Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, le président du Parlement, Nabih Berry, et le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, se sont tous les trois élevés contre la communauté internationale qu'ils accusent d'encourager les réfugiés syriens à rester au Liban, au lendemain d'une conférence internationale à Bruxelles qui a décidé de nouvelles aides pour les pays accueillant les réfugiés.
"Depuis huit ans, le Liban subit les conséquences de la crise syrienne et le fardeau des 1,5 million de réfugiés syriens" qu'accueille le pays, a regretté M. Bassil. "Il n'y a plus de raisons sécuritaires et politiques interdisant aux Syriens de revenir chez eux", a-t-il lancé.
Dans un communiqué publié la veille, M. Bassil avait déjà critiqué les positions de l'Union européenne et de l'ONU, à l'issue de la conférence de Bruxelles. "En réponse au communiqué publié par l'UE et l'ONU, et qui est en contradiction avec la politique générale du Liban concernant les déplacés syriens, M. Bassil critique les termes employés et que le Liban rejette, tels que +le retour temporaire+, ou +le retour volontaire+, ou encore +le choix de rester+", peut-on lire dans le communiqué. "Le communiqué en question accuse le Liban de chasser les déplacés, ce qui est absolument infondé", poursuit M. Bassil, en dénonçant "des termes visant à effrayer", tout en rappelant que "la situation sécuritaire en Syrie s'est améliorée". La semaine dernière, le ministre avait accusé le HCR d'entraver le retour volontaire des réfugiés syriens dans leur pays.
Mise en garde contre l'implantation
En soirée, le chef de l'Etat, Michel Aoun, a également critiqué la communauté internationale. "Nous rejetons le communiqué publié par l'Union européenne et l'ONU et nous considérons qu'il porte atteinte à la souveraineté et aux lois libanaises", a écrit la présidence de la République sur sa page Twitter. "Ce communiqué met le Liban en danger car il vise, de manière camouflée, à obtenir l'implantation des déplacés syriens au Liban", poursuit le chef de l'Etat. "Le Liban tient à une solution politique en Syrie, mais il ne faut pas conditionner le retour des déplacés à une telle solution. De par mon discours d'investiture, je suis tenu de sauvegarder l'indépendance du Liban et l'intégrité de son territoire, et le contenu du communiqué contrevient à la Constitution", conclut Michel Aoun.
Le bureau de presse de M. Berry a de son côté publié un communiqué dans lequel le chef du Législatif adopte une position similaire. "Nous avons déjà demandé à plusieurs reprises qu'il y ait une coopération avec le gouvernement syrien afin que nos frères syriens rentrent chez eux dans les zones libérées et désormais sécurisées. (...) Malgré les relations diplomatiques (entre le Liban et la Syrie) (...), le gouvernement libanais est resté sourd, jusqu'à la publication du communiqué de l'UE et de l'ONU qui pousse à la naturalisation (des déplacés syriens) au Liban et au morcellement du territoire et de la population syriens", peut-on lire dans le communiqué de M. Berry. "C'est pour cela que j'exprime mon opposition, et celle de tout le Parlement libanais, au communiqué en question", conclut le chef du Législatif.
La communauté internationale réunie mardi et mercredi à Bruxelles a promis mercredi 4,4 milliards de dollars (3,6 mds EUR) pour aider les millions de réfugiés syriens en 2018 et a exhorté la Russie et l'Iran à faire pression sur Damas pour négocier la fin d'une guerre entrée dans sa huitième année.
Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, présent à la réunion, a affirmé devant les donateurs internationaux que le Liban qui accueille près d'un million de réfugiés syriens enregistrés auprès de l'ONU continuait d'être "un grand camp de réfugiés".
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La Syrie veulent qu'ils restent au Liban pour mettre le bordel dans le pays
Eleni Caridopoulou
21 h 07, le 26 avril 2018