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Liban - Loi sur les loyers

Le torchon brûle entre anciens locataires et propriétaires

Les locataires lancent un appel à manifester, demain à 17h à Hamra, en direction du palais présidentiel.

Le bras de fer entre propriétaires et anciens locataires se poursuit. Archives AFP

Moins d'une semaine après l'amendement par le Parlement de la loi sur les anciens loyers, et alors que la publication du texte définitif se fait attendre, le torchon brûle entre anciens locataires et propriétaires. Malgré l'assouplissement de la loi en faveur des anciens locataires, ces derniers rejettent le texte et dénoncent ouvertement cette loi qui les met à la rue et détruit le tissu social des quartiers traditionnels. Ils lancent même un appel à l'escalade et à manifester demain, jeudi, à 17 heures, à Hamra, devant les magasins Red Shoe.

De leur côté, les propriétaires se disent soucieux de clore le débat et de faire appliquer la loi au plus vite. Invitant l'État à assumer le plus rapidement les anciens locataires âgés et défavorisés, ils réclament la publication du nombre exact d'anciens locataires démunis. Ils appellent surtout les comités de défense des droits des anciens locataires à cesser de faire de la surenchère.
« Cette loi est un massacre. Ses intentions sont claires à l'encontre de la population : vider les quartiers traditionnels, créer un Solidere II, pour garder dans les villes la classe riche et les ressortissants du Golfe. »

Antoine Karam, architecte de formation et membre du Comité de défense des droits des anciens locataires arrive à grand-peine à contenir sa colère contre « l'État qui ne prend pas en compte les personnes âgées et les retraités, mais se contente de leur donner un sursis de 12 ans avant de mourir ».

 

(Lire aussi : Le Parlement se prononce pour un assouplissement en faveur des anciens locataires)

 

Disséquant les amendements adoptés par le Parlement, il rejette l'estimation de la valeur locative d'un logement à 4 % de sa valeur immobilière, et réclame que la valeur locative ne dépasse pas 1,5 % du coût de l'appartement. De la sorte, l'État n'aura pas à financer de fonds d'entraide, sauf pour les plus pauvres. « Est-ce aussi facile que cela pour une famille de la classe moyenne qui vit dans un appartement estimé à 300 000 dollars de payer un loyer de 1 000 dollars par mois, vu la cherté de vie ? » demande-t-il à ce propos.

M. Karam rejette également les changements concernant les bénéficiaires du fonds de solidarité. « Le fonds de solidarité comptabilisera les revenus de tous les habitants d'un même logement. Cela poussera donc les personnes âgées retraitées à renvoyer de chez eux leurs enfants qui travaillent, afin de bénéficier du fonds d'entraide », déplore-t-il, estimant que 180 000 familles seront lésées par la loi sur la libéralisation des loyers.
C'est dans ce cadre qu'il implore le président de la République, Michel Aoun, de renvoyer le texte de loi au Parlement, et fait part de l'intention des locataires de marcher, demain jeudi, depuis Hamra jusqu'au palais présidentiel.

Antoine Karam revient également sur l'article 45 de la loi, qui n'a pas été amendé. « Il impose aux locataires de participer aux frais de ravalement d'un immeuble, à hauteur de 80 %, le propriétaire lui n'étant tenu d'assumer que 20 % des dépenses, dénonce-t-il. Mais que faire s'ils n'en ont pas les moyens ? »
« Gardez les locataires chez eux ! » lance l'architecte qui invite les autorités à adopter une politique de logement, ce qui permettrait aux anciens locataires de devenir propriétaires et préserverait le tissu social des quartiers résidentiels. « S'ils ne désirent pas acquérir leur appartement, au moins devraient-ils bénéficier d'une indemnité de départ. »

 

(Repère : Liban : Décryptage de la loi de libéralisation des loyers anciens)

 

Les propriétaires espèrent un geste de l'État
Tout autre est le discours du président du Comité des propriétaires, Patrick Rizkallah. « Cette loi ainsi amendée est aujourd'hui la meilleure possible. Elle protège les pauvres. Pendant 12 ans, ils n'assumeront pas l'augmentation de loyer, c'est donc l'État qui paie pour eux », souligne-t-il. Il explique que les propriétaires ont accepté ces amendements en faveur des locataires « afin que le dossier soit clôturé ou en voie de règlement ». Il invite toutefois le Premier ministre, Saad Hariri, à créer « sans attendre » le fonds de solidarité aux anciens locataires démunis, car « la loi doit s'appliquer sitôt publiée dans le Journal officiel ».

Il lance de plus un appel au parquet, lui demandant de « mettre fin aux campagnes subversives contre les propriétaires », et accuse les comités de défense des anciens locataires de gonfler les chiffres. « Ils annoncent que 180 000 familles sont touchées par la loi sur les anciens loyers. Or la commission parlementaire de l'Administration et de la Justice dénombre moins de 80 000 anciens locataires. Quant au ministère des Finances, il a affirmé n'avoir reçu que 4 000 demandes d'accès à la caisse de solidarité. »

S'adressant aux comités de défense des anciens locataires, il les invite à cesser de s'opposer à la loi. « Nous ne sommes pas contre les anciens locataires. Travaillons plutôt ensemble à d'autres objectifs, notamment pour obtenir que l'État respecte le droit au logement », leur dit-il. Il estime à ce titre que « ce n'est pas au propriétaire, mais à l'État, d'assurer ce droit ». M. Rizkallah tient à rappeler que « les propriétaires eux aussi ont des familles à nourrir, des enfants à envoyer à l'école et à l'université ». Il révèle à ce propos que l'immeuble dont il est propriétaire, à Hazmieh, ne lui rapportait, avant la mise en application de la loi de 2014, que 100 000 LL par mois. « Puis-je retaper mon immeuble avec cette somme, demande-t-il, alors que nombre d'immeubles sont aujourd'hui menacés d'effondrement ? »

Interpellant par la même occasion le Parlement, M. Rizkallah réclame que cette loi soit complétée d'une série de lois encourageant le leasing immobilier. Il avoue surtout avoir aussi espéré un geste de l'État en direction des propriétaires. « Nous aurions voulu être indemnisés pour ces longues années à percevoir des loyers modiques, ou du moins être exemptés des taxes foncières, afin de nous permettre de remettre nos biens en état. »

 

 

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commentaires (3)

C'est malheureusement un problème entre personnes également dans la difficulté. Les locataires ne pouvant pas payer plus pour leur loyer déjà que la vie est exorbitante au Liban et des proprios devenus mendiants/associés de leurs propres bien . Il faudra un sage qui puisse trancher ce problème. Les nouveaux loyers avec des nouveaux contrats ne connaissent plus ce genre de problèmes parce-que les bases sont clairement définies.

FRIK-A-FRAK

14 h 31, le 25 janvier 2017

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Commentaires (3)

  • C'est malheureusement un problème entre personnes également dans la difficulté. Les locataires ne pouvant pas payer plus pour leur loyer déjà que la vie est exorbitante au Liban et des proprios devenus mendiants/associés de leurs propres bien . Il faudra un sage qui puisse trancher ce problème. Les nouveaux loyers avec des nouveaux contrats ne connaissent plus ce genre de problèmes parce-que les bases sont clairement définies.

    FRIK-A-FRAK

    14 h 31, le 25 janvier 2017

  • deja que les constructeus qui veulent ecouler leur stock n'arrivent pas a vendre. si les proprio vont avoir des appartments qui vont se liberer et vouloir vendre, s'en est fini de l'immobilier a Beyrouth

    George Khoury

    11 h 17, le 25 janvier 2017

  • seul l'etat libanais est responsable de ce probleme , aussi ne faut il pas en faire payer le prix aux proprietaires . l'etat libanais doit simplement payer des indemnites aux locataires tout comme il l'avait fait aux milliers de familles ayant fuit leur village a cause de la guerre et/ou des frappes israeliennes, meme ceux squatte des milliers d'habitations souvent sans (raison) , et ayant touche des indemnites meme plus d'une fois en esperant que cela se fera avec un minimum de "dommages collateraux" aux deniers du peuple.

    Gaby SIOUFI

    10 h 21, le 25 janvier 2017

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