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Liban - La situation

Entre « chaos constructif » et « chaos destructeur »

La brigade anti-émeute des FSI quelques instants avant de lancer l'opération d'évacuation de l'immeuble envahi par les manifestants. AFP

Venus déloger Mohammad Machnouk du ministère de l'Environnement, immeuble Lazarié, les manifestants du collectif « Vous Puez ! » en ont été pour leur frais. Non seulement M. Machnouk n'a pas démissionné, en raison du fragile équilibre imposé par l'absence d'un chef de l'État qui empêche que l'on touche au gouvernement, mais l'un de leurs leaders, Lucien Bou Rjeily, a eu l'épaule brisée au cours de l'évacuation musclée du ministère par la brigade antiémeute des FSI, loin des caméras de télévision, expulsées en premier.

Dans la nudité des scènes retransmises sur le petit écran, l'action d'éclat a montré, du même coup, ses limites. Populaire, mais privée de leader charismatique, se voulant apolitique, sans l'être, désavouée par le parti des Verts et le puissant Comité de coordination syndical représentant les enseignants et les fonctionnaires du public, drainant beaucoup moins de monde que les manifestations précédentes, cette action a fait incontestablement problème. Les contours politiques du ras-le-bol populaire se voient désormais plus clairement. Beaucoup ne s'y reconnaissent pas. À commencer par Michel Aoun, qui a maintenu son appel à manifester vendredi, et a critiqué un « chaos créatif » où beaucoup ont commencé à flairer une manipulation.

Sur ce fond chaotique se prépare activement la conférence de dialogue que Nabih Berry a convoquée le 9 septembre. Les invitations à la conférence ont commencé à être lancées, ainsi que l'aménagement de la salle spéciale du Parlement qui doit recevoir les personnalités politiques qui doivent y participer. Selon les indications disponibles, la table de conférence réunira environ 20 fauteuils correspondant aux vingt chefs de blocs parlementaires ayant émergé des législatives de 2009.
Ainsi, la table réunira, outre le président de la Chambre, Nabih Berry, et le chef du gouvernement, Tammam Salam, Fouad Siniora (Futur), Élie Marouni (Kataëb), Georges Adwan (FL), Mohammad Raad (Hezbollah), Michel Aoun (CPL), Walid Joumblatt (bloc démocratique), Jean Oghassabian (Entente arménienne), Nagib Mikati, Assem Kanso (Baas), Assaad Hardane (PSNS), Mohammad Safadi, Hagop Pakradounian (Tachnag), Imad el-Hout (Jamaa islamiya), Sleimane Frangié, Michel Murr, Tony Aboukhater (députés de Zahlé), Talal Arslane, Michel Pharaon et Boutros Harb.
Cette liste n'est pas encore définitive, et des noms pourraient s'y ajouter. On apprenait hier que M. Berry a pris contact avec Saad Hariri, et souhaité sa présence, et que son initiative jouit de la « bienveillance » des milieux diplomatiques.

Ironie du sort, les préparatifs parlementaires retiennent l'attention de tous, alors que tout le monde regardera passer dans l'indifférence la journée d'aujourd'hui, 2 septembre, où une séance d'élection d'un nouveau président est prévue. Éclipse devenue anodine d'une vacance qui a engendré un « chaos destructeur » dont tous les Libanais paient le prix.
Ce que les événements des derniers jours, y compris le sommet chrétien qui s'est tenu à Bkerké, dégagent, c'est un contraste de plus en plus vif entre la position de Michel Aoun sur la présidentielle et celle du patriarche Raï.
Jusqu'à présent, le chef de l'Église maronite avait réussi à maintenir une façade d'impartialité en renvoyant dos à dos Michel Aoun et Samir Geagea, dans une condamnation générale du blocage. Toutefois, le sommet islamo-chrétien avorté de lundi a bien montré que l'allié chiite de Michel Aoun ne veut pas entendre parler d'un autre candidat que lui, et démontre que si le blocage persiste, c'est bien en raison des ambitions présidentielles de M. Aoun, qui joue aujourd'hui son va-tout, dans le sentiment qu'en raison de son âge, c'est « maintenant ou jamais » qu'il peut accéder à cette fonction.
Entre le refus civique de Samir Geagea de voter pour son rival, et le boycottage incivique des séances parlementaires par Michel Aoun, il est de plus en plus clair que c'est cette dernière position que le patriarche condamne, plutôt que la première.

Qu'attendre des jours qui viennent ? Un surcroît de manifestations, certes, et parallèlement, un surcroît d'opposition à une dérive anarchique qui conduit droit à une impasse. Ce qu'on doit espérer, c'est que le dossier des déchets, confié désormais à Akram Chehayeb, ancien ministre de l'Environnement, soit mis sur les rails. Pour le reste, le pays doit encore compter sur sa baraka. Marwan Hamadé a eu ce mot à la fois gentil et cynique hier en parlant de la conférence de dialogue : « Nous saluons cette initiative, a-t-il dit, même si elle est là pour faire passer le temps. »

 

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Venus déloger Mohammad Machnouk du ministère de l'Environnement, immeuble Lazarié, les manifestants du collectif « Vous Puez ! » en ont été pour leur frais. Non seulement M. Machnouk n'a pas démissionné, en raison du fragile équilibre imposé par l'absence d'un chef de l'État qui empêche que l'on touche au gouvernement, mais l'un de leurs leaders, Lucien Bou Rjeily, a eu l'épaule...

commentaires (10)

je ne suis un extrémiste, ni un nationaliste acharné, j'aime mon petit pays, j'admire la réalisation dans le monde de tous les libanais, je suis républicain, je respecte la loi, l'ordre, la liberté, la démocratie, la vraie, pas celle des politiciens piques assiettes j'ajoute ce commentaire au précédent pour préciser mes pensées et mes croyances

FAKHOURI

13 h 26, le 02 septembre 2015

Tous les commentaires

Commentaires (10)

  • je ne suis un extrémiste, ni un nationaliste acharné, j'aime mon petit pays, j'admire la réalisation dans le monde de tous les libanais, je suis républicain, je respecte la loi, l'ordre, la liberté, la démocratie, la vraie, pas celle des politiciens piques assiettes j'ajoute ce commentaire au précédent pour préciser mes pensées et mes croyances

    FAKHOURI

    13 h 26, le 02 septembre 2015

  • J'ai de grosses difficultés à comprendre : Nous somme un petit pays, sans matières premières et sans puits de pétrole. Mais nous sommes des bâtisseurs, des "positifs", nous libanais, citoyens d'un si petit pays en voie de destruction Nous avons inventé et installé le commerce en Méditerrannée, en Afrique, et dans presque tous les pays du monde entier Des Libanais issus de notre petit pays sont à la tête des plus grandes entreprises florissantes dans le monde et que subissons nous ? Une clique de fonctionnaires bien payés qui se surnomment "ministres", un parti (Hezbollah) aux ordres armés de l'Iran Ce parti combat en Syrie, des libanais morts pour une cause qui n'est pas la leur La liste des destructions et des actions négatives contre notre pays et notre peuple est longue LIBANAIS, mes compatriotes, mes frères et soeurs, pourquoi laissez vous ces "destructeurs" piétiner nos qualités, notre dignité, notre foi en notre pays? Il a fallu une crise de la gestion des ordures pour se révolter de la déchéance ou nous mènent les CPL, Hezbollah et consorts...!!! Quinze années de guerre destructrices n'ont pas suffit à nous détruire, malgré toutes les différences composantes de notre pays Aujourd'hui, un parti et son chef (HN) se vantant de victoires qu'il n'a jamais eu, nous entraine vers destruction de notre idéal de vie "à la libanaise" Les armes en possession du Hezbollah sont "destinées" à frapper Israel mais aussi les libanais

    FAKHOURI

    13 h 23, le 02 septembre 2015

  • LE CHAOS... C'EST LE CHAOS... DESTRUCTEUR PAR DÉFINITION !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 45, le 02 septembre 2015

  • FADY NOUN, VOUS PENSEZ QUE CES FAMILLES QUI VOUS EXPLOITE ET EXPLOITE VOTRE PAYS DE PÈRE EN FILS VONT FAIRE COMME LECLERC DE L'AFRIQUE DU SUD ET DONNER LES CLEFS AU PEUPLE SI FACILEMENT ? VOUS RÊVEZ EN COULEUR CHER AMI. UN CHAOS C'EST UN CHAOS. ET AUCUN MAIS AUCUN N'EST RESPONSABLE À PART AOUN, FRANGIEH, GEMAYEL, GEAGEA, HARIRI, KARAMÉ ET SURTOUT JOUMBLATT.

    Gebran Eid

    12 h 35, le 02 septembre 2015

  • Pourquoi pas alors entre "boa constrictor et boa destructor" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 25, le 02 septembre 2015

  • En fait tout le probleme réside dans le fait que le Hezbollah a encore des armes a sa disposition et se permet de faire tout et n'importe quoi. Rien ne se fera sans une nouvelle défaite de taille en Syrie et celle -ci est en voie d'arriver. Le Hezbollah se fait tailler en pièce et a Zabadani et a Faouaa et Kafraya. Il se peut qu'il finisse par y arriver a Zabadani, mais la perte des deux petites villes du Nord sera encore plus dure car personne ne compte les morts chez les rebelles en raison du fait qu'ils se battent chez eux et pour leur cause, alors que le Hezbollah sacrifie la jeunesse Libanaise pour une cause qui n'est pas la sienne. Le Hezbollah va bientôt devoir faire face a la colère du peuple. Ce même peuple qu'il mène par le bout du nez en lui racontant des bobards et lui faisant croire a des victoire qui n'ont jamais existé le remettra a sa place. Le parti implosera de lui même. Patience est le maître mot!

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 18, le 02 septembre 2015

  • SE VOULANT APOLITIQUE... SANS L'ÊTRE... VOILÀ QUI DIT TOUT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 07, le 02 septembre 2015

  • Nous saluons votre article, meme sil est la pour faire passer le temps...

    Kaldany Antoine

    06 h 52, le 02 septembre 2015

  • "Entre le refus civique de Geagea de voter pour son rival, et le boycottage incivique des séances parlementaires par Äoûn, il est de plus en plus clair que c'est cette dernière position que le patriarche condamne, plutôt que la première." ! Quel exploit, de la part de ce râëéééh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    05 h 14, le 02 septembre 2015

  • Il est archisûr que c'est la vacance à la présidence de la République qui a engendré tout ce "chaos destructeur" dans lequel, fatalement, toutes les parties politiques et de la société civile perdent de plus en plus la boussole. Ce chaos, ceux qui bloquent l'élection présidentielle, soit le CPL et son allié le Hezbollah, en sont très gravement responsables. Cela est vraiment clair comme bonjour. Il est absolument indispensable que ces deux partis reviennent à la raison et tirent les conséquences qui s'imposent. La première de ces conséquences est la nécessité absolue d'admettre que seule une candidature à la présidence réunissant un consensus national peut sauver ce pays de la désintégration totale et le remettre en marche.

    Halim Abou Chacra

    05 h 07, le 02 septembre 2015

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