Revenant à la charge sur la présence des déplacés syriens au Liban, le chef de l’État, Michel Aoun, a dénoncé une fois de plus « une implantation masquée », du fait que « la communauté internationale est décidée à lier le retour des déplacés à une solution politique » de la crise syrienne.
La prise de position a marqué la séance d’ouverture de la 5e édition de la Lebanese Diaspora Energy (LDE) à l’Arena Seaside (ex-BIEL). « Le plus grand risque auquel (le Liban) est aujourd’hui confronté est l’attitude de la communauté internationale concernant les déplacés. Cette position a été exprimée dans le communiqué conjoint des Nations unies et de l’Union européenne, à l’issue de la conférence sur l’avenir de la Syrie et de la région », qui s’est tenue à Bruxelles, a déclaré le chef de l’État. « Cette prise de position porte en elle l’idée d’une implantation masquée », a-t-il ajouté. « Cela va à l’encontre de notre Constitution et porte atteinte à notre souveraineté, et nous ne le permettrons jamais », a encore averti Michel Aoun. Et le chef de l’État de rappeler que « l’expérience des peuples poussés à l’exode dans le monde » prouve que leur retour demeure problématique. Le président Aoun a ainsi donné en exemple le cas des villages maronites de Chypre, après la partition de 1974, qui demeurent à ce jour des « villages fantômes » en attendant une hypothétique « solution politique » de la crise ; il a aussi rappelé que les Palestiniens chassés de leurs foyers en 1948 attendent toujours la mise en œuvre de la résolution 194 du Conseil de sécurité de l’ONU garantissant leur droit de retour.
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« Une guerre qui nous dépasse »
« Le Liban fait face aux conséquences d’une guerre sur laquelle il n’a aucune prise, et ce qu’il en supporte dépasse de loin ses capacités », a insisté le président Aoun, précisant qu’en l’espace de quelques années, sa population a augmenté de près de 50 %.
Et de demander aux Libanais de la diaspora, en particulier à ceux qui, parmi eux, ont un poids politique dans leur pays d’adoption, « de faire pression, dans le cadre des lois et règlements en vigueur, pour obliger la communauté internationale à revoir sa position ».
Le président a demandé en outre aux expatriés influents d’agir pour convaincre leurs gouvernements d’appuyer la candidature du Liban à l’ONU, en vue d’en faire « un centre permanent de dialogue entre les civilisations, les religions et les races », partant du fait que son pluralisme est « l’antithèse même de l’uniformité ».
Il a enfin demandé aux expatriés en mesure de le faire de s’investir dans les différents chantiers de redressement économique du pays, annonçant pour bientôt la fin de la mise au point d’un plan directeur pour ce redressement.
Par ailleurs, le chef de l’État s’est félicité de la nouvelle loi électorale en vertu de laquelle les expatriés libanais ont pu voter pour la première fois de l’histoire du Liban. « Les divergences d’opinion et de position autour de certaines questions, la différence dans les solutions face à certains problèmes seront débattues sous la voûte du Parlement, qui représente toutes les opinions et les forces politiques », s’est-il engagé.
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Changement de nom
Prenant également la parole au cours de la séance inaugurale, le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a pour sa part annoncé avoir élaboré un projet de loi visant à changer le nom du ministère des Affaires étrangères et des Émigrés, qui s’appellerait, sitôt la loi adoptée, « ministère des Affaires étrangères, de la Diaspora et de la Coopération internationale ».
Par ailleurs, M. Bassil a fait état de quatre réalisations de son ministère. « L’opération de recouvrement de la nationalité est en voie d’amélioration, et nous profiterons de ce congrès pour présenter au gouvernement un projet de loi afin de faciliter cette opération et d’élargir le nombre de personnes pouvant en profiter », a-t-il annoncé. Le ministre a ensuite parlé d’une augmentation de 9 à 12, et peut-être à 18, du nombre de sièges réservés aux députés de la diaspora (prévus par la nouvelle loi électorale). En troisième lieu, M. Bassil a annoncé que, pour encourager les expatriés à tisser des liens avec leur mère patrie, la Banque du Liban avait publié une circulaire accordant des prêts-logement à taux préférentiels et de longue durée aux expatriés désireux d’acheter des résidences au Liban. Enfin, M. Bassil a annoncé la création d’un « Conseil national de la diaspora » qui sera présidé par le chef de l’État et qui, après abolition « du fameux article 12 de la loi sur le ministère des Affaires étrangères », permettra aux expatriés de siéger au sein d’une assemblée représentative élue et autonome.Évoquant les législatives du 6 mai, le chef de la diplomatie libanaise a lancé : « Aux prochaines législatives, vous devez être un demi-million à voter ! » Environ 50 000 Libanais sur 82 000 inscrits sur les listes électorales de l’étranger ont voté lors du scrutin.
Fondation maronite dans le monde
La directrice de la Fondation maronite dans le monde, Hyam Boustany, a de son côté expliqué, lors de ce congrès, le rôle que la fondation a joué dans l’adoption de la loi sur le recouvrement de la nationalité libanaise. La parole a également été donnée au cours de la journée au vice-ministre grec des Affaires étrangères et à l’ambassadeur d’Italie, qui a parlé de la politique d’émigration de son pays. Enfin, plusieurs témoignages personnels ont été apportés par des émigrés, en des récits poignants d’authenticité.
Pour mémoire
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commentaires (5)
Mais comment le Hezbollah accepte que tant de sunnites restent au Liban ? Et leur ami Bachar est un traitre envers le Hezbollah, non.
Eleni Caridopoulou
17 h 41, le 11 mai 2018