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Liban - Loi électorale

Les commissions parlementaires se démarquent artificiellement du dialogue de Aïn el-Tiné

Les députés, hier, au Parlement. Photo Sami Ayad

Les commissions parlementaires conjointes chargées de plancher sur une nouvelle loi électorale se sont fait l'écho de la séance de dialogue, la veille, à Aïn el-Tiné. Éludant l'examen strict du mode de scrutin à adopter, les 42 députés présents à la réunion – en l'absence de représentants du gouvernement – ont évoqué le caractère stérile du débat autour d'une nouvelle loi électorale. Un débat qui, de l'aveu du vice-président de la Chambre, Farid Makari, la veille, à la table de dialogue, nécessite une couverture politique.

Ils ont toutefois convenu de relancer leur travail, en distinguant « les débats en commissions conjointes du déroulement de la table de dialogue national », une séparation qui obéit « au principe de la souveraineté du Parlement », et qui conduit à « restreindre le débat, en commissions, à la loi électorale », selon un compte-rendu en quatre points de la réunion, dont a donné lecture Farid Makari. Cette précision vient rappeler que la table de dialogue n'est qu'une plateforme d'échange, et non une institution, même si elle est propice à générer des solutions. Elle signifie que le Parlement et le dialogue ne sont « pas forcément des vases communicants », comme l'affirme le député Marwan Hamadé à L'Orient-Le Jour.
Pourtant, le caractère stérile des débats en commissions avait conduit M. Makari, à l'issue de la dernière réunion, à jeter l'éponge et confier l'examen du dossier à la table de dialogue. Dans ses réponses aux journalistes, hier, sur un possible revirement de sa position, il a expliqué en termes vagues que « la table de dialogue et le Parlement sont similaires, en ce que la première inclut des représentants de blocs parlementaires, mais ne se neutralisent pas ». Il a fait remarquer en outre que la table de dialogue s'est avérée incapable de trancher le débat sur une nouvelle loi électorale.
D'ailleurs, l'impression actuelle des milieux parlementaires concernés est que « les positions des uns et des autres sont très éloignées ». Le retour aux commissions conjointes est donc un retour à la case départ, sans grand espoir de solution.
En outre, le distinguo avec la table de dialogue aurait pour intérêt de signaler indirectement l'improbabilité d'un Doha bis. Le bloc du Futur, par exemple, refuse un package deal qui « n'inclut pas les armes du Hezbollah, ou la déclaration de Baabda et la question de la neutralité », explique le député Ahmad Fatfat à L'OLJ. Il reconnaît néanmoins qu'un « consensus politique » est un préalable nécessaire à la mise au point d'une nouvelle loi électorale. Un effet plus palpable de la séparation entre table de dialogue et débats en commissions serait de protéger le document national de Taëf. Le débat hier a en effet traité longuement de l'impératif de respecter ce document, ce qui a incité le député Samy Gemayel à intervenir en rappelant que « le document de Taëf n'a pas valeur constitutionnelle, n'ayant pas été intégré à la Constitution ». Il explique sur ce plan à L'OLJ que l'intérêt de son intervention n'est pas de remettre en question Taëf, mais de « dénoncer une tentative générale de mettre tout le débat sur le compte de Taëf, de manière à justifier éventuellement un retour à la loi de 1960 ». Preuve en est, le zèle des députés du Hezbollah à défendre Taëf, hier, lors de la réunion.

 

(Pour mémoire : Les désaccords empêchent toute avancée en commissions)

 

Pour le courant du Futur, le document de Taëf, qui prévoit le mohafazat comme base du découpage électoral, continue de constituer un garde-fou face à des projets comme la circonscription unique (pour laquelle a encore plaidé hier le Parti syrien national social), ou surtout la proposition de loi dite « orthodoxe ».
À l'issue de la réunion d'hier, des députés du bloc du Futur ont multiplié les références à Taëf. « La référence fondamentale est l'accord de Taëf, devenu une Constitution », a affirmé le député Mohammad Kabbani. Son collègue Ammar Houri a souligné pour sa part que « le dialogue national a pour plafond Taëf, ce qui doit donc s'appliquer au débat sur la loi électorale ».
Le procès-verbal de la réunion a prévu en outre que « la prochaine réunion des commissions fixée au 13 juillet prochain sera consacrée aux critères d'une loi électorale basée sur le mode de scrutin mixte ». À défaut d'une entente sur la question, le vice-président de la Chambre soumettra les projets et propositions déjà présentés à l'assemblée générale à un vote en séance plénière, après concertation avec le président de la Chambre. Il faut savoir toutefois que ces deux « résolutions » ne font pas l'unanimité des blocs parlementaires.
Soumettre au vote les projets et propositions de loi répond à une idée avancée par les Forces libanaises et les Kataëb, mais contestée par le Courant patriotique libre. En réaction, le député Alain Aoun a menacé hier d'un retour à la proposition de loi dite « orthodoxe », qui avait été renvoyée en séance plénière par les commissions. Notons que le CPL plaide théoriquement en faveur de la proportionnelle – un acte de solidarité avec le Hezbollah, qui dessert son entente avec les FL –, sachant qu'il examinerait actuellement avec les FL une loi basée sur le mode de scrutin mixte. Notons par ailleurs que le projet de la commission Fouad Boutros s'est réincorporé hier au débat, à l'initiative de Farid Makari, mais seulement pour « servir de repère », selon une source de la réunion.
En outre, la volonté de restreindre le débat au scrutin mixte trahirait une volonté de ne retenir au final que la proposition du bloc berryste, et la proposition présentée conjointement par le courant du Futur, le Parti socialiste progressiste et les FL.
C'est ce que disent craindre notamment les milieux du parti Kataëb, dont le bloc parlementaire a tenu à soumettre il y a deux semaines au Parlement sa proposition de loi basée sur le mode de scrutin majoritaire uninominal à deux tours, selon un découpage en 112 circonscriptions. L'autre volet de la proposition, relatif à l'élection d'un Sénat sur une base confessionnelle, comme le prévoit Taëf, ne sera pas débattu en commissions, au vu de « la restriction des débats en commissions à la loi électorale ».
Si l'uninominal n'a pas été évoqué hier en commissions, certains partis, comme le bloc du Futur, expriment leur disposition à en débattre. Le Hezbollah serait en revanche le plus hostile à l'uninominal, rapportent des sources concordantes. Il défendrait en revanche le projet du cabinet Nagib Mikati, fondé exclusivement sur la proportionnelle sur la base de treize circonscriptions. Sans avoir directement été débattu hier, ce projet, évoqué à l'occasion du dialogue la veille, a déteint sur les déclarations des députés au sortir de la réunion.
Le député Serge Tor Sarkissian a questionné les intentions réelles derrière la résurgence de ce projet.
Le député Ali Fayad a évoqué ce projet en relançant les accusations du Hezbollah contre le chef du bloc du Futur, Fouad Siniora, de vouloir « bloquer d'emblée le débat sur la loi électorale en qualifiant le projet Mikati de vindicatif ». « Il me semble que les portes sont bloquées pour une nouvelle loi », a indiqué M. Fayad.
Le député Ahmad Fatfat entend répondre aujourd'hui à ces « fausses accusations de blocage » par une conférence de presse, où il prévoit entre autres de décrier le projet Mikati, en ce qu'il « est directement dirigé contre le courant du Futur ».

 

 

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commentaires (2)

ON NE VOIT QUE DES SOURIRES D,HEBETUDE... DU VRAI TRAVAIL YOK !

LA LIBRE EXPRESSION

08 h 54, le 23 juin 2016

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Commentaires (2)

  • ON NE VOIT QUE DES SOURIRES D,HEBETUDE... DU VRAI TRAVAIL YOK !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 54, le 23 juin 2016

  • Ah ! Si on avait encore ce "Protecteur" Mandat....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 53, le 23 juin 2016

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