L'hypothèse d'une « attente plutôt longue » avant la naissance du prochain cabinet se confirme, de l'aveu d'une source du courant du Futur à L'Orient-Le Jour hier. Et les nœuds persistants dans la distribution des portefeuilles ne révèlent que partiellement les origines de ce blocage.
Ainsi, alors que les Travaux publics continuent d'être l'objet de tiraillements entre Forces libanaises, mouvement Amal et Marada, le Premier ministre désigné, Saad Hariri, aurait pris à sa charge de convaincre les Marada de renoncer à leur demande initiale d'un portefeuille de services important et d'accepter l'Éducation, selon des sources concordantes. L'initiative de M. Hariri ferait suite à la récente décision des FL de s'abstenir de toute nouvelle concession au niveau des portefeuilles.
En effet, selon notre informateur, le parti chrétien estime avoir été « induit en erreur » une première fois, lorsque, pensant que le seul nœud à la naissance du cabinet était son attachement au portefeuille régalien de la Défense, il y avait renoncé en contrepartie de quatre portefeuilles, dont les Travaux publics. Un compromis qui n'aurait pas suffi à donner naissance au cabinet, le président de la Chambre réclamant aussitôt le maintien des Travaux publics aux mains d'Amal, toujours selon la version FL rapportée à L'OLJ.
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Les Forces libanaises seraient désormais résignées à attendre que soit ratissé le terrain d'une solution médiane avec le président de la Chambre et les Marada, auquel cas le parti déciderait d'éventuelles concessions, avec la certitude, cette fois, qu'elles aboutissent à la naissance du cabinet. De son côté, le président de la Chambre continue pour l'instant de lier sa participation au cabinet à la participation des Marada, et de lier cette dernière à l'obtention d'un portefeuille de services important, sachant que cette demande, dont laissent seulement présumer les propos du président de la Chambre, n'a toujours pas été officiellement confirmée par les Marada.
En s'exprimant au nom du Hezbollah dans un premier temps, et désormais au nom des Marada, le camp berryste entendrait bien élargir son éventail pour inclure les partis prosyriens, ainsi que des figures sunnites indépendantes du courant du Futur, et défendre en leur nom leur nécessaire participation au cabinet. C'est dans le sens d'un cabinet « largement inclusif » que plaide en effet ouvertement le tandem Hezbollah-Amal.
La nature des portefeuilles importe moins que l'équilibre des forces au sein du cabinet, un équilibre qui s'avère du reste étroitement lié au positionnement stratégique du président de la République : alors que les FL et le courant du Futur parient sur un éventuel recentrage de l'allié chrétien du Hezbollah, celui-ci cumule, depuis la désignation du Premier ministre, des pointes ponctuelles orientées à première vue vers Baabda.
Le discours du Hezbollah en fin de semaine a porté plus d'un signe dans ce sens. Le numéro deux du parti, cheikh Naïm Kassem, a ainsi présenté l'opération des services de renseignements de l'armée à Ersal comme un modèle de « la lutte préventive contre le terrorisme », tandis que d'autres figures du parti chiite, comme le ministre Mohammad Fneich, ont pris soin de valoriser la « complémentarité armée-résistance » (formule édulcorée du triptyque armée-peuple-résistance) que l'opération de Ersal aurait reflétée. Le Hezbollah a ainsi voulu lever toute ambiguïté sur la formule médiane de « lutte préventive contre le terrorisme » mise au point par le chef de l'État.
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Il s'est attelé en parallèle à neutraliser un autre paragraphe du discours qui pourrait le contrarier éventuellement : la distanciation du Liban par rapport aux conflits régionaux. Prenant ainsi part à la commémoration annuelle de la création du mouvement de redressement, organisée par le Baas à Nabatiyé, le député Mohammad Raad a lancé un appel clair au prochain cabinet de prendre la décision « réaliste et courageuse de revitaliser les relations libano-syriennes » : une réorientation qu'imposeraient, selon lui, les changements qui s'annoncent en Syrie, et qui surtout rendrait caduc le principe de distanciation adopté par les précédents cabinets sous le titre de « gestion du conflit ».
Mais ce serait minimiser les replis de l'alliance CPL-Hezbollah que d'interpréter ce discours comme une offensive verbale (inutilement brusque) en direction de Baabda. Il semble d'ailleurs que le Hezbollah craindrait moins un recentrage du chef de l'État qu'un regain d'intérêt arabo-saoudien pour le Liban. Des craintes qu'exacerbe, plus largement, l'inconnue de la nouvelle administration Trump et de sa politique dans la région. À l'instar de tous les acteurs régionaux, le parti chiite entendrait préventivement consolider ses acquis. Au Liban, cet enjeu requiert l'objectif immédiat d'empêcher les nouvelles alliances et ententes (notamment FL-CPL et Futur-CPL) de se matérialiser, et de prendre corps le cas échéant dans un cabinet d'union nationale.
Dans ce contexte, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, se serait rendu il y a près de dix jours en Syrie pour une réunion avec le président syrien, qui se serait tenue en dehors du palais présidentiel, en présence de responsables militaires du régime. Les échanges auraient porté sur la bataille d'Alep et la situation au Liban. Selon nos informations, les alliés syro-iraniens entendraient anticiper une possible isolation diplomatique de la Russie, et préconiseraient une tactique d'offensives continues à Alep. Pour ce qui est du Liban, le régime syrien n'aurait pas caché son mécontentement des visites diplomatiques successives arabes au Liban, de la disposition du chef de l'État de se rendre « d'abord » en Arabie une fois le cabinet formé, et surtout du retrait temporaire du Premier ministre désigné à l'entrée de l'ambassadeur de Syrie lors des félicitations à Baabda, quand bien même il a accueilli le ministre iranien des Affaires étrangères à la Maison du Centre...
Quelques jours après le retour du leader du Hezbollah au Liban, des informations ont fuité des milieux du 8 Mars sur un entretien téléphonique entre Haret Hreik et Baabda. Des informations que le palais présidentiel n'a ni confirmées ni démenties.
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Tant que nous aurons des troupeaux de moutons-suiveurs-bêleurs, notre Liban ne sera jamais un pays respecté ! Tant que nos RESPONSABLES ne feront pas comprendre au dictateur de Damas que nous recevons qui nous voulons comme visiteurs, que le Liban est jusqu'à nouvel avis un pays indépendant et souverain...ce pauvre Bachar continuera à souffrir de ses profonds complexes d'infériorité... Lui aussi aurait besoin d'un bon médecin-psychologue ! Irène Saïd
14 h 54, le 28 novembre 2016