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Économie - Entretien

Raëd Khoury suggère la création d’une « régie » du cannabis

Le ministre de l’Économie livre à « L’Orient-Le Jour » quelques pistes sur une potentielle légalisation de la culture du haschisch au Liban à des fins médicinales.

Selon le ministre de l’Économie, Raëd Khoury, le Liban pourrait développer une filière industrielle d’extraction d’huile de cannabis. Photo : ministère de l’Économie

Le Liban pourrait légaliser la culture du haschisch et son utilisation à des fins médicinales. Le ministre sortant de l’Économie et du Commerce, Raëd Khoury, a confirmé hier dans un entretien accordé à « L’Orient-Le Jour » qu’il s’agit bien d’une des propositions émises par le cabinet de conseil international McKinsey dans son plan pour diversifier l’économie libanaise. McKinsey avait été mandaté en début d’année pour mener une étude sur la situation économique du pays et proposer une stratégie globale de relance.

Pourquoi maintenant ?
Le plan McKinsey, commandé par le gouvernement libanais en début d’année, propose des recommandations pour le développement des secteurs productifs et le renforcement du potentiel exportateur du pays. C’est l’un des quatre piliers de la Vision pour la stabilisation, la croissance et l’emploi, présentée par le gouvernement lors de la Conférence économique pour le développement par les réformes et avec les entreprises (Cedre), tenue le 6 avril dernier à Paris. « Le cannabis peut représenter une ressource importante pour le Liban, si nous développons une filière industrielle d’extraction de son huile. L’huile de cannabis est utilisée dans la production de médicaments, fréquemment prescrits à l’étranger pour des maladies infectieuses. Nous devons donc en profiter et légaliser la culture de cette plante », indique Raëd Khoury.

Que propose McKinsey ?
Le ministre de l’Économie affirme que le plan McKinsey inclut « une stratégie de développement claire sur : comment construire cette filière agricole ; comment déterminer ses normes et ses garde-fous ; qui sera autorisé à acheter cette marchandise auprès des agriculteurs, comment les licences seront attribuées... ». Raëd Khoury refuse toutefois d’en livrer les détails avant que le futur gouvernement n’approuve le plan McKinsey en Conseil des ministres.


(Lire aussi : La légalisation du cannabis pour usage médicinal, une idée controversée)


Comment serait gérée cette filière ?
« Il y aura certainement un établissement, similaire au modèle de la Régie libanaise des tabacs et tombacs, qui sera responsable de la régulation et de la gestion de cette filière », indique M. Khoury, avant de souligner que ce point n’a pas encore été tranché.

Quel potentiel pour le Liban ?
« C’est une filière qui représentera des centaines de millions de dollars », assure le ministre de l’Économie. « Cela permettra aussi à la population de la région de la Békaa de vivre dans de meilleures conditions. C’est une région qui souffre aujourd’hui de beaucoup de problèmes économiques », note-t-il. Le cannabis est en effet largement cultivé dans la plaine de la Békaa. Selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), le Liban est le troisième plus grand exportateur de résine de cannabis au monde. Ainsi, l’équivalent de quelque 200 millions de dollars de cannabis serait annuellement exporté vers les pays du Golfe, l’Europe, l’Afrique et l’Amérique du Nord. M. Khoury ne confirme pas ces chiffres. Durant les années quatre-vingt-dix, le Liban, soutenu par les Nations unies, avait adopté un plan d’éradication de la culture du cannabis basé sur un programme de plantes de substitution pour les agriculteurs de la Békaa. Mais ce plan n’a jamais abouti.


(Lire aussi : Hasch cash, l'édito de Issa GORAIEB)


Une amnistie pour les producteurs actuels illégaux serait-elle envisagée  ?
Le ministre explique dans un premier temps que « cette question sécuritaire n’a pas encore été abordée », avant d’estimer que cela dépendra de la nature des délits commis. « S’il y a des problèmes judiciaires avec des personnes données, on devra voir quelles seraient les solutions pour elles. Mais ça dépendra aussi de (leur) nature. Si l’État décide d’entreprendre de développer cette filière de manière légale, cela ne signifie pas qu’il y aura une amnistie sur des actions illégales commises par le passé : qu’il s’agisse du commerce intérieur ou à l’international ou encore de consommation à usage récréatif. On tranchera là-dessus au moment voulu », précise-t-il (voir page 3).
De son côté, le ministre sortant de l’Agriculture, Ghazi Zeaïter, affirme, dans un entretien au quotidien panarabe Acharq el-Awsat publié hier, que la légalisation du haschisch à usage médicinal au Liban permettrait de libérer les petits agriculteurs de l’emprise des barons de la drogue. Assurant au journal que « la légalisation du haschisch doit s’accompagner de sanctions sévères pour le trafic et la consommation de cette drogue en dehors de l’usage médicinal », Ghazi Zeaïter estime que « le contrôle (de la culture du haschisch à usage médicinal) n’est pas difficile ». Le ministre sortant souligne que « pas plus de 5 % des habitants de Baalbeck cultivent le haschisch, et ils étaient exploités la plupart du temps par les grands trafiquants ». Il estime ainsi que la légalisation du haschisch « va garantir les droits de ces agriculteurs et les libérer des trafiquants ».

Y a-t-il un consensus politique sur cette légalisation ?
Le ministre de l’Économie se veut confiant quant à l’existence d’un consensus politique dans le pays sur une légalisation de la culture du haschisch et son utilisation à des fins médicinales. « Des groupes politiques ont accueilli positivement cette proposition. Walid Joumblatt (PSP) l’a soutenue publiquement. Le président du Parlement, Nabih Berry (Amal), a demandé à ce que les travaux sur la législation encadrant cette filière débutent. C’est un dossier qui n’a pas encore été soumis au Conseil des ministres. Mais nous avons besoin de cette législation, que l’initiative émane du Parlement ou du gouvernement », déclare-t-il.


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commentaires (4)

Et une régie du captagon...

LeRougeEtLeNoir

20 h 14, le 21 juillet 2018

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Et une régie du captagon...

    LeRougeEtLeNoir

    20 h 14, le 21 juillet 2018

  • DEMAIN ON PROPOSERA DES CAFES TROTTOIRS OU L,ON PEUT FUMER DU CANNABIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 13, le 21 juillet 2018

  • Et encore un plaidoyer en faveur de la culture légale du cannabis...c'est bien louche tout ça ! Combien de millions de dollars de gains en perspective pour ceux qui font tout pour nous convaincre ??? Irène Saïd

    Irene Said

    18 h 54, le 21 juillet 2018

  • Quoi qu'il arrive en cas de l'égalisation de la culture du cannabis, à des fins medicinales, l'augmentation très sensible du trafic de stupéfiants et de sa consommation au Liban sera d'une grande évidence.

    Sarkis Serge Tateossian

    15 h 38, le 21 juillet 2018

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