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Économie - Compte-rendu

Le sauvetage de Saudi Oger par Riyad a du plomb dans l’aile

Selon Reuters, les négociations entre le royaume wahhabite et l'entreprise de Hariri auraient cessé cet été. Menacé par la faillite, le groupe de BTP pourrait voir son immense dette restructurée.

Endetté à hauteur de plusieurs milliards de dollars, Saudi Oger ne paie plus la quasi-totalité de ses dizaines de milliers de salariés depuis près d’un an. Archives Reuters

Englué depuis des mois dans une crise financière et sociale qui menace son avenir comme celui de ses milliers d'employés – Libanais ou non –, le groupe Saudi Oger de l'ancien Premier ministre Saad Hariri ne semble pas près de voir le bout du tunnel...

Selon des informations publiées hier par Reuters, le gouvernement saoudien a mis fin aux négociations qui avaient pour but de sauver le géant du BTP, confronté, comme son principal concurrent Saudi Ben Laden, aux conséquences de la cure d'austérité mise en place par Riyad depuis la chute des cours du pétrole.
Endetté à hauteur de plusieurs milliards de dollars, Saudi Oger ne paie plus la quasi-totalité de ses dizaines de milliers de salariés depuis près d'un an.

Début août, la presse libanaise et saoudienne se faisait l'écho de rumeurs de négociations entre Saad Hariri et le gouvernement du royaume wahhabite, autour d'une reprise de l'entreprise. « Cependant, aux alentours du ramadan (qui a pris fin début juillet), le gouvernement a informé Saudi Oger qu'il mettait fin à toutes les négociations », écrivent les journalistes de Reuters, qui basent leur enquête sur les propos de plusieurs sources saoudiennes anonymes. « Les raisons qui ont poussé Riyad à cesser des pourparlers visant à sauver une société, dont la faillite pourrait ébranler le système bancaire saoudien et l'économie du royaume, ne sont pas claires », ajoute l'agence. Comme de coutume, ni le ministère des Finances saoudien ni Saudi Oger n'ont répondu à ses demandes d'entretien. Aucun des employés de l'entreprise interrogés par L'Orient-Le Jour n'ont pu confirmer ces informations.

 

(Pour mémoire : Riyad va assurer le règlement des retards de salaires à Saudi Oger)

 

Nationalisation écartée
Selon Reuters, les négociations entre Saudi Oger et le royaume wahhabite incluaient la vente d'actifs appartenant à l'entreprise de BTP, tel Oger Telecom, qui possède la majorité des actions chez Turk Telecom et chez l'opérateur sud-africain Cell C. Elles comportaient également la vente des parts que détient Saudi Oger dans la banque jordanienne Arab Bank (20 %).

Quelques options auraient été étudiées puis écartées, comme le rachat d'actions de l'entreprise par le gouvernement ou par Nesma, une autre entreprise de construction saoudienne, ou encore la vente des actifs immobiliers de Saudi Oger. Cette semaine, Bloomberg a rapporté que l'entreprise est en négociations pour vendre la moitié de ses parts dans Tibah Airports Development (TAD), la société qui gère l'aéroport de Médine, avec le turc TAV Airports.

Selon les sources interrogées par Reuters, la dette du gouvernement envers Saudi Oger s'élève à 30 milliards de riyals (8 milliards de dollars) pour travaux déjà exécutés. Riyad a approuvé le paiement de seulement 10 milliards de riyals (2,6 milliards de dollars), même si cette somme n'a pas été transférée vers les caisses de l'entreprise. « Le reste des travaux facturés par Saudi Oger au gouvernement n'a pas encore été approuvé », ajoute l'agence. Un cadre de Saudi Oger a en outre indiqué que le ministère n'a pas effectué de paiements concernant « un projet de construction de plusieurs milliards de riyals » depuis près d'un an.

Pourtant, en avril, le ministre de la Défense et vice-prince héritier du royaume d'Arabie saoudite, Mohammad ben Salmane, avait assuré à Bloomberg que Riyad allait « honorer son contrat » avec l'entreprise et lui avait « versé plusieurs paiements ». Si cette dernière ne peut pas payer ses salariés, « c'est son problème », avait-il martelé à l'époque.

Par conséquent, Saudi Oger est dans l'incapacité de rembourser ses dettes, dont « 15 milliards de riyals (4 milliards de dollars) en prêts, des milliards de riyals contractés auprès de sous-traitants et de fournisseurs, et plus de 2,5 milliards de riyals (600 millions de dollars) en arriérés de salaires et indemnités », détaillent plusieurs sources citées par Reuters. À eux seuls, « les 15 milliards de riyals de prêts contractés par l'entreprise représentent deux tiers des profits de l'ensemble des banques saoudiennes sur le premier semestre 2016 », note l'agence. Les banques saoudiennes sont les plus importants créanciers de l'entreprise, mais des banques libanaises, du Golfe et internationales sont aussi exposées, notamment via un prêt de 1,03 milliard de dollars qui arrivera à maturité en février. L'Orient-Le Jour n'a pas été en mesure d'identifier l'identité des banques libanaises concernées.

 

(Lire aussi : Delhi négocie avec Riyad pour rapatrier des migrants bloqués, dont 2.450 licenciés par Saudi Oger)

 

Vers une restructuration ?
Une faillite de Saudi Oger entraînerait une vague de défauts de paiements chez ses sous-traitants et fournisseurs, s'inquiète Reuters. Cependant, certains créanciers espèrent encore une reprise des négociations, bien que l'attitude du gouvernement était « agressive » lors des discussions précédentes, note Reuters. « Les relations entre la famille royale et Saad Hariri ne sont pas comparables à celles qu'entretenait son père Rafic lorsqu'il a lancé l'entreprise familiale en 1978. L'impasse politique dont souffre le Liban a permis au Hezbollah, (...) de bénéficier de davantage d'influence dans le pays », commente l'agence.

Conséquence, la seule option qui reste à Saudi Oger semble être de restructurer sa dette. Si l'entreprise choisit cette option, il est probable qu'elle nomme des conseillers et demande un moratoire aux banques, indiquent deux sources saoudiennes de Reuters. Cela lui permettrait d'éviter de nouvelles actions en justice. Dès juillet, le deuxième créancier le plus important de l'entreprise derrière la National Commercial Bank, l'institution financière Samba, serait devenu le premier à poursuivre l'entreprise devant les tribunaux. Selon l'agence, cette décision pourrait encourager d'autres banques à faire de même, bien que le droit régissant les entreprises en difficulté soit opaque et rarement mis en œuvre en Arabie saoudite.

Les seuls cas comparables à Saudi Oger dans le passé sont ceux des conglomérats Saad Group et Ahmad Hamad Algosaibi and Brothers (AHAB). Dans ce cas, les réclamations des banques ont été reconnues par la justice mais aucune solution n'a encore été trouvée, plus de sept ans après la faillite initiale. L'ampleur de la restructuration de la dette de Saudi Oger serait toutefois bien plus importante que celles du groupe Saad et d'AHAB, indique une source saoudienne à Reuters. D'autres sources au sein du secteur bancaire et industriel affirment qu'il est probable que les banques préfèrent opter pour une procédure officielle de restructuration de la dette de Saudi Oger, au lieu de l'obliger à faire faillite.

 

(Pour mémoire : Saudi Oger : l'insondable légèreté de la diplomatie libanaise)

 

Les Français payés
En attendant, les principales victimes de la faillite de Saudi Oger ne sont pas ses créanciers, mais ses employés. Les ouvriers, en majorité de nationalité asiatique qui vivent dans des camps sur les sites de construction disséminés à travers le royaume, souffraient particulièrement du manque d'alimentation et d'hygiène depuis que l'entreprise avait stoppé l'entretien de ces sites. Plusieurs cas de suicides ont été rapportés. En juillet, les autorités saoudiennes sont intervenues pour prendre le relais et distribuer de la nourriture.

Interrogé par L'Orient-Le Jour, un Libanais qui vit dans le camp Sogex, à Djeddah, ne s'émeut pas particulièrement de l'annonce de la fin des négociations entre le gouvernement et Saudi Oger. « Rien ne change pour nous. Nous espérons simplement qu'une solution va être trouvée pour la crise. » Ce dernier assure que dès qu'il touchera ses arriérés de salaires, il rentrera « dans l'heure » au Liban.

Début août, le ministre du Travail saoudien avait assuré que le gouvernement aiderait les employés de Saudi Oger à changer de sponsor, à quitter le pays ou renouveler leur permis de séjour ( « iqama » ). Une initiative qui a été concrétisée, assure à L'Orient-Le Jour l'ambassadeur libanais en Arabie saoudite, Abdel Sattar Issa. Selon lui, les démarches ont été facilitées notamment pour deux employés qui avaient de graves problèmes de santé et qui souhaitaient rentrer au Liban rapidement. Des hommes d'affaires lui auraient également assuré avoir embauché d'anciens salariés libanais de Saudi Oger.

Pour leur part, les 200 employés français ont commencé à recevoir leurs arriérés de salaire cette semaine, a rapporté hier le magazine Paris-Match. « Je pense que, par facilité, les premiers à être payés seront ceux qui appartiennent aux nationalités les moins représentées », avance Abdel Sattar Issa.

 

 

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commentaires (3)

et Hariri veut être le premier ministre du Liban !!!!!

Talaat Dominique

23 h 30, le 09 septembre 2016

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Commentaires (3)

  • et Hariri veut être le premier ministre du Liban !!!!!

    Talaat Dominique

    23 h 30, le 09 septembre 2016

  • CHOU TAYR IL MATWA2... QUEL NUMERO DE PLOMB S.V.P. ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 46, le 09 septembre 2016

  • Il ne reste plus qu'au "1er Ministre naturel" des évanescents d'accepter la main tendue du hezb résistant, pour le sortit du marasme marécageux dans lequel il patauge . A friend in need is a friend indeed, ce que les bensaouds ne semblent pas connaître .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 09, le 09 septembre 2016

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