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Culture - Concert

Ibrahim Maalouf, envoûtant charmeur de serpents

Il entre, seul, à pas de velours dans ses tennis blanches, sans musique, et se tient devant un Bercy comble et déjà comblé. Il se pavane sur scène, s'offre le luxe langoureux d'un beatbox, présente ses musiciens, profite de cet instant suspendu. Il prend un bain de foule et se lave à ses hurlements. Ibrahim Maalouf est le second trompettiste à remplir Bercy après Miles Davis il y a 32 ans, et pour fêter ses dix ans de carrière, il s'apprête à offrir un spectacle de quatre heures à son public. « Je n'en crois pas mes yeux... Heureusement qu'il me reste mes oreilles », sourit-il. Et lorsqu'il a assez fait grimper la tension, il empoigne soudain son instrument, entame Diaspora, prend son temps et son pied, climaxe sur le hard-rock de Ya Hala, entonné en chœur par le public, et redescend lentement sur une improvisation d'une agilité folle.

La foule est suspendue à ses notes ; il la tient d'une main de cuivre. Il réussit avec un naturel désarmant à rendre Bercy intimiste et sensuel, en jouant autant avec le silence de la salle qu'avec le pouls brûlant de ses admirateurs. Ses doigts s'emballent sur le piano, et il entame l'iconique Lily Will Soon Be a Woman, extrait de son troisième album Diagnostic. C'est le morceau qui l'a révélé au grand public ;
il en profite pour sauter sur son clavier et se retrouve en équilibre au bord de la fosse, virtuose et virevoltant.

 

(Pour mémoire : Ibrahim Maalouf : au nom du père de la trompette quart de ton)

 

Densité nucléaire
Le petit-fils spirituel de Maurice André souffle la salle en annonçant son premier invité surprise. La tension explose lorsque débarque lentement le rappeur Oxmo Puccino, qui pose délicatement son slam bleu sur les notes multicolores d'Alice au pays des merveilles. C'est ensuite le lunaire Matthieu Chédid qui s'avance, sous les yeux médusés de la foule, pour une reprise à la guitare de son emblématique La Bonne Étoile. Mais Ibrahim Maalouf se suffit à lui-même et fait danser son public sur l'électrique Nomade Slang, tiré d'Illusion. Les flashs des téléphones tissent devant lui une mer étale et étoilée, à la hauteur de la densité nucléaire de ses envolées atomiques.

Après l'entracte défilent sur scène les LEJ, puis Tryo et un freestyle de Soprano sur Free Spirit. Ibrahim Maalouf accueille ensuite Amadou et Mariam sur le chaleureux Dimanche à Bamako. Le public est aux anges – même si les puristes craignent que le trompettiste ne s'éparpille. Il reprend le contrôle de la salle sur l'élégiaque True Story, en solitaire. Tour à tour fanfaron déjanté et charmeur de serpents envoûtant, il fait enfin défiler les meilleurs titres électroniques de son dernier album Red & Black Light. Au terme de ces quatre heures de spectacle, il conclut sur une reprise un peu édulcorée de Lettre à France de Polnareff en compagnie de Hiba Tawaji, et d'un We will rock you saturé et entraînant.

Mais tout cela est presque superflu tant son final virtuose est ailleurs. Il se joue dans un silence noué, sur son morceau Beyrouth qu'il renomme Alep et qui glisse sur la salle éberluée par cet instant de grâce. Ibrahim Maalouf n'est jamais meilleur que lorsqu'il est seul avec son instrument, face à la foule, et que, l'espace d'un instant suspendu, sans artifices, il lui coupe le souffle.

 

Pour mémoire

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