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Liban - Législatif

Face à la léthargie gouvernementale, Berry passe à l’action

Le président de la Chambre convoque le Parlement à une séance plénière les 24 et 25 septembre.

Nabih Berry présidant une réunion du bureau de la Chambre. Photo Hassan Ibrahim

Il est vrai que le président de la Chambre, Nabih Berry, n’a jamais caché son mécontentement face aux atermoiements entachant le processus de formation du prochain gouvernement. Après avoir longtemps déclaré qu’il tiendra une séance plénière de la Chambre placée sous le signe de la législation de nécessité, M. Berry est passé hier à l’action. Il a convoqué la Chambre des députés à une séance qui aura lieu les lundi et mardi 24 et 25 septembre.

Le chef du législatif avait d’ailleurs présidé hier une réunion du bureau de la Chambre pour l’examen des projets et propositions de lois qui devraient être inclus dans l’ordre du jour de la séance. Étaient présents le vice-président de la Chambre Élie Ferzli, et les députés : Samir Jisr (courant du Futur), Alain Aoun (Courant patriotique libre), Michel Moussa (mouvement Amal) et Agop Pakradounian (Tachnag). Il y a avait aussi le secrétaire général de la Chambre Adnane Daher.

S’exprimant à l’issue de la réunion, M. Ferzli a fait savoir que lors des discussions qui ont porté sur les textes qui seront à l’étude au Parlement, les députés ont pris en compte « les circonstances exceptionnelles et la nécessité de dynamiser le pays à tous les niveaux ». Selon lui, « les séances se tiendront le matin et le soir pour pouvoir adopter le maximum de lois et d’accords dont le pays a besoin ».

Prié d’exposer les projets de lois, M. Ferzli a indiqué qu’il s’agit des projets approuvés par les commissions conjointes, notamment ceux qui s’articulent autour des déchets et de la médiation judiciaire. « Il y a aussi certains accords approuvés en commissions et quelques questions extrêmement importantes », a ajouté le vice-président de la Chambre, insistant sur le fait que « l’entente autour de la séance parlementaire nécessaire existe ». M. Ferzli a également souligné la contribution de Samir Jisr, député de Tripoli (courant du Futur), à la séance du bureau de la Chambre, une façon pour lui d’assurer que la formation haririenne ne s’opposera pas à la réunion.

Une source bien informée indique dans ce cadre à L’Orient-Le Jour que la séance témoignera de l’approbation de certains textes portant sur les réformes économiques exigées par la communauté internationale lors de la conférence dite CEDRE, qui s’est tenue à Paris le 6 avril dernier.


(Lire aussi : Les néoputschistes)


Le gouvernement d’expédition des affaires courantes

Il n’en reste pas moins que c’est surtout le timing de cette initiative de M. Berry qui est important. Et pour cause : la séance parlementaire se tiendra sous un gouvernement d’expédition des affaires courantes, et à l’heure où le processus de formation du futur cabinet continue de buter sur les nœuds habituels liés aux querelles portant sur les quotes-parts gouvernementales respectives de plusieurs protagonistes, notamment les Forces libanaises (FL), le Parti socialiste progressiste (PSP) et le CPL. Selon un observateur politique interrogé par L’OLJ, c’est à dessein que le camp Berry évite d’employer le terme « législation de nécessité » pour évoquer la réunion parlementaire, dans le but de confirmer l’indépendance du pouvoir législatif par rapport à l’exécutif… Même en l’absence d’un gouvernement qui exerce pleinement ses fonctions. Cela fait dire à certains que par son initiative, M. Berry aurait voulu mettre le Premier ministre désigné Saad Hariri au pied du mur, afin de l’inciter à accélérer le processus de formation de son équipe.

Sauf que Boutros Harb, ancien député de Batroun, y voit un danger plus grave : la normalisation avec les irrégularités constitutionnelles. C’est d’ailleurs cette crainte qui se fait sentir dans l’invitation qu’il a lancée à Nabih Berry à revenir sur sa convocation. Dans un communiqué publié hier, M. Harb a salué « l’initiative de M. Berry visant à régler des questions urgentes liées à la vie quotidienne des citoyens et à la continuité des services publics ». « Mais je crains que la tenue de la séance parlementaire en l’absence d’une équipe ministérielle, bien que conforme à la Constitution, n’encourage les protagonistes qui empêchent le gouvernement de voir le jour à poursuivre leurs dangereux chantages à l’encontre des autres », ajouté M. Harb. Et de poursuivre : « J’exhorte M. Berry à réviser son initiative et à ne pas convoquer le Parlement à une réunion, dans la mesure où il serait bénéfique de pousser les protagonistes qui se disputent le pouvoir politique à s’acquitter de leurs responsabilités envers le peuple et ses besoins, plus importants que leurs intérêts personnels et partisans. »

Mais bien au-delà des tractations liées à la politique politicienne, il semble que la séance législative se heurte à des obstacles de nature strictement constitutionnelle. Interrogé par L’OLJ, le juriste Hassane Rifaï explique que le caractère d’urgence n’est pas prouvé dans les propos d’Élie Ferzli qui s’est efforcé d’exposer les motifs de la convocation, même s’il a insisté sur « l’urgence » de la réunion. « Il se peut que la majorité des blocs parlementaires répondent favorablement à la convocation de M. Berry. Les députés voteront donc des lois. Sauf que ces textes seront susceptibles de recours en invalidation devant le Conseil constitutionnel. Et pour cause : le flou entourant la procédure de promulgation de ces législations, dans la mesure où le contreseing du Premier ministre n’est pas de la compétence du chef d’un gouvernement d’expédition des affaires courantes », ajoute-t-il, notant que le prochain gouvernement pourrait demander des amendements aux lois en question pour les appliquer.

Un autre juriste, qui a requis l’anonymat, souligne à L’OLJ que l’article 69 de la Constitution, sur lequel les milieux de Aïn el-Tiné se basaient pour justifier la tenue d’une séance législative, stipule que si le gouvernement démissionne (ou est considéré comme démissionnaire) à une période où la Chambre est hors session, celle-ci serait considérée en session extraordinaire. « Cette démarche vise à maintenir le fonctionnement des institutions de l’État en cas de guerres ou de catastrophes », dit-il.


(Lire aussi : Gouvernement : les pressions externes s’accentuent)


Siniora : Gare à la violation de la Constitution

Quant aux milieux proches de Saad Hariri, ils interprètent l’initiative Berry sous l’angle du « besoin de voter » quelques lois. C’est le point de vue que présente à L’OLJ l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, qui a été reçu hier par l’évêque maronite de Beyrouth Mgr Boulos Matar. « Il faut cerner la séance législative au strict besoin d’approuver certains textes. Sinon, il s’agira d’une flagrante violation de la Constitution », affirme M. Siniora, notant que le fait de ne pas approuver certaines législations risquerait d’aggraver les problèmes du pays. « Il faut que tous les protagonistes comprennent que nous n’avons plus le luxe des atermoiements », dit-il, incitant Michel Aoun à se tenir à égale distance de toutes les parties.


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Il est vrai que le président de la Chambre, Nabih Berry, n’a jamais caché son mécontentement face aux atermoiements entachant le processus de formation du prochain gouvernement. Après avoir longtemps déclaré qu’il tiendra une séance plénière de la Chambre placée sous le signe de la législation de nécessité, M. Berry est passé hier à l’action. Il a convoqué la Chambre des...

commentaires (4)

"normalisation avec les irrégularités constitutionnelles"...Dieu et Allah merci que nous avons une constitution! Elle aide nos politiciens à garder leur "agilité mentale" capable de trouver des moyens de la contrevenir tout en feignant de l'appliquer et de la défendre!!

Wlek Sanferlou

23 h 03, le 20 septembre 2018

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Commentaires (4)

  • "normalisation avec les irrégularités constitutionnelles"...Dieu et Allah merci que nous avons une constitution! Elle aide nos politiciens à garder leur "agilité mentale" capable de trouver des moyens de la contrevenir tout en feignant de l'appliquer et de la défendre!!

    Wlek Sanferlou

    23 h 03, le 20 septembre 2018

  • PRIERE LIRE POUR TOUS LES SALAIRES ETC... MERCI.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 26, le 20 septembre 2018

  • pas compris pourquoi ce soudain reveil ""responsable", pourquoi cette hate a faire naitre un cabinet qui sera copy/paste de l'actuel ? qu'on ne parle surtout pas de cedre qui risque de ne debourser aucun $/Euro de ttes facons. de toutes facons cedre ou pas, cabinet ou pas, la constitution ne sera jamais que foulee aux pieds.

    Gaby SIOUFI

    10 h 05, le 20 septembre 2018

  • AU MOINS UN PEU DE TRAVAIL POUR TOUT LES SALAIRES DEBOURSES SUR NOS ABRUTIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 18, le 20 septembre 2018

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