Migrants syriens : "Batroun est aux Libanais", assure Bassil

Gebran Bassil, chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste), a affirmé samedi qu'il serait extrêmement heureux et fier « lorsque des résultats pratiques seront obtenus en réduisant progressivement le nombre de réfugiés syriens de notre région, jusqu'à ce que Batroun (Liban-Nord) soit complètement libérée ».

Ces propos de M. Bassil ont été tenus dans un discours prononcé à l'occasion d'une conférence sur les municipalités à Batroun, au cours de laquelle le dirigeant aouniste a affirmé que la ville « a présenté un nouveau modèle pratique et pragmatique pour résoudre le problème des migrants syriens, en les plaçant sous l'autorité des municipalités et en appliquant les lois libanaises ». Il n'a cependant donné aucune précision sur ce qu'impliquerait le modèle auquel il fait référence.

Les ressortissants syriens présents au Liban sont confrontés à un regain des violences verbales et physiques au cours des dernières semaines, après l'assassinat d'un responsable des Forces libanaises pour lequel certains d'entre eux ont été arrêtés.

La semaine dernière, des députés du CPL ont interrogé le Premier ministre sortant Nagib Mikati au sujet d'un programme d'aide d'un milliard d'euros promis au Liban par l'Union européenne (UE). Cette aide est suspectée par certains, dont le CPL, de servir de « pot-de-vin » au Liban pour maintenir sur son sol 1,5 million de Syriens (selon les chiffres officiels) et les empêcher d'émigrer vers l'Europe.

M. Bassil a déclaré que lorsque la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, est venue au Liban, elle a été applaudie pour l'initiative du milliard de dollars, « qui vise pratiquement à prolonger le séjour des migrants au Liban pour quatre années supplémentaires, en échange de la possibilité pour les Libanais d'entrer dans les pays de l'UE pour y travailler de façon saisonnière ». Il a souligné que « lorsque les forces de sécurité, en particulier l'armée libanaise, sont invitées à renforcer le contrôle des frontières terrestres pour empêcher l'entrée de Syriens illégaux, tout comme elles contrôlent les frontières maritimes pour faire barrage à la migration des migrants vers l'Europe, certains y ont vu un problème personnel avec le commandant de l'armée ».

Le général Joseph Aoun et Gebran Bassil se sont maintes fois opposés, notamment lorsque ce dernier et son parti ont rejeté la prolongation du mandat du commandant en chef de l'armée, la jugeant illégale tout en qualifiant le chef de la troupe de corrompu.

Dans une interview accordée mercredi à la chaîne russe Russia Today, M. Bassil a déclaré que « la solution à la crise migratoire n'est pas de soutenir l'armée libanaise dans sa lutte contre l'émigration vers l'Europe, mais d'aider à renvoyer les migrants en Syrie ».

Priorité aux Libanais

M. Bassil a précisé que son discours ne s'adressait pas « aux Syriens mais aux réfugiés, car les Syriens sont un peuple voisin, amical et cher, et certains d'entre eux travaillent avec nous et font partie de notre société productive que nous voulons préserver, mais dans les limites de nos besoins, de nos capacités et de nos ressources ». « Nous ne voulons pas gâcher les rapports humains que nous entretenons avec le peuple syrien, ni gâcher la relation spéciale avec leur pays, ni perdre notre sentiment de sympathie avec un peuple qui a été torturé et déplacé. Nous ne voulons pas être racistes. Nous voulons simplement être patriotes, et cela nécessite que nous donnions la priorité à notre peuple et à notre pays », a-t-il encore dit.

Le chef de la formation aouniste a rappelé que depuis 2011, il s'est exprimé ouvertement à la fois au sein du gouvernement et en public, exigeant un contrôle strict des frontières et autorisant l'entrée uniquement des cas humanitaires et sanitaires, conformément aux décisions des ministres de la Santé et de l'Intérieur. « Le Liban n'est pas à vendre, Batroun n'est pas à vendre », a-t-il encore dit.

Les dirigeants politiques libanais de tous bords appellent régulièrement au rapatriement immédiat des Syriens. Ils affirment que les conditions actuelles en Syrie permettent un tel retour, alors que les Nations unies et d'autres groupes de défense des droits de l'homme soutiennent le contraire.

Environ 1,5 million de Syriens vivent au Liban, ce qui en fait le pays qui compte le plus grand nombre de réfugiés par habitant au monde. Quelque 800 000 d'entre eux sont enregistrés auprès des Nations unies. L'enregistrement des réfugiés syriens au Liban a été suspendu en 2015, à la demande du gouvernement libanais.

Le conflit qui a éclaté en Syrie en 2011 se poursuit aujourd'hui, avec plus de 4 000 civils et combattants tués dans le pays en 2023, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme.