Quels sont les éléments qui vous permettent d’affirmer que la BDL n’intervient plus sur le marché des changes ?
Depuis 1994, il n’y a pas eu de manque en liquidités, que ce soit en dollar ou en livre libanaise, et ce grâce aux interventions quotidiennes de la Banque du Liban sur le marché, via l’achat de dollars lorsque la demande du billet vert baisse (empêchant ainsi que le cours du change ne tombe en dessous de 1507,50 livres), ou via la vente de dollars lorsque la demande pour cette devise augmente. Avec des réserves supérieures à 30 milliards de dollars à la BDL et un manque visible de dollars sur le marché, il est clair que la Banque centrale n’intervient pas sur le marché. Cela n’est pas difficile à déduire dans un régime de taux de change fixe.
Selon vous, depuis quand la BDL a-t-elle cessé d’intervenir ? Et pourquoi ?
La BDL a limité ses interventions graduellement depuis le début de l’année. Depuis le début de l’été, elle n’intervient pas assez pour protéger la livre libanaise. Les raisons sont à la fois économiques (baisse des entrées des capitaux et déficit commercial) et politiques.
Pensez-vous que la BDL n’a pas le choix, malgré ses réserves élevées en devises ? Ou considérez-vous qu’il s’agit d’une décision délibérée qui s’inscrit dans une stratégie plus large ?
La BDL a toujours le choix. Du moment où son objectif principal est de préserver la parité de change de la livre contre le dollar, elle devrait intervenir sur le marché.
(Lire aussi : Change livre / dollar : une fin de semaine fébrile)
Quels sont les scénarios envisageables, selon vous, pour la situation de la livre ?
À l’heure actuelle, le flottement de la monnaie risque de déstabiliser l’équilibre économique et de fragiliser le tissu social. Il faut préserver le régime de change fixe jusqu’à ce que les exportations couvrent au moins la moitié de nos importations. Entre-temps, un régime de caisse d’émission (currency board) peut être envisagé. On établit une caisse d’émission lorsque l’on veut préserver la monnaie nationale, tout en s’assurant que sa valeur soit arrimée à celle d’une autre monnaie qui sert seule aux règlements internationaux. La monnaie nationale sera émise au fur et à mesure de l’entrée de la monnaie de référence. En cas de sortie de la devise de référence, la masse monétaire se contracte d’autant.
La BDL a-t-elle les moyens, selon vous, de répondre à tous les besoins de financement en dollar de l’économie (importations, remboursement d’eurobonds, marché des changes...) ?
La solution au problème n’est pas monétaire, mais budgétaire : réduction du déficit, stabilisation de la dette par rapport au revenu national, lancement de projets créateurs de valeur ajoutée et de croissance... La politique monétaire doit se concentrer uniquement sur la stabilité de change et sur la protection des banques. Tout autre rôle ne lui incombe pas.
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LA BDL INTERVIENT. SINON LA LIVRE FLOTTERAIT.
17 h 23, le 28 septembre 2019