la République en Marche en France. Il y a des libanais ayant la competence, le charisme et l'envergure pour concevoir puis mener une telle dynamique de redressement : pourquoi ne pas mandater quelqu'un comme Carlos Ghosn pour conduire un tel plan ?

    Saab Ines

    20 h 29, le 18 octobre 2019

  • Qu'attend donc le gouvernement pour décréter l'ETAT D'URGENCE illico presto , afin de réouvrir les routes bloquées , et disperser ces manifestants ? Ce n'est vraiment pas le moment de faire du grabuge , la région autour de nous passe une période volcanique , il faidrait que nous sachions patienter !

    Chucri Abboud

    20 h 11, le 18 octobre 2019

  • BIEN FAIT. QU,ILS ARRETENT LES TERGIVERSATIONS ET LES BATONS DANS LES ROUES ET BOYCOTTAGES OU QU,ILS DEGAGENT EN MASSE TOUS ENSEMBLE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 11, le 18 octobre 2019

  • Le peuple n'est pas contre les réformes. Il est contre les 40 voleurs qui vous entourent.... Ali baba.... Ne vous trompez pas d'analyses.... Si vous êtes sérieux... Et vous voulez donner l'exemple, osez arrêter quelques uns des voleurs... Vous les connaissez tous....recuperez une partie de leur fortune.... Et puis augmentez la tva... Là d'accord. Mais augmentez les impôts pour enrichir les voleurs.... C'est aussi simple....

    HIJAZI ABDULRAHIM

    20 h 01, le 18 octobre 2019

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