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Économie - Finance

Le « Bloody Friday » épargne en partie Londres et Wall Street

Très mal anticipé par les marchés la veille, le Brexit a provoqué un séisme sur l'ensemble des places boursières. Mais celle de Londres a largement limité la casse.

Un courtier de BGC à Londres après l’ouverture des marchés européens hier, suite au résultat du référendum britannique de jeudi. Russell Boyce/Reuters

Prises à contre-pied par le vote en faveur du Brexit, les places boursières ont terminé la séance en déroute vendredi.

Après une nuit rivé devant l'écran de sa salle de marché, David Papier, d'ETX Capital, a évoqué « un bain de sang, un carnage » et un employé de la City a tout simplement parlé de « putain de désastre », résumant le sentiment d'une élite financière désespérée.

Paradoxalement, l'indice londonien a pourtant moins souffert que ses équivalents du continent, terminant la séance sur une baisse de 3,15 %, car il compte nombre de multinationales qui, pour certaines, ont peu d'activité en Europe, tandis que Paris cédait 8,04 % et Francfort 6,82 %.

 

(Reportage : Au QG de campagne des pro-Brexit, on fête "l'indépendance" du Royaume-Uni)

 

La livre très éprouvée
À court terme, la baisse de la livre sterling pourrait également éventuellement se traduire par un gain de compétitivité pour les entreprises britanniques. Avec la monnaie britannique, les marchés européens ont toutefois été les principales victimes de cette journée noire, subissant des chutes du même ordre de grandeur qu'au moment de la faillite de la banque américaine Lehman Brothers en 2008.

Après s'être envolée au-dessus de 1,50 dollar au moment de la fermeture des bureaux de vote, la livre sterling est tombée à des niveaux inédits depuis 1985, jusqu'à 1,3229 dollar. Vers 20h20 GMT (23H20 à Beyrouth), elle effaçait une partie de ses pertes face au dollar, à 1,3629 dollar pour une livre contre 1,4974 dollar jeudi soir.

Ailleurs en Europe, Madrid a chuté de 12,35 % et Milan de 12,48 %. Lisbonne a perdu pour sa part 6,99 %, Bruxelles 6,40 % et Amsterdam 5,70 %. La Bourse suisse a reculé quant à elle de 3,44 %. Par ailleurs, l'Eurostoxx 50 a reculé de 8,62 %. « L'étendue du plongeon a été exacerbée par un marché totalement positionné dans la mauvaise direction, les investisseurs choisissant de faire confiance aux sondages, sans plus de prudence, en misant massivement sur un Remain  », explique Michael Hewson, un analyste de CMC Markets.

De son côté, la Bourse de New York baissait, gagnée par l'inquiétude, mais évitait la panique. L'indice Dow Jones a chuté de 3,39 % ; le S&P-500, plus large, a perdu 3,60 % – sa plus forte baisse en dix mois – ; et le Nasdaq Composite a reculé de 4,12 %. « C'est clairement un très gros choc pour les marchés » et « pour le Royaume-Uni, c'est un séisme » dont les « implications vont indubitablement aller au-delà des frontières britanniques, avec un effet immédiat et potentiellement durable sur les échanges commerciaux et sur tous les actifs financiers », affirme à l'AFP Matthew Beesley, directeur actions internationales de la société de gestion britannique Henderson Global Investors.

Depuis le début de la campagne, les marchés redoutaient une sortie du Royaume-Uni aux conséquences dévastatrices pour l'économie européenne et mondiale ainsi que pour le monde financier.

 

(Lire aussi : Comment les Libanais au Royaume-Uni vivent le choc du Brexit)

 

Ruée vers l'or
Le secteur bancaire a été le plus exposé au cours de cette journée avec Lloyds Banking Group (-21 %), mais aussi BNP Paribas (-17,40 %), Crédit agricole (-14 %) et Société générale (-20,57 %). Deutsche Bank a perdu 14,13 % et Credit Suisse 13,48 %.

Parallèlement, les valeurs refuges, comme le yen ou l'once d'or, flambaient. L'once d'or a fini à 1 315,50 dollars au fixing du soir – après avoir atteint vers 03H50 GMT (23H20 à Beyrouth) 1 359,08 dollars, un sommet depuis mars 2014 – contre 1 262,15 dollars jeudi soir.

Les investisseurs se sont aussi rués sur le marché obligataire. Le Bund allemand est repassé en zone négative et le taux d'emprunt à dix ans de la France et de la Grande-Bretagne ont touché en séance leur plus bas historique.

Un certain nombres de gérants d'actifs, à l'instar du numéro un mondial, l'américain BlackRock, ont cherché hier à relativiser en voyant aussi dans ces mouvements des « opportunités. » « Aujourd'hui, le marché est dans la phase émotionnelle, car le vote va à l'encontre des prévisions et le score est sans appel », affirme à l'AFP Alain Zeitouni, directeur des gestions pour Russell Investments France, basé à Londres. Mais selon lui, « le choc est absorbable » et « nous n'assistons pas à des ventes de panique ».

Reste que le principal poids qui pèse sur les marchés est celui de l'incertitude. Car, comme le souligne Allianz Global Investors, « certes, on peut s'attendre à ce que le Royaume-Uni parvienne effectivement à établir de nouvelles relations commerciales avec l'UE et d'autres pays, mais ce processus prendra du temps et demandera un effort considérable. Dans l'intervalle, de lourdes incertitudes risquent fort de planer » et « les investisseurs doivent se préparer à traverser des zones de turbulences ».

 

 

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