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Culture - Événement

Une Biennale sans œuvres, sans expositions, sans curateurs ni galeristes...

Coup d'envoi hier de la Biennale de Paris... délocalisée, jusqu'au 3 juillet, à Beyrouth. Et rencontre avec Alexandre Gurita, son directeur et « réinventeur ». Lequel explique à « L'OLJ » les fondements de cette manifestation renouvelée, consacrée désormais à l'art « invisuel ».

Alexandre Gurita a donné un souffle nouveau à la Biennale de Paris.

Créée en 1959 par André Malraux, alors ministre de la Culture, qui souhaitait en faire « un lieu de rencontres et d'expérimentation des nouvelles modalités d'un art du futur », la Biennale de Paris a rythmé le cœur des manifestations artistiques de la Ville Lumière durant plus de vingt ans. En 1983, suite à une restauration trop onéreuse des Halles de La Villette menée par l'architecte Jean Nouvel, elle est liquidée et tombe dans le domaine public. Alexandre Gurita, jeune artiste franco-roumain, diplômé des Beaux-Arts de Paris en 1999, en profite alors pour se l'approprier l'année suivante. « Je m'en suis emparé, je l'ai volée d'une certaine façon, au nez et à la barbe de Jack Lang et de Philippe Douste-Blazy qui, successivement à la tête du ministère de la Culture, avaient en vain essayé de la relancer », soutient-il.

Son mariage en projet de diplôme
Engagé dans une pratique artistique basée sur la dématérialisation de l'œuvre d'art, cet artiste, dont le premier coup d'éclat a été de présenter son propre mariage en tant que projet de diplôme, reprend donc la Biennale de Paris en 2000 dans l'idée de la réinventer. « La reformuler de manière à la mettre au service des pratiques qui rejettent les règles convenues régissant le monde de l'art et des artistes qui n'obéissent pas à la norme établie. »
La première édition de cette manifestation sous la direction d'Alexandre Gurita voit le jour en 2004 avec une trentaine d'artistes venant d'une quinzaine de pays qui investissent, durant quelques jours, différents lieux underground de Paris. Mais c'est lors de l'édition suivante que son concepteur éclatera toutes les règles régissant la Biennale. « En annulant d'une part totalement l'idée d'œuvres, d'expositions, de spectateurs, de commissaires d'exposition et de marché de l'art... et en faisant durer, d'autre part, chaque Biennale, qui a lieu chaque deux ans, tout le long de ces deux années. » À cela, il ajoute une section éducation, « qui offre aux artistes, à travers un cursus postdiplôme d'un an dispensé par l'Institut des hautes études en arts plastiques de Paris (Iheap), l'opportunité de se libérer des acquis hérités de l'histoire de l'art », dit-il.

Art renouvelé et vocabulaire nouveau
En 2008, Gurita instaure une liberté de plus, celle de pouvoir délocaliser cette manifestation (à l'origine) parisienne. C'est ainsi qu'après Nicosie, New York (avec la Yale University et Columbia) et le Burundi, la Biennale de Paris débarque cette année à Beyrouth. Comment se fait le choix de la ville hôte ? « Parfois, c'est à la demande de ses institutions culturelles. Cela a été le cas du ministère chypriote de la Culture, qui voulait notre expertise pour redynamiser leur scène artistique. Au Liban, c'est différent. C'est grâce surtout à Ricardo Mbarkho, artiste, créateur de la Journée nationale du tabboulé, chercheur et enseignant à l'Iheap (une ex-école d'art parisienne reprise par la Biennale), que nous sommes là. Et puis étant moi-même déjà venu à deux reprises à Beyrouth, j'avais constaté la vivacité d'esprit et l'inventivité des Libanais qui font de cette ville le hub artistique de la région. Nous opérons en partenariat avec de nombreux collaborateurs et partenaires sur place, dont le principal est l'association Shams. La programmation des "opérations" (terme désignant ces pratiques artistiques nouvelles) qui se déroulent du 27 juin au 3 juillet a été établie par les "sessionnistes" de l'Iheap de Paris, lesquels sont les artistes inscrits à la section éducative de la Biennale », indique son directeur. Quels ont été leurs critères de sélection ? « Il s'agit d'un seul : l'absence d'œuvre d'art, tout simplement. Jusque-là, l'invention de l'art s'est faite à l'intérieur de l'œuvre. Aujourd'hui, si un artiste veut être créatif, il faut que sa pratique soit singulière, qu'elle sorte du champ redondant des expositions. En un mot, il faut qu'elle soit "invisuelle" », conclut-il.

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Le top 5 de la rédaction

– Journée nationale du tabboulé. Depuis sa création par l'artiste visuel Ricardo Mbarkho en 2001, elle est célébrée le premier samedi du mois de juillet. En l'occurrence ce samedi 2 juillet. Lors de cette journée, les Libanais et leurs ami(e)s se réunissent partout dans le monde en privé ou en public autour de cette salade traditionnelle du pays du Cèdre. Ce mets « réunificateur » dans un pays déchiré par les tensions est symbolique, par la diversité de ses ingrédients, de la population libanaise. Comme elle, son harmonie délicate est menacée dès que l'un de ses composants en est écarté, voire même négligé. « Toute maison qui participe à cette journée nationale se transforme en une galerie d'art qui promeut l'art de la célébration », soutient son concepteur. En parallèle, un grand rassemblement public est organisé à Souk el-Tayeb, où dégustation et concours des meilleurs tabboulés auront lieu pour chacune de ces 3 catégories : traditionnel, d'hiver et créatif. La compétition se tient de 10h30 jusqu'à 11h30.

– « Décrochage » (jeudi 30 juin de 21h à 21h30).
La photographe Sadie Von Paris propose au Space 27 (Chiyah) « Décrochage », une exposition qui disparaît avant même d'avoir existé. Le public a 30 minutes pour « piller » les œuvres de cette artiste qui remet en question la notion d'exposition.

– « Art/Mémoire »
Francesca Loprieno réalise un journal à partir de documents (photos, textes, objets...) rapportés par toute personne. Ces documents seront ensuite enrichis avec des textes qu'elle ajoutera pour former une publication dont les pages seront, ensuite, redistribuées aux personnes qui y ont collaboré. Ce journal deviendra un objet d'échange et sera en continuelle transformation. Il ne finira jamais : ni dans son écriture ni dans sa lecture. L'auteure sera présente au point d'information du Tournesol tous les jours de 10h à 13h. On peut également lui laisser des documents pour ce projet via fr.loprieno@gmail.com

– Marathon « Le Presse-citron » (mercredi 29 juin, de 20h à 22h au Space 27, à Chiyah).
Placés dans un stress productif intense, les participants du « Presse-citron » devront pouvoir amener leur vision condensée mais précise de ce qu'est pour eux la scène artistique libanaise aujourd'hui. Ce marathon de recherche organisé par Global Screen Shot consistera à répondre à des questions mystères qui seront dévoilées le moment venu. Tentez votre chance en vous inscrivant par e-mail : info.globalscreenshot@gmail.com

– « Place publique »
Les sessionnistes de l'Iheap proposent « Place Publique », un projet au cours duquel ils tenteront de générer une place publique à Beyrouth dans un lieu qui reste à découvrir. Ils sillonneront la ville à la recherche de cette potentielle place. À l'issue de cette recherche, chacun proposera un lieu et un choix sera fait collectivement pour déterminer son emplacement. Et au final, des démarches seront faites pour inscrire cette place publique au cadastre de la ville.

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En chiffres et pays
La Biennale de Paris à Beyrouth comporte 34 projets de 27 participants en provenance de 11 pays : Argentine, Canada, Chine, Espagne, États-Unis, France, Guatemala, Italie, Luxembourg, Vietnam et bien sûr Liban.

 

 

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Créée en 1959 par André Malraux, alors ministre de la Culture, qui souhaitait en faire « un lieu de rencontres et d'expérimentation des nouvelles modalités d'un art du futur », la Biennale de Paris a rythmé le cœur des manifestations artistiques de la Ville Lumière durant plus de vingt ans. En 1983, suite à une restauration trop onéreuse des Halles de La Villette menée par...

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https://www.youtube.com/watch?v=MazCnEDHkB8 DES ARTISTES SANS OEUVRES C'EST À LA MODE. L'ÉCRIVAIN FRACO/PHONE LE PLUS LU AU MONDE, ERIC EMMANUEL SCHMITT, DÉNONCE CETTE PRATIQUE ARNAQUE.

Gebran Eid

15 h 08, le 28 juin 2016

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Commentaires (1)

  • https://www.youtube.com/watch?v=MazCnEDHkB8 DES ARTISTES SANS OEUVRES C'EST À LA MODE. L'ÉCRIVAIN FRACO/PHONE LE PLUS LU AU MONDE, ERIC EMMANUEL SCHMITT, DÉNONCE CETTE PRATIQUE ARNAQUE.

    Gebran Eid

    15 h 08, le 28 juin 2016

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