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Liban - Échelle des salaires

La grogne atteint, pour la première fois, le corps de la magistrature qui entame un mouvement de protestation

Les travailleurs, toutes catégories confondues, et les enseignants du secteur public en grève demain, mercredi, pour protester contre le projet de loi salariale et les nouvelles mesures fiscales. Ils se retrouveront à 17 heures, place Riad el-Solh.

Le syndicat des travailleurs annonce l’ordre de grève, demain mercredi 15 mars, et un sit-in à 17 heures, place Riad el-Solh. Photo ANI

À deux jours du vote au Parlement de l'échelle des salaires, la grogne populaire enfle et s'étend à différents secteurs, publics ou privés. Une première est apparue sur ce plan : mécontents d'être traités comme des fonctionnaires, les magistrats ont exprimé ouvertement leur colère et ont annoncé leur décision de s'abstenir d'assurer un service normal dans l'exercice de leurs fonctions. Quant aux travailleurs, ils appellent à un sit-in demain mercredi à 17 heures, place Riad el-Solh. Les fonctionnaires retraités montent également au créneau, dénonçant l'injustice dont ils se disent victimes. Les enseignants des secteurs publics secondaire et technique, qui poursuivent leur grève, seront rejoints demain par les instituteurs de l'école primaire et complémentaire, qui invitent à l'escalade. Zoom in sur la situation.

 

(Lire aussi : Les nouvelles taxes prévues pour financer la grille des salaires)

 

La magistrature assure un service minimum
C'est après consultation avec plus de 250 juges réunis hier que le Conseil supérieur de la magistrature a fait part de son vif mécontentement qu'il a exprimé dans un communiqué. « Les juges s'abstiennent de signer le courrier, à l'exception des gardes à vue », explique à L'Orient-Le Jour une source judiciaire. Autrement dit, « ils assureront le service minimum et resteront dans leurs bureaux, jusqu'à ce que le projet de loi lié à l'échelle des salaires soit retiré, par le Parlement ou par le gouvernement ».

Plusieurs articles de la grille des salaires sont à l'origine de la grogne des magistrats. « Le projet de loi donne au gouvernement la possibilité d'annuler la mutuelle indépendante des juges dans un délai de 6 mois, relève la source précitée. Les aides sociales, scolaires et médicales des juges seraient alors jumelées avec la caisse des fonctionnaires du secteur public. Or le pouvoir judiciaire est considéré par l'article 20 de la Constitution comme un pouvoir indépendant et refuse d'être placé sur un pied d'égalité avec les fonctionnaires de l'exécutif », souligne la source, faisant part de sa crainte pour l'indépendance judiciaire, car les magistrats « pourraient alors faire l'objet de pressions de la part de l'exécutif ».

Autre sujet de mécontentement des magistrats, les vacances judiciaires que le projet de loi envisage de ramener à un mois par an, au lieu de deux mois. « Un magistrat n'est pourtant pas un fonctionnaire, martèle la source. Il émet des jugements certes, mais le reste du temps, c'est lui qui travaille à la rédaction de ces jugements », assure-t-elle, observant que partout au monde, les vacances judiciaires sont de deux mois, voire deux mois et demi.

Enfin, toujours selon la source susmentionnée, « une fois l'échelle des salaires adoptée, les fonctionnaires du premier degré toucheraient des salaires supérieurs au salaire d'un juge ». « Chose inédite, c'est bien la première fois qu'une telle chose arrive », dénonce-t-elle.
De ce fait, dans l'attente que leurs revendications aboutissent, les magistrats s'abstiennent d'assurer un service normal, car « ils ne peuvent pas bien entendu lancer un ordre de grève, vu qu'ils ne sont pas fonctionnaires ».
Notons que le Conseil des juges chériés a publié hier soir un communiqué dans lequel il exprime sa solidarité avec le Conseil supérieur de la magistrature.

 

(Lire aussi : Le Conseil des ministres a achevé l'examen de l'avant-projet du budget 2017)

 

« Les travailleurs ne reçoivent rien »
De leur côté, c'est par un sit-in, demain à 17 heures, place Riad el-Solh, que les travailleurs envisagent de faire part de leur colère, toutes catégories confondues. Ils réclament par la voix de la Fédération internationale des syndicats des ouvriers et des employés au Liban (Fenasol) « que le salaire minimum soit porté à un million deux cents mille livres libanaises » et que les aides sociales soient assurées. « Nous en avons assez des politiques et des mesures fiscales », martèle le communiqué du syndicat, mené par son président, Castro Abdallah. Le syndicat ne décolère pas à l'égard des autorités qu'il accuse d'imposer les pauvres et les travailleurs à revenu limité « à hauteur de 80 % », alors que « les secteurs financier, bancaire, immobilier et les grandes richesses... ne contribuent qu'à 20 % des revenus de l'État ». « Vous nous imposez des taxes supplémentaires, mais en contrepartie, vous ne nous assurez rien, ni eau, ni électricité, ni habitat, ni santé, ni éducation. Mais au contraire, vous vous accordez des augmentations, des retraites, des bonus et adoptez une loi qui pousse les anciens locataires démunis à l'exode au bénéfice des promoteurs immobiliers et des banques... » accuse le communiqué.

Quant aux fonctionnaires, militaires et enseignants retraités, menés par Issam Bekdachi, ils dénoncent le manque d'équité de la grille des salaires à leur égard et réclament que tous les retraités de la fonction publique soient logés à la même enseigne. « Est-il possible que les traitements de deux retraités de la fonction publique diffèrent de 400 % parfois, en fonction de l'année de la retraite ? »
demande le communiqué publié par le regroupement de plusieurs ligues et conseils de retraités.
Face à cet état des lieux, non seulement la grève des enseignants de l'école publique promet d'être quasi générale demain, mais ces derniers, mécontents du projet de la grille des salaires qu'ils considèrent injuste à leur égard, annoncent d'ores et déjà leur participation massive au mouvement syndical, place Riad el-Solh.

 

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