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À La Une - Législatives

Les sunnites irakiens sans espoir avant les élections

A Tikrit, les membres de la communauté sunnite se plaignent d'être collectivement considérés comme des sympathisants de l'EI par les forces de sécurité, dominées par les chiites.

L'affiche d'un candidat aux élections législatives irakiennes dans un camp de déplacés à Amriyat al-Fallouja, en Irak, le 30 avril 2018. REUTERS/Khalid al-Mousily

La minorité sunnite d'Irak, qui se juge lésée par la majorité chiite depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, n'attend rien des élections législatives de samedi, les premières depuis la défaite des jihadistes du groupe Etat islamique (EI).

"Je vais aller voter mais je sais que cela ne changera rien", déclare Ghoufrane, une pharmacienne de 25 ans revenue dans sa ville de Mossoul, chef-lieu de la province de Ninive, "au milieu des ruines et des barrages de police", après le départ des combattants de l'EI en juillet dernier.

A Tikrit, ancien fief de Saddam Hussein plus au sud, sur la route de Bagdad, les membres de la communauté sunnite se plaignent d'être collectivement considérés comme des sympathisants de l'Etat islamique par les forces de sécurité, dominées par les chiites.

Pour de nombreux observateurs, la situation des sunnites irakiens n'a jamais été aussi peu enviable. Plus de deux millions d'entre eux ont dû fuir les combats et se retrouvent aujourd'hui dans des camps de fortune. D'autres sont ruinés, sans travail dans des villes en ruines, ou sont en prison.

Choujaa Mohammed, 35 ans, un ancien artificier de l'armée irakienne, avait fui Tikrit en 2014 à l'arrivée des hommes de l'EI pour se rendre à Bagdad et proposer ses services au gouvernement afin de chasser les jihadistes. "On m'a dit: 'tu es de Tikrit donc tu es de l'EI'. On a refusé de m'écouter et je n'ai plus touché ma solde", raconte-t-il. Samedi, il compte barrer d'un grand X son bulletin de vote pour traduire sa colère.


(Lire aussi : Un candidat aux législatives assassiné par l’EI)


"Sans illusions mais par devoir"
D'autres sunnites disent qu'ils choisiront un candidat, "sans illusions mais par devoir".

Falah Mohammed, de Mossoul, veut ignorer les menaces des militants islamistes qui ont promis de s'en prendre aux électeurs. "Le temps de la peur, c'est du passé", dit-il. Dans la province de Ninive, plus de 900 candidats et une trentaine de listes se présentent, alors que 31 sièges de députés sont en jeu.

Une partie des électeurs sunnites savent gré au Premier ministre chiite Haïdar al-Abadi, au pouvoir depuis 2014, d'avoir mené une politique plus favorable à leur communauté, comparé à celle de son prédécesseur Nouri al-Maliki. "Je n'ai aucune confiance dans les hommes politiques mais je vais voter pour Abadi. Il a chassé l'EI et libéré Mossoul", explique Fatouma Badran, une réfugiée de 40 ans interrogée dans le camp de Hammam al Alil, au sud de la ville. L'Alliance de la victoire d'Abadi est la seule coalition à présenter des listes dans les 18 provinces du pays. Ses candidats ont reçu un accueil plutôt favorable dans les zones sunnites.

Mais d'autres électeurs de Mossoul, comme Ali Fares, 31 ans, disent qu'ils ne voteront jamais pour des hommes politiques qui ont "détruit Mossoul" durant la bataille de reconquête face aux islamistes. "Au lieu de dépenser des millions de dinars dans leur campagne électorale, ils feraient mieux de reconstruire les maisons", lance-t-il.


(Lire aussi : Élections en Irak : quel pouvoir de nuisance pour l’État islamique ?)


Pas de représentants au niveau national
Dans un garage désaffecté de Tikrit, des centaines de personnes ont trouvé refuge, parmi des carcasses calcinées de voitures. De simples draps séparent les espaces de vie réservés à chaque famille.

Ici, personne ne veut aller voter. Rahman Mohsen, un ancien chauffeur de taxi de 47 ans, raconte qu'il a regagné sa ville de Baïji après le départ de l'EI mais que sa maison n'était plus qu'un amas de décombres. Il a alors décidé de se réfugier à Tikrit. "Les hommes politiques, on ne les voit que pendant la campagne électorale. Après, ils disparaissent", déplore-t-il.

A Bagdad, dans le complexe d'Amryat al-Fallouja (AAF), Jamal Khalaf veut voter pour un candidat qui a apporté son aide aux réfugiés. Mais il n'a plus de carte d'électeur et se demande s'il pourra mettre son bulletin dans l'urne. "L'Etat islamique punissait tous ceux qui avaient des cartes d'électeur, alors on s'en est débarrassé", explique-t-il. Beaucoup de réfugiés ignorent qu'ils peuvent voter même sans carte d'électeur, uniquement en justifiant de leur identité, selon la procédure dite du "vote conditionnel".

Autre grave problème pour les sunnites, leur manque de représentativité au niveau national. "Depuis l'occupation en 2003, il n'y a pas de représentant de Tikrit au conseil provincial. Ils disent à Bagdad que Saddam était de Tikrit, qu'il a dirigé le pays pendant 35 ans et que c'est amplement suffisant", s'insurge Najib Saeed, un vendeur de rue de 46 ans.


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Le monde arabe chiite en mode donneur de leçon de démocratie aux wahabites bensaouds sous influence sioniste.

FRIK-A-FRAK

21 h 30, le 11 mai 2018

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Commentaires (1)

  • Le monde arabe chiite en mode donneur de leçon de démocratie aux wahabites bensaouds sous influence sioniste.

    FRIK-A-FRAK

    21 h 30, le 11 mai 2018

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