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Liban - La situation

Paranoïa et surenchères politiques place de l’Étoile

Visiblement en colère, M. Makari lève la séance. Photo ANI

On serait presque tenté de saluer la grogne populaire provoquée par le vote, interrompu hier de manière fracassante au Parlement, des ressources nécessaires pour le financement de la grille des salaires. Un nouveau coup de gueule resté cependant sans objectif et bercé par des slogans infructueux.

Les mouvements de protestation pluriels qui ont essaimé en plusieurs coins du pays, après avoir gagné les ordres des professions libérales, sont en tous les cas symptomatiques d'une société épuisée par les difficultés socio-économiques appelées à s'aggraver avec la nouvelle batterie de taxes prévues, mais surtout par l'état de déliquescence général auquel est parvenu l'État.

Le spectacle folklorique qui s'est déroulé hier à la place de l'Étoile n'a fait que raffermir cette conviction. Les échanges acerbes qui ont eu lieu entre les députés Kataëb et le vice-président de la Chambre, Farid Makari – qui a vraisemblablement voulu en découdre avec le turbulent Samy Gemayel –, ont toutefois révélé les tensions sous-jacentes aux décisions manifestement impopulaires et largement contestées que les représentants de la nation étaient appelés à prendre. La tâche des parlementaires était d'autant plus difficile qu'elle consistait à couvrir le coût de la grille par les taxes correspondantes, un équilibre difficile à trouver en temps de crise et autrement problématique à quelques mois des législatives. D'où la valse des surenchères et des conférences de presse qui se sont enchaînées pour justifier la suspension de la séance parlementaire.
Les accusations adressées par M. Makari au chef des Kataëb ne seraient ainsi que la pointe de l'iceberg puisque la décision de suspendre la séance aurait été prise d'avance, après moult réunions tenues en marge entre les différents blocs. Le député du Metn s'en est farouchement défendu d'ailleurs lors d'une déclaration à la presse en se demandant, sur un ton ironique, comment quatre malheureux députés auraient pu provoquer le défaut de quorum.

 

(Lire aussi : « Je veux les empêcher de m’affamer »)

 

Certes il y avait dans ce remue-ménage un parfum de règlement de comptes, M. Makari ainsi que des députés du CPL s'étant déjà plaints de la politique de tergiversation et de « surenchère » pratiquée par les Kataëb, notamment en commissions mixtes. Il y avait aussi une légère dose de paranoïa de la part des députés qui craignaient d'ores et déjà la réaction de la rue qui avait commencé à gronder. La diffusion sur les réseaux sociaux d'une liste fallacieuse de taxes, perçue comme une déclaration de guerre au Parlement et au gouvernement, a été la goutte qui a fait déborder le vase.
Certains y vont vu une tentative de sabotage des efforts entrepris par le mandat actuel. M. Hariri a promis de son côté de traîner devant la justice ceux qui ont fait circuler cette liste, même si cela devait requérir « la levée de l'immunité d'un membre du Parlement », a déclaré le chef du gouvernement.
Samy Gemayel a toutefois catégoriquement démenti que les Kataëb soient à l'origine de ces « fausses taxes ».

En soirée, une déclaration du ministre des Finances à ce propos fait dévier les soupçons vers « la machine des grandes entreprises et des banques qui seraient derrière cette politique de parasitage puisque c'est bien la première fois qu'une taxe est imposée à ces secteurs », a dénoncé Ali Hassan Khalil.
La réaction de la rue ne s'est pas fait attendre: au centre-ville, sous les drapeaux flottants des Kataëb venus nombreux pour l'occasion, les syndicats, les membres de la société civile et autres mécontents se sont mobilisés pêle-mêle, avant, durant et après la levée de la séance parlementaire, pour dénoncer la série de taxes en cours de vote. Au Liban-Nord, les protestataires soutenus par l'ancien ministre de la Justice, Achraf Rifi, qui a appelé ses partisans à rejoindre la foule, ont également crié au scandale, dénonçant une augmentation des taxes à laquelle aurait dû se substituer une politique de lutte contre la corruption et la dilapidation.

Un leitmotiv repris par le chef du PSP, Walid Joumblatt, qui a tenu à rappeler que sa formation a avalisé, dès le départ, le principe de l'adoption de la grille des salaires « à condition d'assurer les rentrées adéquates et de mettre un terme à la dilapidation (des fonds publics) » et aux prises de position populistes.
Le dernier rapport par Transparency International, qui place le Liban 136e rang sur 176 pays du monde au classement 2016 de l'indice de perception de la corruption, est venu conforter l'image que les Libanais, dans leur grande majorité, ont désormais de la classe politique accusée de tremper plus que jamais dans les affaires.

 

 

 

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Les mouvements de protestation pluriels qui ont essaimé en plusieurs coins du...

commentaires (7)

Scandaleux et honteux...

Soeur Yvette

16 h 47, le 17 mars 2017

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • Scandaleux et honteux...

    Soeur Yvette

    16 h 47, le 17 mars 2017

  • Quel misérable caravansérail, une cacophonie nationale bien organisée.... Que voulez-vous: ces Messieurs qui, soit-disant discutent grille des salaires, sont en fait les responsables de cette déliquescence et corruption généralisée. Ce sont eux qui perpétuent ce système confessionnel, communautaire, de féodalisme, de zaimisme arrogant, de clientélisme... Le vivre ensemble, mais certainement à leur niveau, ils s'entendent sur le partage du gâteau national comme des larrons en foire, ferment les yeux sur les abus bien connus de leurs adversaires, et font semblant de prendre soin du citoyen moyen alors qu'ils s'en foutent comme de l'an 40, tant que leurs manigances marchent bien, leurs comptes en banque bien remplis, leur famille et leur tribu vont bien, ils ont leur petit yacht et avion privé, quelques propriétés à l'étranger, de multiples passeports au cas où, et .....après moi le déluge! Non, rien ne va changer de sitôt tant qu'il n'existe pas de nationalisme supra communautaire, d'une nouvelle génération éduquée, sécularisée pour bâtir le vrai Liban de demain...Il ne faut pas rêver en couleurs et ce n'est pas demain la veille!

    Saliba Nouhad

    16 h 22, le 17 mars 2017

  • Il y a des dizaines de facons de financer cette loi qui est necessaire sans avoir a taxer la population Mais pour cela il faudrait taper dans les poches des personnes et partis qui nous gouvernent ou qui sont soutenus par certains. par example: le port et l'aeroport a eux seuls peuvent vraiment financer cette loi si on mettait fin a la situation de certaines methodes mafieuses en y ajoutant des taxes plus eleves sur les interets, les profits des banques et commencer a appliquer la fameuse phrase de M Raymond Edde " d'ou as tu cela?" Evidement personne ne veut revenir en arriere comme l'a dit M Basil dans son dernier discour pour des raisons evidentes En definitive pourquoi hausser les salaires pour les reprendre aux gens par des impots ridicules? taxer l'alcool mais pas les cigarettes : suivez mon regard aussi pauvre Liban

    LA VERITE

    13 h 15, le 17 mars 2017

  • Scandaleux et honteux. La majorité des politiciens sont corrompus et se fichent éperdument de l'intérêt du citoyen.

    Tony BASSILA

    10 h 43, le 17 mars 2017

  • « Je suis tombé par terre, C'est la faute à Voltaire, Le nez dans le ruisseau, C'est la faute à Rousseau. »

    George Khoury

    10 h 16, le 17 mars 2017

  • LE THEATRE DE LA POLICHINNERIE CONTINUE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 16, le 17 mars 2017

  • Avons-nous besoin de nouvelles preuves ? La corruption est visible depuis longtemps !

    Samira Fakhoury

    08 h 02, le 17 mars 2017

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