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Moyen Orient et Monde - Éclairage

En France, l’islam militant et l’élection présidentielle : la doctrine du « moindre mal »

S'appuyant sur des avis d'ulémas étrangers, des imams français s'érigent en chantres de la participation électorale.

Capture d’écran de la vidéo de Noureddine Aoussat, imam français (à gauche sur la photo) appelant au vote en citant l’avis du cheikh saoudien Mohammad ibn Salih ibn Uthaymin, qui confirme que le vote est licite pour les musulmans sous certaines conditions.

« Faut-il voter en France pour éviter le pire ? » Telle est la question posée au cheikh saoudien Souleimane Rouhayli, dans une vidéo publiée le 25 mars dernier sur une page YouTube de la mouvance salafiste, par des membres de la communauté musulmane française.

La question est loin d'être ubuesque. Car si le « vote musulman » demeure une notion trop déterministe pour les sociologues, l'assertion s'avère plus nuancée lorsqu'il s'agit d'étudier la participation des musulmans appartenant aux franges de l'islam militant, qui ne définissent pas, en théorie, leurs engagements en dehors de ce qui est légiféré par le fiqh, la jurisprudence islamique.

Depuis une quinzaine d'années, nombreux sont les prédicateurs de l'islam militant, dont les fers de lance dans l'Hexagone demeurent les Frères musulmans et les salafistes quiétistes, qui défendent le caractère licite du vote en pays non musulman.

 

(Lire aussi : L’Église catholique « frileuse » à la veille de la présidentielle)

 

 

Un apolitisme controversé depuis les années 1990
« Islam militant est une formule que je préfère utiliser à celle, trop floue, d'islam radical », préconise d'emblée Samir Amghar, chercheur à l'European Foundation for Democracy, dans un entretien accordé à L'Orient-Le Jour. Ce concept jugé plus précis « englobe certaines minorités violentes comme les takfiristes ou encore le mouvement revivaliste Tabligh (prédication) venu d'Inde », précise le sociologue. Toutefois, les deux branches les plus représentatives de l'islam militant dans l'Hexagone sont « les Frères musulmans, apparus en Égypte en 1928, et les courants salafistes : politique, révolutionnaire, et la majorité quiétiste », poursuit Samir Amghar. Affiliés au hanbalisme, l'une des quatre écoles de pensée ayant fondé le droit islamique au VIIIe siècle, les salafistes sont également des adeptes des enseignements wahhabites, qui dominent en Arabie saoudite.

Par peur des divisions (« fitna ») liées aux logiques partisanes de la politique française, le salafisme quiétiste a préféré éviter toute forme de contestation islamique politisée au cours des années 1990, conforté dans son analyse par l'exemple de la sanglante « décennie noire » en Algérie (1991-2002). En revanche, « pour les Frères musulmans, le positionnement est simple : il faut participer à la vie citoyenne en France et en Europe », explique M. Amghar, en rappelant que le discours du Suisse Tariq Ramadan, figure emblématique de la théologie des Frères musulmans en Occident et petit-fils du fondateur de la confrérie, Hassan al-Banna, est toujours allé en ce sens.

 

(Lire aussi : Débat présidentiel Macron contre Le Pen : chiffres, faits, affirmations (fact-checking))

 

 

« Moindre mal » contre l'« abstentionnisme actif »
Le rejet des forces politiques traditionnelles et la montée en flèche du Front national nuancent l'attitude de l'islam militant français, dans ce contexte d'élection présidentielle cette année. Du côté des prédicateurs salafistes, une minorité appelle désormais au vote, au nom de la doctrine du « moindre mal », expose Samir Amghar. Et des chefs religieux étrangers ont confirmé cette jurisprudence : à la veille du premier tour le 23 avril dernier, Richi Abdel-Hakim, aumônier musulman de prison en France, a partagé la vidéo d'une fatwa du cheikh saoudien Mohammad ibn Salih ibn Uthaymin (1926-2001) sur son mur Facebook. Ce cheikh, l'un des trois pères fondateurs du salafisme contemporain, autorise dans la vidéo à voter en Occident. De même, le cheikh saoudien Souleimane Rouhayli s'exprime en ces mots sur YouTube : « Mais si l'affaire est entre deux maux, entre une personne qui appelle à chasser les musulmans et fermer leurs mosquées en prétendant préserver le pays, et une personne qui appelle à donner aux musulmans leurs droits, moi je considère qu'il est permis de voter. » Mais il ne s'arrête pas à la simple recommandation : « Il se peut même qu'il soit obligatoire de voter dans ce cas, car il est obligatoire pour les musulmans de repousser le mal, du moment qu'ils n'ont pas la possibilité d'émigrer. »

Outre les références étrangères, des imams français s'érigent en chantres de la participation électorale, tendance incarnée entre autres par le professeur Noureddine Aoussat, qui soutient le candidat Emmanuel Macron. Il a désavoué à travers deux tribunes publiées dans Mediapart la nouvelle doctrine de Tariq Ramadan d'« abstentionnisme actif ». Samir Amghar précise que cet appel à l'abstention est nouveau de la part de l'intellectuel, « lié à un rejet de l'offre politique actuelle, mais il continue à appeler à l'action locale ».
Noureddine Aoussat et Tariq Ramadan ont un point commun : ils refusent d'appeler à voter pour la plupart des candidats n'allant pas dans le même sens que les musulmans sur les problématiques de laïcité ou de gestion de la crise syrienne et des relations avec la Russie.

Sur un autre plan, la gauche traditionnelle ne séduit pas non plus l'islam militant, qui s'est opposé à certaines décisions du quinquennat Hollande, « comme la question du mariage pour tous ou la gestion des affaires de police qui ont suivi les attentats du 13 novembre », souligne Samir Amghar. Sans faire office de processus quantifiable, le vote en faveur du candidat souverainiste François Asselineau semble séduire l'islam militant, et le phénomène est suffisamment important pour encourager Noureddine Aoussat à publier une longue tribune sur le sujet pour convaincre de ne pas voter pour lui. L'idée n'est pas si saugrenue pour Samir Amghar : « Asselineau est connu pour ses thèses complotistes qui entrent en résonance avec un certain nombre de fidèles musulmans qui considèrent par exemple que le 11 septembre 2001 est une invention américaine. »

 

 

 

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La question est loin d'être ubuesque. Car si le « vote musulman » demeure une notion trop déterministe pour les...

commentaires (2)

COMMENT PEUVENT-ILS AVOIR LES MEMES DROITS CIVILS ET AUX ELECTIONS QUE CE SOIT EN FRANCE OU AILLEURS QUAND ILS N,APPLIQUENT PAS LES MEMES DEVOIRS ET S,OBSTINENT A CARACTERISER ET A CONSIDERER MECREANTS LES GENS QUI LES ONT ACCUEILLIS DANS LEURS PAYS PARCE QUE ILS NE SONT PAS DES MUSULMANS... LES ABRUTIS OCCIDENTAUX DEVRAIENT BIEN Y PENSER A CA...

LA LIBRE EXPRESSION

15 h 56, le 05 mai 2017

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Commentaires (2)

  • COMMENT PEUVENT-ILS AVOIR LES MEMES DROITS CIVILS ET AUX ELECTIONS QUE CE SOIT EN FRANCE OU AILLEURS QUAND ILS N,APPLIQUENT PAS LES MEMES DEVOIRS ET S,OBSTINENT A CARACTERISER ET A CONSIDERER MECREANTS LES GENS QUI LES ONT ACCUEILLIS DANS LEURS PAYS PARCE QUE ILS NE SONT PAS DES MUSULMANS... LES ABRUTIS OCCIDENTAUX DEVRAIENT BIEN Y PENSER A CA...

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 56, le 05 mai 2017

  • Depuis 10 000 ans d'histoire des religions et des civilisations , seul l'islam pose problème de partout dans le monde .....pourquoi..?

    M.V.

    15 h 23, le 05 mai 2017

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