La police néo-zélandaise a averti que de nombreux corps n'avaient pas encore été formellement identifiés. Les délais nécessaires à l'enquête médico-légale ont aggravé la douleur des proches des victimes qui auraient voulu pouvoir enterrer leurs morts selon les rites musulmans en 24 heures.
Devant le Parlement réuni en session spéciale, la Première ministre a déclaré mardi que le suprémaciste blanc auteur du carnage de Christchurch, dans l'île du Sud, tomberait sous le coup de la loi "dans toute sa rigueur".
"Il sera sans nom"
Cinquante fidèles ont été tués vendredi à l'heure de la prière par un extrémiste australien qui a diffusé en direct les images de son attaque sur les réseaux sociaux et publié au préalable un "manifeste" raciste.
"Par cet acte terroriste, il recherchait beaucoup de choses, mais l'une d'elles était la notoriété", a dit Mme Ardern aux parlementaires rassemblés à Wellington, la capitale. "C'est pourquoi vous ne m'entendrez jamais prononcer son nom. C'est un terroriste. C'est un criminel. C'est un extrémiste. Mais quand je parlerai, il sera sans nom". "Je vous implore: prononcez les noms de ceux qui ne sont plus plutôt que celui de l'homme qui les a emportés".
Ce discours empreint d'émotion était porteur d'un message particulier à l'adresse de la communauté musulmane. Vêtue de noir, l'air solennel, la cheffe du gouvernement âgée de 38 ans a ouvert la séance par l'expression de bienvenue en arabe "salam aleykum" ("la paix soit avec vous").
"Vendredi, une semaine se sera écoulée depuis l'attaque. Les membres de la communauté musulmane se rassembleront pour la prière ce jour là. Reconnaissons alors leur douleur", a-t-elle dit.
Arrivée des familles
Elle a prononcé ce discours au moment où des dizaines de familles de victimes commençaient à arriver du monde entier à Christchurch en vue des funérailles. Celles-ci ont été repoussées devant les impératifs du processus d'identification et les nécessités des investigations médico-légales.
Cinquante autopsies ont été menées mais "seules 12 victimes ont été identifiées" formellement à ce stade, et "six parmi les victimes identifiées ont été rendues à leur famille", a indiqué la police, qui a promis mener à bien sa tâche aussi vite que possible.
Peter Elms, des services néo-zélandais de l'immigration, a déclaré que 65 visas avaient été délivrés pour l'instant pour les familles.
Javed Dadabhai, venu d'Auckland pour enterrer son cousin, a expliqué que les proches avaient été avertis par les autorités que "le processus serait très lent, très exhaustif". "Certaines familles ont été invitées à aller voir les leurs (...) ceux qui sont les plus faciles à reconnaître. Mais nous parlons de trois ou quatre familles", a-t-il dit à l'AFP. "La majorité des gens n'ont toujours pas eu l'occasion de voir leurs proches".
Selon une liste qui circule parmi les familles, les victimes étaient âgées de trois à 77 ans. Plusieurs étaient natives de la région mais d'autres étaient originaires de pays lointains comme l'Egypte ou la Jordanie.
(Lire aussi : Massacre de Christchurch : la Nouvelle Zélande va durcir la législation sur les armes)
Restitution des armes
Mohamed Safi, un réfugié afghan de 23 ans, dont le père Matiullah est mort à la mosquée Al-Nour, supplie les autorités de le laisser identifier son père. "Ils disent qu'ils font leur procédure. Mais quelle procédure? Pourquoi je ne sais pas ce que vous faites pour identifier le corps? Pourquoi ne suis-je pas contacté en tant que proche direct?"
Dans la foulée du carnage, Mme Ardern avait annoncé un durcissement de la législation sur les armes qui a permis au tueur d'acheter l'arsenal ayant servi à l'attaque, y compris des armes semi-automatiques.
Les Néo-Zélandais commencent déjà à répondre aux appels du gouvernement leur demandant de rendre leurs armes.
Pour John Hart, agriculteur du district de Masterton, dans l'île du Nord, "c'est un outil utile dans la ferme dans certaines circonstances mais mon confort ne l'emporte pas sur les risques. Nous n'avons pas besoin d'elles dans notre pays". Ce tweet lui a attiré une salve de messages hostiles, adressés à son compte Facebook, la plupart venant apparemment des Etats-Unis où le lobby des armes est puissant et virulent.
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