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Économie - CEDRE

Cedre : Duquesne esquisse un calendrier pour aller plus vite

Le diplomate français a conseillé aux dirigeants libanais de ne pas repousser la hausse des tarifs de l’électricité pour entretenir la confiance des donateurs.

Vue aérienne d’une partie du centre-ville de Beyrouth. Jamal Saïdi/Reuters

À Beyrouth depuis lundi soir, le diplomate français chargé de la mise en œuvre des résolutions de la conférence de Paris d’avril 2018 (la CEDRE), Pierre Duquesne, a livré hier à Beyrouth ses impressions, à l’issue de sa tournée menée dans le cadre de sa mission. Un exercice au cours duquel il a rencontré « une trentaine » de hauts responsables libanais ainsi que des représentants des banques, des entrepreneurs, de la société civile et enfin des donateurs engagés dans le processus.

Ces derniers se sont engagés lors de la CEDRE à débloquer 11,6 milliards de dollars en prêts et dons devant financer des projets d’infrastructures inclus dans le Capital Investment Plan (CIP) préparé par le gouvernement. Des fonds qui ne seront déboursés que si le pays, très endetté et mal géré, lance d’importantes réformes structurelles. Or les dirigeants libanais ont accumulé les retards depuis la CEDRE, laissant craindre une remise en question des engagements financiers formulés.

« Toute ce que j’ai pu entendre, c’est la volonté des (responsables) d’aller plus vite que lors de ces sept derniers mois », a résumé M. Duquesne aux journalistes présents à la conférence de presse organisée à l’Institut français juste avant son départ. Il a en outre répété que « le processus CEDRE (était) toujours valable », comme il l’a fait à plusieurs reprises ces derniers jours. « Il est vrai que le scepticisme des donateurs a augmenté ces derniers mois, mais ils restent prêts à aider pour peu que les choses avancent bien côté libanais », a détaillé le diplomate.

M. Duquesne a de plus précisé que les fonds n’avaient pas commencé à être déboursés et que, malgré le fait qu’aucune date n’avait été fixée, le vote d’un budget pour 2020, qui réponde aux objectifs fixés pour redresser le pays, pourrait servir de point de départ à un déblocage progressif de l’enveloppe en vue de commencer à financer les projets les plus prioritaires.



(Lire aussi : « La CEDRE tient toujours », assure Pierre Duquesne à Beyrouth)



Urgence admise
Au cours de son intervention, M. Duquesne a d’abord fait référence à la réunion convoquée lundi par le président Aoun à Baabda et au cours de laquelle les représentants de l’ensemble du spectre politique libanais ont décrété « l’état d’urgence » économique. « L’urgence de la situation économique et financière est aujourd’hui admise et comprise (…) Cet accord aurait pu intervenir plus tôt, mais il reste important », s’est-il félicité. Il a en outre une nouvelle fois rappelé que son arrivée au Liban le jour même de la réunion, à laquelle il n’a pas participé, n’était qu’une coïncidence.

M. Duquesne a néanmoins regretté que la possibilité que le Liban puisse bientôt confirmer le potentiel de sa zone économique exclusive (ZEE) en matière d’hydrocarbures offshore puisse encore être considérée comme une « solution miracle » par certains acteurs. Le Liban a octroyé en 2018 ses premières licences d’exploration et de production pour deux blocs sur les dix que compte sa ZEE (n° 4, centre-est, et n° 9, sud-est) au consortium Total-ENI-Novatek. Les premiers travaux de forage dans le bloc 4 doivent démarrer d’ici à fin 2019, mais le pays a d’ores et déjà lancé un deuxième round, mettant cette fois cinq blocs en jeu.

Le diplomate a ensuite exhorté les dirigeants libanais à lancer sans attendre les réformes nécessaires pour rééquilibrer les finances publiques, restructurer l’économie et remettre le secteur de l’électricité sur pied. « Je conçois qu’il puisse y avoir des différences légitimes entre les politiques sur la combinaison des mesures à adopter (…) Mais le temps presse et on ne peut pas débattre à l’infini », a-t-il notamment jugé. Sur ce sujet, le diplomate a notamment insisté sur l’adoption d’un budget pour 2020 dans les délais constitutionnels, donc avant son année d’exécution, qui aille plus loin que la loi de finances de 2019, votée le 19 juillet, en matière de réformes et de mesures visant à réduire le déficit public de façon durable.



(Lire aussi : Duquesne rencontre Hariri et d’autres responsables libanais)



Fiscalité à revoir
Cet objectif fixé lors de la CEDRE – une baisse du ratio dette/PIB d’un point par an pendant cinq ans – pourra être rattrapé par les dirigeants, à condition de poursuivre la baisse des dépenses publiques entamées cette année et « où se concentre l’essentiel de l’effort », mais aussi une hausse de la fiscalité, à travers des mesures pouvant être douloureuses. « Le niveau d’imposition (au Liban) n’est pas encore ce qu’il devrait être », a notamment jugé M. Duquesne, avant de suggérer de se focaliser sur les « recettes de poche », à savoir augmenter la fiscalité sur les produits, services et secteurs « qui ne sont pas énormément taxés, comme les cigarettes ».

Cette piste ainsi que celle proposant une hausse de la TVA à 15 % sur certains produits ont déjà été mises sur la table lors de la réunion de lundi, sans être pour le moment approuvées. « Le taux de prélèvement obligatoire par rapport au PIB libanais doit être légèrement supérieur à 11 %. Je ne dis pas qu’il faut appliquer le modèle français, où il atteint (près de) 50 %, mais la marge de manœuvre existe entre ces deux seuils », a encore expliqué M. Duquesne. Une vision qui risque d’être difficilement acceptée par une partie de la population qui s’était mobilisée pendant les réunions dédiées à l’élaboration du budget pour 2019 pour protester contre les mesures d’austérité promises par les dirigeants libanais. M. Duquesne affirme néanmoins avoir été informé par ses interlocuteurs libanais que plusieurs autres chantiers de réforme (marchés publics, lutte contre l’évasion fiscale, suppression de niches fiscales) étaient dans les tuyaux.

Le diplomate a de plus exhorté les dirigeants à ne pas repousser la hausse des tarifs de l’électricité, qui sont subventionnés depuis un quart de siècle. Le plan de réforme pour l’électricité a été adopté au printemps par l’exécutif et l’un de ses volets programme cette hausse à partir du début de 2020, de manière progressive et parallèlement à l’augmentation de la production, qui est également prévue. « Il faut tenir cet engagement pour maintenir la confiance (…) Il ne s’agit pas de rattraper toute la stagnation depuis 1994, (…) mais de faire un geste », a-t-il insisté. M. Duquesne est en outre revenu sur l’importance de la création d’une autorité de régulation indépendante pour le secteur. « Nous évoluons dans une économie moderne : il faut donc une régulation moderne et indépendante », a-t-il martelé. Or le plan de réforme du secteur de l’électricité a été adopté sans que ne soit réglée la question de sa création, pourtant déjà prévue par une loi (n° 462/2002).


Stabilité de la livre
Interrogé sur l’évolution des deux mécanismes de suivi institués lors de la CEDRE et qui doivent encore être formés – un premier domicilié à Beyrouth et centré sur l’exécution des projets ; un second plus large hébergé à l’étranger et dédié à la coordination –, M. Duquesne a affirmé qu’ils « avançaient bien », sans donner d’échéance. « Pour le site internet dédié (qui doit rassembler toutes les données des projets de la CEDRE, NDLR), ça tarde un peu, alors qu’il n’y a pas de difficulté particulière », a-t-il néanmoins noté.

M. Duquesne a enfin, à la demande d’un journaliste, partagé son opinion concernant le maintien de la parité fixe de la livre libanaise par rapport au dollar, en vigueur depuis 1997 : « J’ai eu le bonheur de travailler à la direction du Trésor en France (…) et j’ai vécu une des plus grandes crises de change en 1992 (…) J’ai donc appris à être d’une extrême prudence. Ce que je peux vous dire, c’est que je pense qu’une parité fixe présente plus d’avantages que d’inconvénients. » Dans un entretien livré au cours de la semaine à la chaîne américaine CNBC, le Premier ministre, Saad Hariri, avait indiqué que l’une des raisons qui avaient convaincu les dirigeants libanais de ne pas faire appel à l’aide du Fonds monétaire international était le fait que ses experts préconisaient de laisser la livre flotter.



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À Beyrouth depuis lundi soir, le diplomate français chargé de la mise en œuvre des résolutions de la conférence de Paris d’avril 2018 (la CEDRE), Pierre Duquesne, a livré hier à Beyrouth ses impressions, à l’issue de sa tournée menée dans le cadre de sa mission. Un exercice au cours duquel il a rencontré « une trentaine » de hauts responsables libanais ainsi que des...

commentaires (6)

Vous croyez vraiment que ca va marcher? Mais qui va investir dans un Pays a la botte du Hezbollah qui risque de declencher une guerre? Qui va mettre des fonds pour des investissements qui seront aneantis des le debut des hostilites? Allons donc, tant que la menace du Hezb, couvert par le President fort existera, rien ne se pssera.

IMB a SPO

15 h 01, le 06 septembre 2019

Tous les commentaires

Commentaires (6)

  • Vous croyez vraiment que ca va marcher? Mais qui va investir dans un Pays a la botte du Hezbollah qui risque de declencher une guerre? Qui va mettre des fonds pour des investissements qui seront aneantis des le debut des hostilites? Allons donc, tant que la menace du Hezb, couvert par le President fort existera, rien ne se pssera.

    IMB a SPO

    15 h 01, le 06 septembre 2019

  • Voilà c'est c'la, donne des dates et aboule le fric, garde tes conseils . Le Liban mérite bien mieux que la Turquie qui vous fait chanter , au moins au Liban On a pas fricoté avec les bactéries wahabites que vous nous avez envoyé dans la région , on vous en a débarrassé.

    FRIK-A-FRAK

    13 h 33, le 06 septembre 2019

  • Deja beaucoup de critiques sur la declaration de Monsieur Duquesne, grand ami du Liban par ailleurs C'est ce que les politiciens savent tres bien faire eux qui ont perdu deux ans avant d'agir Des qu'on vous dit ce que vous devez faire pour avoir de l'argent , il y en a qui s'offusque., meme si une partie est un don non remboursable. Allez France et autres amis du Liban , laisser tomber CEDRES car de toutes facons nos dirigeans vous moudrerons dans la farine car leurs commissions pourraient ne pas avoir lieu s'il y a le controle que vous pensez devoir exercer

    LA VERITE

    13 h 27, le 06 septembre 2019

  • CHERE MAMAN LA FRANCE, QU'ADVIENDRAIT IL ALORS DE LA FAMEUSE FABLE DE J DELAFONTAINE , FABLE DONT ON A TIRE UN PROVERBE, ET QUEL PROVERBE :? RIEN NE SERT A COURIR..... IL FAUT PARTIR A POINT. ON AVAIT ESPERE PLUS VIVES ACTIONS/REACTIONS MEME/ INITIATIVES BCP PLUS RAPIDES DE NOS "JEUNES" RECRUES POLITICIENNES..... A L'EVIDENCE.... ERREUR MONUMENTALE.

    Gaby SIOUFI

    10 h 44, le 06 septembre 2019

  • UN CALENDRIER POUR ALLER PLUS VITE ! L,ABRUTISSEMENT SE MEUT A LA VITESSE DE LA TORTUE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 17, le 06 septembre 2019

  • Nous sommes persuadés que nos 30+3 lanternes nationales seront tout à coup capables d'appliquer les instructions de Duquesne ! Pour cela, nous allons les brancher sur des générateurs spéciaux pour lanternes déficientes... Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 52, le 06 septembre 2019

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