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Liban - Liban

Gouvernement : Les appuis à Hariri se multiplient... les appels aux concessions aussi

Michel Aoun revient à la charge : le cabinet verra le jour par une mouture « équilibrée », loin du monopole et de la marginalisation.

Nagib Mikati s’exprimant au Conseil économique et social. Photo ANI

C’est un important appui au Premier désigné Saad Hariri qu’a exprimé hier le mufti de la République le cheikh Abdellatif Deriane. Dans son allocution à l’occasion de l’Hégire (le Nouvel An musulman), il a déclaré : « Nous sommes avec le Premier ministre désigné dans son œuvre pour l’entente, le redressement et l’équilibre national. Et nous espérons que son gouvernement sera conforme à ce modèle pour qu’il soit notre cabinet à tous. » « Nous avons besoin du calme et de la sagesse des vétérans, ainsi que du sens des responsabilités des dirigeants (…) », a-t-il enchaîné. Et d’ajouter : « L’entêtement et l’attachement, réel ou illusoire, aux prérogatives sont inutiles, car quand le système est menacé, les prérogatives deviennent sans importance. »

Il est évident qu’à travers ces propos, le mufti de la République a voulu mettre un terme à la guerre des prérogatives du président de la République et du Premier ministre à laquelle se sont livrés les milieux du Courant patriotique libre et du courant du Futur récemment. Celle-ci avait suscité l’ire de la communauté sunnite, dont des ténors – parmi lesquels l’ancien ministre de la Justice Achraf Rifi, connu pour son opposition radicale ses dernières années aux choix politiques de M. Hariri – étaient montés au créneau pour manifester leur solidarité avec le Premier ministre et mettre en garde contre « toute atteinte à la présidence du Conseil ».

C’est donc le timing des propos du mufti Deriane qui revêt une certaine importance. Mais dans les milieux de la communauté sunnite, on explique à L’Orient-Le Jour qu’il est naturel de voir Dar el-Fatwa s’inviter dans le débat des prérogatives à l’heure où certains protagonistes n’hésitent pas à brandir le slogan du « recouvrement des droits des chrétiens », pour justifier leurs agissements politiques. Une allusion à peine voilée au CPL qui a mené sa campagne présidentielle sous le signe du recouvrement des droits des chrétiens et de la « conformité au pacte national » pour mener Michel Aoun à la tête de l’État, en sa qualité de « représentant le plus fort des chrétiens ».

Dans les mêmes milieux, on n’écarte pas naturellement cette guerre des prérogatives des tractations en cours pour la formation du prochain gouvernement. « Les proches du président de la République cherchent à effectuer un coup d’État contre la Constitution. Ils tentent de consacrer une coutume qui est celle du respect de la volonté du président lors de la formation du cabinet, sachant que seul le Premier ministre désigné est en mesure d’imposer des critères sur ce plan. D’autant que c’est lui qui effectue les consultations (non contraignantes) avec les groupes parlementaires pour se faire une idée de leurs demandes respectives », souligne-t-on de même source.

À son tour, le courant du Futur juge normal que la plus haute autorité religieuse sunnite manifeste son appui au Premier ministre désigné. « Saad Hariri a présenté une mouture équilibrée au chef de l’État. La seule solution, c’est que Michel Aoun fasse une concession et réduise sa part gouvernementale », indique un proche de la Maison du Centre à L’OLJ, notant qu’il sera « difficile » d’arriver à une formule qui serait à même de satisfaire tous les protagonistes ».

Cet appel aux concessions a été lancé au chef de l’État par le mufti jaafarite, Ahmad Kabalan (voir par ailleurs). Il s’est adressé à Michel Aoun » en sa qualité de père de tous les Libanais pour lui demander, dans le souci de préserver l’intérêt national, de « renoncer à sa part au sein du gouvernement au profit de ses fils, les faiseurs de troubles qui bloquent la formation du cabinet ». Des propos que le Hezbollah (dont plusieurs hauts responsables et députés ont multiplié hier les appels à une rapide mise sur pied de l’équipe ministérielle dans la mesure où les atermoiements auraient des conséquences « fâcheuses », comme l’a dit le député Ali Mokdad) a préféré ne pas commenter, mais auxquels une source du CPL a réagi via L’OLJ. La quote-part du président de la République est non négociable et indiscutable. Qu’ils aillent chercher les concessions ailleurs, a déclaré la source.


(Lire aussi : Aoun : « Quand une mouture équilibrée sera présentée, le gouvernement sera formé »)


La guerre des fonctionnaires entre CPL et PSP

Le déplacement de Michel Aoun à Strasbourg et le voyage de Saad Hariri à La Haye ont sans doute freiné le processus gouvernemental. Mais il n’en reste pas moins que les nœuds entravant encore la naissance de la future équipe ministérielle n’en finissent pas de se compliquer. C’est cette impression que l’on pourrait dégager des propos tenus hier par le chef de l’État dans une conversation à bâtons rompus avec les journalistes l’accompagnant à Strasbourg. « Quand la mouture (de M. Hariri) sera équilibrée, un gouvernement se formera conformément aux critères et principes que j’ai définis dans mon discours du 1er août et qui bénéficient de l’approbation de tous les protagonistes », a-t-il déclaré, laissant entendre qu’il est toujours possible qu’il adresse une lettre au Parlement. « D’autant que c’est un droit garanti par la Constitution. » Et d’ajouter : « Il est intolérable que la représentation d’une communauté ou d’une catégorie soit monopolisée, ou qu’une partie soit marginalisée au profit d’une autre. » M. Aoun a réitéré ainsi son refus d’accorder trois ministres druzes au Parti socialiste progressiste de Walid Joumblatt comme le réclame ce dernier, dans la mesure où cela pourrait, selon les proches de Baabda, accorder au leader de Moukhtara un veto communautaire qui risquerait de paralyser le gouvernement.

Cette querelle avait d’ailleurs pris hier un tournant dangereux. En riposte à la décision du ministre sortant de l’Éducation Marwan Hamadé (joumblattiste) de limoger la directrice du département des examens officiels Hilda Khoury (proche du CPL), les ministres sortants de l’Environnement Tarek el-Khatib et de l’Énergie César Abi Khalil (tous deux appartenant au CPL) ont également démis de leurs fonctions deux fonctionnaires qui seraient proches du PSP. Il s’agit de Raja el-Ali qui travaille à l’Électricité du Liban (EDL) et de Nizar Hani, fonctionnaire au ministère de l’Environnement. Une démarche « vindicative » qui a provoqué la colère du PSP, dont le responsable media Rami Rayess a réagi via son compte Twitter. « Les mesures vindicatives prises à l’EDL et au ministère de l’Environnement à l’encontre de deux des fonctionnaires les plus compétents en riposte à la décision du ministre (sortant de l’Éducation) reflètent une partie de la décadence éthique qu’un parti consacre dans la vie politique et prouvent que les allégations de paternité attribuées au président de la République sont infondées », a écrit M. Rayess.

CPL-FL

Quant à la querelle CPL-FL, elle a repris hier de plus belle. Au lendemain du discours du leader des FL Samir Geagea dans lequel il avait réitéré son attachement à la réconciliation interchrétienne de 2016 tout en lançant un appel à Michel Aoun à « sauver son mandat », Ziad Assouad, député CPL de Jezzine, s’est livré à une attaque contre Samir Geagea, l’accusant de « transposer le problème au cœur de la communauté chrétienne, pour fuir son échec, sa faiblesse et sa soumission à l’étranger ou bien pour créer plus de chocs et de fissures ». Il a également accusé M. Geagea de « reproduire les circonstances de 1990 », lorsque les FL et les unités de l’armée fidèles au général Aoun s’étaient livrées à une « guerre d’élimination ». De même Mario Aoun, député CPL du Metn, s’en est violemment pris au chef des FL. Dans une déclaration à l’agence al-Markaziya, M. Aoun l’a accusé de vouloir sciemment entraver la formation du gouvernement et semer la zizanie entre Michel Aoun et le parti qu’il a fondé. « Celui qui prétend appuyer le régime devrait avoir des demandes logiques et ne pas plaider pour tous les ministères dits consistants comme s’il était la seule force politique dans le pays », a affirmé Mario Aoun.

Les craintes économiques

Du côté de l’opposition, les Kataëb ont réitéré hier leur appel à sauver le pays par un gouvernement de spécialistes. Dans un communiqué publié à l’issue de la réunion hebdomadaire du bureau politique sous la présidence du chef du parti Samy Gemayel, les Kataëb ont plaidé pour « la formation d’un cabinet de technocrates appuyé par les partis politiques, et qui serait capable de plancher sur les dossiers liés à la vie quotidienne et à la lutte contre la corruption, et de relancer l’économie ».

Plus tôt dans la journée, Nagib Mikati, député de Tripoli, avait lui aussi appelé, depuis le siège du Conseil économique et social, à la formation d’un cabinet comprenant une équipe homogène capable de prendre les décisions à même de redynamiser l’économie et assurer des emplois.


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Deriane appelle indirectement Aoun à jouer le rôle de médiateur

C’est un important appui au Premier désigné Saad Hariri qu’a exprimé hier le mufti de la République le cheikh Abdellatif Deriane. Dans son allocution à l’occasion de l’Hégire (le Nouvel An musulman), il a déclaré : « Nous sommes avec le Premier ministre désigné dans son œuvre pour l’entente, le redressement et l’équilibre national. Et nous espérons que son...

commentaires (11)

“L'avenir n'est pas une amélioration du présent. C'est autre chose.” de Elsa Triolet Extrait de Le cheval roux ou les intentions humaines Il faut d'abord gérer les affaires du pays pour lesquels vous avez été élus L'avenir n'est ni l'Iran, ni l'Arabie Saoudite l'avenir c'est à nous de le construire selon nos besoins, typiquement et uniquement libanais

FAKHOURI

11 h 04, le 12 septembre 2018

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Commentaires (11)

  • “L'avenir n'est pas une amélioration du présent. C'est autre chose.” de Elsa Triolet Extrait de Le cheval roux ou les intentions humaines Il faut d'abord gérer les affaires du pays pour lesquels vous avez été élus L'avenir n'est ni l'Iran, ni l'Arabie Saoudite l'avenir c'est à nous de le construire selon nos besoins, typiquement et uniquement libanais

    FAKHOURI

    11 h 04, le 12 septembre 2018

  • Dernière info. L'OLJ 18h31 France : "Procès requis pour un proche de Le Pen". Jean-François Jalkh, est poursuivi d'escroqueries et tentatives d'escroqueries au profit du Front national. Le nom est phonétiquement libanais. S'il l'est, ces accusations ne m'étonneraient pas.

    Un Libanais

    19 h 02, le 11 septembre 2018

  • Je lis que Michel Aoun souhaite une mouture équilibrée loin de la marginalisation. Dieu que c'est beau comme souhait, mais la réalité est aussi éloignée que la distance entre la Lune et le Soleil. Je ne le blâme pas, ce n'est pas qui décide. La mouture équilibrée du gendre, c'est 15 ministres du CPL. Le décideur est le rêveur de la prochaine présidentielle qui ne serait pas, hélas, comme il en rêve. Cheikh Naïm Kassem mijote autre chose. Fin.

    Un Libanais

    18 h 45, le 11 septembre 2018

  • Les riches de ce pays, en y incluant tout les politiciens et autres leaders de milices de tout bords, ne s'inquiètent que de leurs affaires et richesses. Le peuple lui s'inquiète a chaque seconde de son avenir celui de ses enfants et famille. Dans les deux cas ni religion ni dieux célestes ni convictions politico-comico-serieux ne ne les séparent. Quand on est pauvre on est tous les mêmes et cette pauvreté nous unis au nom du père Justice et Droit. On veut un gouvernement de technocrates, minimum mais efficace et qui remettra le pays sur des rails. La seule concession qu'on accepte: que le parlement fasse son contrôle,pour lequel il est élu, du gouvernement de façon légale,efficace,honnête et sérieuse.

    Wlek Sanferlou

    18 h 35, le 11 septembre 2018

  • Hélas ces mêmes députés que le peuple a récemment élu, mettent en avant leurs intérêts politiciens devant l'intérêt national du Liban. Le Président de la République s'il en est capable, doit impérativement et surtout objectivement arbitrer ces querelles pour sortir de l'impasse.

    Tony BASSILA

    17 h 22, le 11 septembre 2018

  • Rien ne va changer . Chaque tribu confessionnelle appuie son chef au nom de cette belle blague Liban mosaique des confessions .

    Antoine Sabbagha

    11 h 36, le 11 septembre 2018

  • JE CONTINUE : AU SOMMET !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 30, le 11 septembre 2018

  • Les Sunnites et les Chrétiens préparez vous parceque le prochain President sera un chiite du Hezbollah , et les femmes devront se préparer à porter ce truc là que les femmes iraniennes portent

    Eleni Caridopoulou

    10 h 10, le 11 septembre 2018

  • Mr. Assouad a également accusé M. Geagea de « reproduire les circonstances de 1990 », lorsque les FL et les unités de l’armée fidèles au général Aoun s’étaient livrées à une « guerre d’élimination ». Juste pour l'histoire, ce ne sont pas les FL qui se sont livrées a une guerre de quoi que ce soit autre que celle de se défendre et défendre la survie de la résistance et de l’état que, depuis, Aoun a bafoué, bafoue et foule au pied journellement. Les actes parlent d'eux même, mais il est apparemment encore nécessaire de remettre les points sur les i.

    Pierre Hadjigeorgiou

    08 h 55, le 11 septembre 2018

  • 7AMIYA... 7RAMIYA...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 46, le 11 septembre 2018

  • MARIE, MARIE ,MARIE RÉVEILLES TOI, RÉVEILLES TOI. MARIE SAUTTE DE SON LIT À MOITIÉ ENDORMI ET DEMANDE, QU'EST CE QU'IL Y A ? IL VOULAIT VOUS RÉVEILLER, JE L'AI EMPÊCHÉ. ET LÀ AOUN FAIT LA MÊME CHOSE. IL BLOQUE LA FORMATION D'UN GOUVERNEMENT SOUS PRÉTEXTE QUE JOUMBLATT RISQUE DE LE BLOQUER.

    Gebran Eid

    03 h 28, le 11 septembre 2018

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