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Moyen-Orient - Repère

Tweets ou "terrorisme" ? Les cyber-militants derrière les barreaux en Arabie saoudite

Au cours des deux dernières années, la justice saoudienne a « condamné et prononcé de longues peines de prison contre des dizaines d'individus pour leurs propos sur les réseaux sociaux », affirment Amnesty International et ALQST.

La Saoudienne Manahel al-Otaïbi, marchant dans une rue de Riyad, habillée à l'occidentale, le 2 septembre 2019. Photo AFP/FAYEZ NURELDINE

La condamnation en Arabie saoudite de la militante et influenceuse Manahel al-Otaibi à onze ans de prison s'inscrit dans ce que les organisations de défense des droits humains décrivent comme une campagne de répression féroce contre la moindre critique en ligne dans la monarchie du Golfe. Au cours des deux dernières années, la justice saoudienne a « condamné et prononcé de longues peines de prison contre des dizaines d'individus pour leurs propos sur les réseaux sociaux », ont affirmé mardi les ONG Amnesty International et ALQST dans un communiqué conjoint. Ces personnes sont généralement jugées par la Cour pénale spécialisée, une juridiction établie en 2008 pour traiter les affaires liées au terrorisme, et dont les verdicts sont rarement commentés par les autorités saoudiennes.

Voici quelques exemples d'affaires récentes.

Nourah al-Qahtani 
Nourah al-Qahtani a été arrêtée en juillet 2021 pour ses publications sur le réseau Twitter, devenu depuis X, selon un document judiciaire obtenu par l'organisation DAWN, basée à Washington. Cette mère de cinq enfants a été condamnée à six ans et demi de prison en première instance, mais les procureurs ont fait appel et obtenu une peine beaucoup plus sévère, 45 ans de prison, en 2022.

Le compte X de Nourah al-Qahtani, tel qu'identifié dans le document judiciaire, comporte de nombreux messages critiquant le gouvernement, et d'autres évoquant le risque d'arrestation de personnes impliquées dans des manifestations, qui sont strictement interdites en Arabie saoudite.

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Le tribunal l'a jugé coupable d'avoir utilisé le réseau social « pour contester la religion et la justice » du roi Salmane et de son fils et dirigeant de facto du royaume, Mohammad ben Salmane, d'après le texte du jugement. Il l'a également condamné pour avoir encouragé « les activités de ceux qui cherchent à troubler l'ordre public et à déstabiliser (...) l'Etat », en « publiant des tweets faux et malveillants ».

Nourah al-Qahtani comptait moins de 600 abonnés sur la plateforme.

Salma al-Chehab 
Membre de la communauté chiite, minoritaire dans le royaume sunnite, Salma Al-Chehab avait 34 ans et préparait un doctorat à l'université britannique de Leeds lorsqu'elle a été arrêtée, en janvier 2021, pendant des vacances dans son pays. Elle a été condamnée en août 2022 à 34 ans de prison pour avoir « aidé » des dissidents à « déstabiliser l'Etat » en relayant leurs tweets.

Cette mère de deux enfants, qui publiait essentiellement des messages sur les droits des femmes et comptait quelques milliers d'abonnés, s'est également vu interdire de quitter le territoire pendant 34 ans après avoir purgé sa peine. Les années d'emprisonnement et d'interdiction de voyager ont ensuite été ramenées à 27 ans, selon Amnesty.

Mohammad al-Ghamdi 
Mohammad al-Ghamdi, un opposant au pouvoir qui dénonçait la corruption et des violations de droits humains présumés sur les réseaux sociaux, a été arrêté en juin 2022 et condamné à mort l'année dernière. Selon son frère Saïd al-Ghamdi, un militant en exil, le dossier de l'accusation reposait au moins en partie sur des publications critiquant le gouvernement et exprimant un soutien aux « prisonniers d'opinion », comme les dignitaires religieux Salmane al-Awda et Awad al-Qarni.

Human Rights Watch a affirmé l'année dernière avoir vu un document judiciaire considérant que cet enseignant à la retraite a « visé le statut du roi et du prince héritier », et que « ses actions sont amplifiées par le fait qu'elles se sont produites via une plateforme médiatique mondiale, nécessitant une punition sévère ».

En septembre 2023, dans une interview à la télévision américaine Fox News, le prince Mohammad ben Salmane avait dit ne pas approuver ce jugement. « J'espère que lors de la prochaine audience, le juge sera plus expérimenté et pourrait envisager la situation sous un angle totalement différent », avait-il ajouté, laissant entendre que M. Ghamdi pourrait ne pas être exécuté.

Manahel al-Otaibi 
Manahel al-Otaibi, une coach sportive et blogueuse de 29 ans, a été arrêtée en novembre 2022, après avoir critiqué les lois sur la tutelle masculine, et publié des photos d'elle sans l'abaya traditionnelle, une longue robe couvrant le corps, selon les organisations de défense des droits humains. Elle a été condamnée le 9 janvier dernier à onze ans de prison par la Cour pénale spécialisée, mais le verdict n'a été rendu public que dans la réponse du gouvernement saoudien à une demande d'informations formulée par des rapporteurs spéciaux des Nations unies sur son cas.

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La condamnation en Arabie saoudite de la militante et influenceuse Manahel al-Otaibi à onze ans de prison s'inscrit dans ce que les organisations de défense des droits humains décrivent comme une campagne de répression féroce contre la moindre critique en ligne dans la monarchie du Golfe. Au cours des deux dernières années, la justice saoudienne a « condamné et...
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