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Moyen Orient et Monde - Décryptage

Trump envoie un double message depuis l’Irak

Le président américain a cherché à améliorer son image auprès des soldats américains, tout en réaffirmant le maintien de troupes dans la région.

Le président américain, Donald Trump, et son épouse, Melania, rencontrent des soldats américains sur la base d’al-Assad en Irak, le 26 décembre. Saul Loeb/AFP

Près de deux ans après son investiture à la Maison-Blanche, Donald Trump a effectué une visite surprise pour la première fois en Irak mercredi pour rencontrer les troupes américaines stationnées sur la base aérienne d’al-Assad. La porte-parole de la Maison-Blanche, Sarah Sanders, a indiqué dans un tweet que l’objectif de ce déplacement était de « les (les forces américaines) remercier pour leur engagement, leur succès et leur sacrifice, et pour leur souhaiter Joyeux Noël ». Donald Trump, qui n’avait jamais rendu visite aux soldats sur le terrain depuis son entrée à la Maison-Blanche, avait été vivement critiqué à ce sujet ces derniers mois. L’annulation de sa visite du cimetière américain de Bois Belleau, en France, le 11 novembre dernier en raison du mauvais temps avait également été mal vue sur la scène nationale. Mercredi, le président américain s’est affiché tout sourire devant les caméras aux côtés des troupes américaines à qui des casquettes flanquées de son slogan de campagne « Make America Great Again » avaient été distribuées. Ce déplacement en Irak lui permet de faire un coup double en jouant d’une opération de communication pour améliorer son image à l’égard des militaires américains tout en adressant un message aux acteurs politiques nationaux et internationaux. « La première raison de cette visite pour Trump est d’effacer quelques faux pas qu’il avait commis avec les militaires. Il ne faut pas oublier que les vétérans ont voté à 60 % pour lui, c’est une base républicaine solide », explique à L’Orient-Le Jour Corentin Sellin, professeur agrégé d’histoire et spécialiste de la politique américaine.

Le timing de cette visite est également opportun puisqu’elle intervient trois jours après la signature de l’ordre de retrait des forces américaines de Syrie. La décision, annoncée la semaine dernière, a provoqué un tollé au sein de l’administration Trump, marqué par les démissions soudaines du secrétaire à la Défense, Jim Mattis, et de l’émissaire américain pour la coalition internationale antijihadiste, Brett McGurk, en guise de protestation. Bien que les sujets politiques soient habituellement mis de côté lors des rencontres présidentielles avec les troupes américaines, le locataire de la Maison-Blanche a profité de l’occasion pour répondre à ses détracteurs et notamment à M. Mattis, farouche défenseur de la présence américaine en Syrie. « Les États-Unis ne peuvent pas continuer à être le gendarme du monde. C’est injuste quand le fardeau est entièrement sur nous », a-t-il fustigé. « Nous sommes éparpillés à travers le monde. Nous sommes dans des pays dont la majorité des gens n’ont même pas entendu parler. Franchement, c’est ridicule », a insisté le président américain.


(Lire aussi : "Éradiquer l'EI", une gageure que Trump laisse à Erdogan en Syrie)


Compromis

Face aux déboires provoqués par sa décision sur la présence américaine en Syrie, M. Trump a toutefois tempéré ses propos en précisant que les troupes américaines n’allaient pas se retirer du terrain irakien, utile du point de vue stratégique pour lutter contre les dernières poches de l’État islamique en Syrie et pour contrer l’expansion iranienne dans la région. « Si nous voyons l’EI faire quelque chose qui nous déplaît, nous pourrions les frapper si vite et si fort qu’ils ne réaliseraient même pas ce qui leur arrive », a affirmé M. Trump, avant de préciser qu’il restait possible de « revenir aider » en Syrie « à un moment donné » selon l’évolution de la situation.

Si les dernières déclarations de M. Trump en matière de politique étrangère peuvent paraître contradictoires, « il y a l’idée de faire une sorte de compromis avec la frange néoconservatrice » alors que la nouvelle du retrait des Américains de Syrie a été mal reçue par de nombreux sénateurs républicains, pourtant majoritairement acquis au locataire de la Maison-Blanche, explique Corentin Sellin. Suite à la démission de Jim Mattis, « on a eu une impression de grand flou quant aux politiques étrangère et de défense américaines, et il n’était pas clair si les États-Unis se désengageaient du Moyen-Orient », note-t-il. « Mercredi, il les a clarifiés et a rassuré en allant parler directement aux soldats », ajoute le spécialiste. Des éléments qui devraient également peser dans la balance des négociations budgétaires entre l’administration Trump et le Congrès pour lever le shutdown qui paralyse les institutions politiques américaines depuis le 22 décembre.

Sur le plan régional, ses propos étaient surtout destinés à Israël, allié principal de Washington dans la région, qui se retrouve lésé par la décision de M. Trump de retirer les troupes américaines de Syrie alors qu’elle pourrait permettre aux forces iraniennes et à leurs milices de renforcer leur assise sur le corridor chiite menant de Téhéran à Beyrouth, en passant par Bagdad et Damas. En réaffirmant la présence américaine en Irak, l’administration Trump cherche donc à rassurer l’État hébreu en gardant un point d’appui régional pour contrer l’expansion iranienne dans la région.

En Irak, les déclarations du président américain ont provoqué la colère de la milice chiite Harakat al-Nujaba qui a estimé que la présence des forces américaines était « une violation de la souveraineté du pays » et qu’il était désormais « du devoir du gouvernement de (les) expulser ». Le secrétaire général de la milice chiite Assaïb Ahl al-Haq, Qaïs al-Khazali, a, lui, affirmé sur Twitter que cette visite « révélait la réalité du projet américain en Irak ». Selon lui, l’Irak répondra « par une décision du Parlement pour faire sortir les forces militaires » américaines. « Si vous ne partez pas, nous avons les moyens de vous faire partir par un autre moyen », a-t-il menacé à l’adresse de M. Trump. Contacté par l’AFP, l’analyste politique Hicham al-Hachemi prédit que « l’axe pro-Iran (au sein du pouvoir irakien) va chercher à obtenir un vote au Parlement en faveur d’un agenda basé sur le retrait américain d’Irak ». « Le manque de respect de Trump à l’égard de ses alliés provoque des tensions entre le Premier ministre Adel Abdel Mahdi et les forces politiques irakiennes », souligne-t-il, ajoutant que cela pourrait « ouvrir la voie à une nouvelle résistance à la présence américaine ».


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Près de deux ans après son investiture à la Maison-Blanche, Donald Trump a effectué une visite surprise pour la première fois en Irak mercredi pour rencontrer les troupes américaines stationnées sur la base aérienne d’al-Assad. La porte-parole de la Maison-Blanche, Sarah Sanders, a indiqué dans un tweet que l’objectif de ce déplacement était de « les (les forces américaines)...
commentaires (1)

TRES INCERTAINE LA PRESENCE FUTURE AMERICAINE EN IRAK CAR NE DEPENDANT PAS DU VOULOIR AMERICAIN MAIS DE CELUI DES IRAKIENS ET DES IRANIENS... PAR LEUR RETRAIT DE SYRIE ILS SE SONT PORTES LES AMERICAINS UN COUP DE GRACE DANS LA REGION. DIFFICILE A REVENIR SANS LE PRIX D,UNE GRANDE GUERRE QUE SUPPOSEMENT IL VEUT EVITER LE TRUMP !

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 20, le 28 décembre 2018

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Commentaires (1)

  • TRES INCERTAINE LA PRESENCE FUTURE AMERICAINE EN IRAK CAR NE DEPENDANT PAS DU VOULOIR AMERICAIN MAIS DE CELUI DES IRAKIENS ET DES IRANIENS... PAR LEUR RETRAIT DE SYRIE ILS SE SONT PORTES LES AMERICAINS UN COUP DE GRACE DANS LA REGION. DIFFICILE A REVENIR SANS LE PRIX D,UNE GRANDE GUERRE QUE SUPPOSEMENT IL VEUT EVITER LE TRUMP !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 20, le 28 décembre 2018

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