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À La Une - japon

Ghosn de nouveau inculpé, la tension monte entre Renault et Nissan

La comparution du Franco-Libano-Brésilien, qui risque en théorie jusqu'à 15 ans de prison, n'aura pas lieu avant des mois.

L'homme d'affaires franco-libano-brésilien Carlos Ghosn. Photo d'archive AFP / Miguel MEDINA

La tension est montée d'un cran vendredi entre Renault et Nissan, le groupe français évoquant "une campagne de déstabilisation" après des révélations visant une de ses dirigeantes, alors que Carlos Ghosn, bâtisseur de l'alliance automobile franco-japonaise, a fait l'objet de nouvelles inculpations qui prolongent sa détention au Japon.


Mouna Sepehri, proche de Carlos Ghosn et directrice déléguée à la présidence de Renault, a reçu près de 500.000 euros répartis sur plusieurs années en tant que membre du directoire de l'alliance Renault-Nissan, selon des documents consultés par l'AFP. Cette proche de Carlos Ghosn "est la seule des neuf administrateurs à avoir reçu une rémunération payée directement par la société Renault-Nissan BV (RNBV)", la holding néerlandaise chapeautant le partenariat entre les constructeurs automobiles français et japonais, a commenté une source proche du dossier.

Chez le constructeur français, on souligne qu' "il y a d'autres cadres de Renault et de Nissan qui, dans le cadre de missions spécifiques pour l'Alliance, touchent des indemnités de (sa) part". Le groupe au losange a dénoncé dans un communiqué une "mise en cause (...) qui s'insère dans une campagne de déstabilisation délibérément orchestrée". A Paris, une source évoque même une machination et des fuites orchestrées par un responsable de Nissan. Mme Sepehri, entrée chez Renault en 1996 à l'époque de l'ancien PDG, Louis Schweitzer, est "une des personnes à l'origine de l'Alliance, ce qui pourrait expliquer qu'elle soit dans la ligne de mire", estime cette source.

Parallèlement, l'étau judiciaire japonais s'est resserré autour de celui qui reste officiellement PDG de Renault. Le parquet de Tokyo a décidé vendredi de le poursuivre pour abus de confiance et pour avoir minoré ses revenus dans des rapports boursiers de Nissan entre 2015 et 2018.

Son bras droit, Greg Kelly, relâché sous caution le 25 décembre, a aussi été inculpé pour le deuxième motif, tout comme le constructeur d'automobiles nippon, en tant qu'entité morale ayant remis les documents incriminés. MM. Ghosn et Kelly ainsi que Nissan avaient déjà été mis en examen, le 10 décembre, pour avoir déclaré des rétributions amoindries sur les cinq années précédentes.

Les avocats de M. Ghosn ont déposé une demande de libération sous caution, mais cette requête a peu de chances d'aboutir. En cas de refus, il restera en prison au moins jusqu'au 10 mars. Le tribunal a en revanche autorisé, contre l'avis du parquet, les visites de sa famille, outre celles de ses avocats et du personnel consulaire de la France, du Liban et du Brésil, les trois pays dont il est citoyen.






Vers un procès
Le bureau du procureur a justifié les poursuites engagées par le faisceau de données accumulées: "nous pensons que les éléments dont nous disposons méritent une inculpation et un procès", a déclaré à la presse le procureur-adjoint, Shin Kukimoto. La comparution de M. Ghosn, qui risque en théorie jusqu'à 15 ans de prison, n'aura pas lieu avant des mois.

Selon le parquet, l'abus de confiance dont est accusé M. Ghosn est caractérisé par sa tentative de faire couvrir par Nissan "des pertes sur des investissements personnels" au moment de la crise financière d'octobre 2008. La somme incriminée s'élève à 1,85 milliard de yens (15 millions d'euros). Pour résoudre ce problème financier, il aurait obtenu qu'un milliardaire saoudien, Khaled Juffali, se porte garant et lui aurait ultérieurement versé de l'argent issu de la "réserve du PDG". C'était pour services réellement rendus envers Nissan, argue M. Ghosn.

Carlos Ghosn avait comparu mardi pour la première fois devant la justice : amaigri et menotté, il s'est dit "faussement accusé" et a nié les allégations. Depuis son arrestation le 19 novembre à Tokyo, qui a suscité une onde de choc dans le monde entier, le dirigeant de 64 ans se trouve dans un centre de détention du nord de la capitale. Il souffrait mercredi soir d'une forte fièvre, qui a contraint les enquêteurs à suspendre les interrogatoires. Mais elle était retombée vendredi, a indiqué son avocat, Motonari Otsuru. Son épouse Carole Ghosn, qui avait jusqu'ici gardé le silence, s'était inquiétée jeudi dans un communiqué de son état de santé, déplorant "de dures conditions de détention et un traitement injuste". "Nous sommes anxieux", a-t-elle ajouté.



(Lire aussi : Carlos Ghosn fiévreux, les auditions suspendues)



Malgré ces revers judiciaires, Renault a choisi de maintenir à sa tête le Franco-Libano-Brésilien, contrairement à ses partenaires japonais Nissan et Mitsubishi Motors qui se sont empressés de le révoquer de la présidence du conseil d'administration. Jeudi, l'état-major de la marque au losange s'est réuni pour faire le point sur l'audit interne lancé fin novembre par l'entreprise. Aucune fraude n'a été constatée sur la rémunération des principaux dirigeants en 2017-2018, selon l'entreprise.

Mais la pression monte sur la direction du groupe français alors que les révélations de presse sur les supposés agissements de M. Ghosn continuent de pleuvoir, au sujet de sa résidence fiscale aux Pays-Bas, où la holding qui coiffe l'alliance est basée, ou encore sur des donations à des hommes d'affaires au Liban, à Oman et ailleurs, depuis les caisses de Nissan.

L'enquête menée par Nissan continue également. Elle porte aussi sur différentes structures liées à l'alliance aux Pays-Bas. Nissan accuse ainsi entre autres M. Ghosn d'avoir perçu une rémunération sans justification d'un milliard de yens (8 millions d'euros) l'an dernier.

Des dizaines d'inspecteurs planchent sur le dossier et plusieurs centaines de personnes sont aussi mobilisées au sein du constructeur japonais.



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La tension est montée d'un cran vendredi entre Renault et Nissan, le groupe français évoquant "une campagne de déstabilisation" après des révélations visant une de ses dirigeantes, alors que Carlos Ghosn, bâtisseur de l'alliance automobile franco-japonaise, a fait l'objet de nouvelles inculpations qui prolongent sa détention au Japon.Mouna Sepehri, proche de Carlos Ghosn et directrice...

commentaires (9)

Les japonais ne peuvent plus reculer car si par hasard ils ont tord ils doivent payer beaucoup mais beaucoup d'argent pour ce qu' ils ont fait subir à Ghosn

Eleni Caridopoulou

22 h 07, le 11 janvier 2019

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Commentaires (9)

  • Les japonais ne peuvent plus reculer car si par hasard ils ont tord ils doivent payer beaucoup mais beaucoup d'argent pour ce qu' ils ont fait subir à Ghosn

    Eleni Caridopoulou

    22 h 07, le 11 janvier 2019

  • Un compte de Fée de transforme en cauchemar, sur fond de machination d'État mafieux... On s'achemine vers "le président du comité olympique japonais, Tsunekazu Takeda contre Carlos Ghosn"... À 2 ans des jeux olympiques de Tokyo. Donnant donnant !

    Sarkis Serge Tateossian

    20 h 38, le 11 janvier 2019

  • Frappé de stupeur plutôt!

    Tina Chamoun

    15 h 34, le 11 janvier 2019

  • Carlos Ghosn sera inculpé d'avoir respiré de l'air japonais...

    Un Libanais

    14 h 49, le 11 janvier 2019

  • ET LA REVANCHE DE L,ECHEC SUR LE SUCCES DES JAPS CONTINUE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 35, le 11 janvier 2019

  • J'en appelle à tous les libanais de la diaspora des amériques , d'Europe et d'Afrique de former un comité de soutien à Carlos Ghons , on ne peut pas laisser faire , c'est inhumain cette façon de traiter ceux qui ont par leur génie sauver ce qui les broie par la suite . Que font nos journalistes "star" de l'olj , toujours prompt à jeter l'opprobre sur nos politiques locaux , les traitant de tous les maux et manquements , et ne disant pas un mot sur ce qui est révoltant contre un de nos compatriotes qu'on cherche à incendier . Carlos est un monument indestructible , comme ceux pris par des révolutionnaires ou des guerres et laissés intacts pour les générations à venir . Je suis déçu que ces journalistes à la plume alerte sur ceux qui nous gouvernent, basé sur des principes de grandes valeurs , ne les font pas fait valoir pour cet homme unique, en voie de massacre gratuit . Finalement Carlos n'aura été qu'une pièce détachée d'un véhicule quelconque qu'on aura remplacé une fois utilisée . C'est rageant !

    FRIK-A-FRAK

    12 h 28, le 11 janvier 2019

  • L’inertie et le manque de protestations officielles de la France, de Renault et du Ministere de l’Economie francaise, le silence soudain de notre ministere des affaires etrangeres, face a cet etrange proces et abus de la dignite et des droits de l’homme sont pour le moins etonnants. Une campagne mediatique franco libana bresilienne denoncant ces abus de la part du gouvernement japonais dont les methodes dans ce cas precis ressemblent a celles des pays qui etaient derriere le rideau de fer ou a certains pays limitrophes pourrait peut etre obliger les japonais a devoiler une partie de ce plan machiavelique qui semble avoir l’aval de certaines puissances.

    Cadige William

    11 h 41, le 11 janvier 2019

  • Je ne sais pas du tout ce qu'a fait exactement M. Ghosn pour être inculpé, s'il l'est injustement ou non etc. Ce que je sais, c'est une seule chose: plus on est riche, et plus on devient insatiable! Il parait que la fortune de ce monsieur est évaluée à 120 millions de dollars! Que voulait-il de plus? Eh bien! Devenir milliardaire... Et regardez dans quel état il est maintenant!

    Georges MELKI

    09 h 56, le 11 janvier 2019

  • C'est dommage que votre journal ne relate pas avec précision cette histoire. Pourtant plusieurs articles y sont consacrés. Pour les pertes qu'il aurait fait subit à Nissan, M. Ghosn a clarifié l'affaire le 7 écoulé devant le tribunal. Il s'agissait de fixer les cours de change, via des options, du JPY contre le USD pour ses salaires futures. Pendant la crise il fallait verser des garanties car la valeur des options était devenues presque nulle, et in fini, personne n'a rien perdu. Le Conseil d'administration était au courant.

    Shou fi

    09 h 55, le 11 janvier 2019

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