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Économie - Liban - Media

Les télés libanaises à la recherche d’un nouveau modèle économique

Menacées par la stagnation du marché publicitaire et l'évolution des modes de consommation, les huit principales chaînes du Liban vont créer une entité commune qui sera chargée, dans un premier temps, de collecter des droits de retransmission auprès des câblodistributeurs.

Si les câblodistributeurs reversaient 6 000 livres par mois aux chaînes libanaises, cela leur rapporterait entre 20 et 25 millions de dollars par an, estime le PDG de la LBC, Pierre al-Daher.

La transparence n'est pas le fort des télés libanaises. Mais selon Talal Makdessi, le directeur de Télé Liban, les huit principales chaînes du pays (OTV, LBC, al-Manar, Télé Liban, al-Jadeed, NBN, MTV, Future TV) ont accusé des pertes d'au moins 50 millions de dollars l'an dernier. « Les dépenses du secteur sont estimées à environ 110 millions de dollars par an, tandis que les recettes publicitaires n'ont pas dépassé les 60 millions en 2014 », affirme-t-il. Le PDG de la LBC, Pierre al-Daher, est encore plus pessimiste, estimant les revenus publicitaires réels à seulement 50 millions de dollars en 2014. Un montant équivalent à celui de l'année précédente alors que les dépenses de programmation ne cessent d'augmenter sous l'effet de la forte concurrence entre les chaînes.


La situation ne devrait pas s'arranger dans les années à venir. « Les annonceurs vont se tourner de plus en plus vers Internet au détriment de la télévision. La publicité ne pourra pas continuer de nous faire vivre : nous devons repenser notre modèle », déclare le directeur d'al-Jadeed, Dimitri Khodr.
La publicité n'est déjà pas la seule source de revenus de l'industrie. Certaines chaînes vivent quasi exclusivement de contributions politiques et, en période électorale, l'argent politique coule généralement à flots. Mais dans la conjoncture actuelle, « l'argent politique est lui aussi en train de se tarir », souligne une source du secteur.


Ce contexte difficile a poussé les huit chaînes à engager un dialogue, qui a abouti pour le moment à une mesure concrète : des négociations collectives avec les câblodistributeurs, légaux et illégaux, pour imposer des droits de retransmission de 6 000 livres pour le bouquet des huit chaînes. Cela devrait rapporter aux télés locales entre 20 et 25 millions de dollars par an, selon Pierre al-Daher.

 

(Pour mémoire : Pierre el-Daher à « L’OLJ » : Il faut à tout prix sortir les chaînes de télévision des urgences)


« La télé payante est le seul modèle viable pour les chaînes libanaises », résume le directeur de NBN, Kassem Sweid. Son homologue de la LBC tient toutefois à préciser qu'il ne s'agit pas de changer de modèle, mais simplement d'institutionnaliser une situation existante. « Cela fait longtemps que les Libanais payent pour regarder les chaînes locales, puisque l'écrasante majorité des foyers nous reçoivent à travers les câblodistributeurs illégaux à qui ils versent 15 000 à 20 000 livres par mois. » Tout l'enjeu pour lui consiste à ce que ces distributeurs reversent aux chaînes une partie de cette somme.


Pour retransmettre certains bouquets satellitaires étrangers comme ceux de BeinSport ou OSN, ces câblodistributeurs reversent déjà des droits à leur représentant au Liban, la société Sama. « Le même principe doit s'appliquer aux chaînes libanaises, estime Talal Makdessi. Ils n'ont pas le droit de revendre notre contenu sans le payer, sachant qu'aux heures les plus regardées, entre 19 et 22 heures, nos programmes attirent 85 % des téléspectateurs libanais. »


Selon le directeur d'al-Jadeed, une entité commune sera donc créée pour gérer les droits de retransmission au Liban et à l'étranger. « On ignore encore la forme exacte que prendra cette personne morale. »
« Pour le moment les négociations se limitent aux câblodistributeurs locaux, tempère toutefois Kassem Sweid. Elles devraient se conclure dans les semaines qui viennent. S'ils refusent de payer, nous allons couper le signal. Nous avons des alternatives, mais je préfère ne pas en parler pour le moment. »
À partir de juin 2015, date à laquelle le Liban est censé basculer vers la télévision numérique, les foyers ne pourront plus recevoir gratuitement les chaînes locales à travers une antenne classique. Les chaînes privées vont en effet couper leur signal analogique, qui leur coûte 1,5 million de dollars en entretien par an, alors que l'État n'a toujours pas mis en place les antennes nécessaires pour permettre aux citoyens de capter la télévision numérique. Si les négociations avec les câblodistributeurs échouent, les chaînes locales pourront donc créer, à travers la nouvelle entité, leur propre réseau de distribution : soit elles coderont le signal sur satellite et proposeront leur bouquet par abonnement, soit elles étendront leur propre réseau de câbles comme les acteurs illégaux.

 

(Lire aussi : Au Liban, le petit écran gagne du terrain en termes d’audience)


À lui seul, le passage au modèle payant ne peut cependant pas sauver les chaînes libanaises. « Les modes de consommation de la télévision sont en train de changer, souligne Dimitri Khodr. La télévision traditionnelle, linéaire, va disparaître avec le temps, sauf peut-être pour les informations et le sport. Pour tous les autres programmes, on va passer à la vidéo sur demande. Nous devons accompagner cette révolution. L'entité commune sera donc chargée de se positionner sur ce créneau. »


D'autres projets sont également envisagés : une régie commune, une consolidation de la grille des programmes, des chaînes thématiques... mais pour le moment, ils sont au stade de la discussion. « Ce qui est certain, c'est que les huit chaînes ont décidé d'agir de manière solidaire pour augmenter les recettes, baisser les dépenses et améliorer la qualité des programmes. Toutes les idées sont sur la table », résume Talal Makdessi. D'éventuelles fusions sont toutefois exclues à ce stade tant que les intérêts politiques primeront sur la logique économique.

 

La transparence n'est pas le fort des télés libanaises. Mais selon Talal Makdessi, le directeur de Télé Liban, les huit principales chaînes du pays (OTV, LBC, al-Manar, Télé Liban, al-Jadeed, NBN, MTV, Future TV) ont accusé des pertes d'au moins 50 millions de dollars l'an dernier. « Les dépenses du secteur sont estimées à environ 110 millions de dollars par an, tandis que les...

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